Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Agnès Buzyn : « Dès janvier j’avais alerté l’exécutif »
L’ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn a soulevé questions et critiques en affirmant avoir alerté le Premier ministre sur la gravité de l’épidémie et en évoquant « une mascarade » pour les élections
Dans un entretien donné au Monde, Agnès Buzyn raconte avoir « pleuré » lorsqu’elle a quitté ses fonctions gouvernementales le 17 février pour mener la bataille des municipales à Paris sous la bannière de LREM. « Quand j’ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections n’auraient pas lieu ». « Le 11 janvier, j’ai envoyé un message au président sur la situation. Le 30 janvier, j’ai averti Édouard Philippe que les élections ne pourraient sans doute pas se tenir », a ajouté Agnès Buzyn, médecin de profession. Elle confie aussi que la dernière semaine de campagne « a été un cauchemar » : « J’avais peur à chaque meeting. J’ai vécu cette campagne de manière dissociée. » Selon des sources concordantes, dimanche, après le premier tour, elle s’est encore emportée : « Je veux mettre fin à cette mascarade des élections, ça suffit ». Mais elle « regrette » le mot « mascarade ». « Mes propos concernaient le fait de débuter des discussions de fusions de listes électorales » pour le deuxième tour en pleine pandémie, assure
Agnès Buzyn. Elle se dit « totalement solidaire » avec le gouvernement, assure que « toutes les mesures anticipées ont été mises en oeuvre pour assurer la sécurité sanitaire de nos concitoyens » lors du 1er tour. « Ce sont les avis et les faits scientifiques qui ont - à chaque étape - fondé les décisions prises par le gouvernement », a-t-elle ajouté. Plus tôt dans la semaine, l’ex-ministre de la Santé avait plaidé en vain pour un report du scrutin auprès d’Emmanuel Macron.
La colère de l’opposition
Les révélations d’Agnès Buzyn, par ailleurs professeur d’hématologie, ont semé le trouble dans la classe politique, jusque dans son propre camp. La porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a rappelé, hier, « l’engagement » d’Agnès Buzyn « en tant que ministre du gouvernement puisqu’elle a eu l’occasion elle-même, aux responsabilités, de mettre en place les premiers éléments d’organisation autour de la gestion de cette crise ». Une source parlementaire de La République en marche a fustigé auprès « des propos irresponsables » et prévenu : « Elle devra en répondre en temps voulu ». Dans les oppositions, les critiques ont été crescendo : des propos « effarants » pour Marine Le Pen, « consternants » selon JeanLuc Mélenchon. « A-t-elle su et prévenu trois mois avant ? Et dans ce cas, pourquoi rien n’a-t-il été fait ? », a encore interrogé le chef de file de La France insoumise. « Si c’est vrai, ce sera un tsunami politique sans précédent », a de son côté réagi le président des députés LR, Damien Abad. Dimanche, la candidate LREM à la mairie de Paris avait déclaré devant son entourage que le gouvernement devait « dans les 24 heures, prendre des décisions fermes » pour lutter contre l’épidémie.
« Emmanuel Macron était prévenu »
Interrogée, elle avait confié : « L’heure est grave... dans 15 jours, c’est la Bérézina à Paris ! » Elle avait assuré avoir dit la même chose au président Emmanuel Macron. Lundi, elle a écrit à ses militants qu’elle « arrêtait » sa campagne. « Les conditions ne sont plus réunies pour continuer une campagne électorale » et «la priorité est à la lutte contre le coronavirus ».