Nice-Matin (Cannes)

Emmanuelle et Mathilde Seigner

RÉUNIES DANS « BUNGALOW 21 »

- FABRICE MICHELIER fmichelier@nicematin.fr > « Bungalow 21 » ce soir au Festival de Ramatuelle. Tarif : 67,50 euros. > Emmanuelle Seigner sera en dédicace demain de 9 h à 12 h place de l’ormeau pour les Plumes de Ramatuelle.

Une anomalie. Jamais, Mathilde et Emmanuelle Seigner ne s’étaient retrouvées sur scène ensemble. C’est désormais chose faite. Les frangines sont réunies dans « Bungalow 21 ». Une pièce écrite par Eric-emmanuel Schmitt, sur une idée de Benjamin Castaldi. Ce dernier voulait évoquer le souvenir de sa grand-mère Simone Signoret, de son grand-père Yves Montand et de leur aventure américaine durant laquelle ils ont croisé la route de Marilyn Monroe et Arthur Miller lors du tournage de « Let’s make love ». C’est cette histoire qui sera présentée ce soir sur la scène du théâtre de Verdure à Ramatuelle. Des planches que Mathilde a foulées une seule fois dans sa carrière et qu’emmanuelle découvre. Hier, elles étaient conviées chez Jacqueline Franjou pour un déjeuner de famille avec également Gérard Jugnot et son fils Arthur (qui jouaient le soir-même « Le jour du Kiwi »). L’occasion pour les deux soeurs comédienne­s de se livrer sur leurs retrouvail­les théâtrales.

Mathilde, vous retrouvez Ramatuelle après avoir joué ‘‘L’étourdi’’ en 1991. Quel souvenir en gardez-vous ?

Mathilde Seigner : C’était notre tante qui mettait en scène (sa soeur coupe).

Emmanuelle Seigner : Elle vient toujours en famille en fait (rires) ! M.S. : Je garde un très bon souvenir, émouvant, festif aussi avec les gens qui lancent les coussins. Il s’était mis à pleuvoir sur une phrase de l’acteur Roger Mirmont qui disait “Le ciel en sa bonté produit comme un miracle” et là le ciel a tonné !

Vous venez jouer « Bungalow 21 ». Comment présenteri­ezvous cette pièce ?

E. S. : J’ai envie de dire que c’est une espèce de « boulevard pop ». Les gens ne vont pas s’ennuyer ! C’est déjà énorme. C’est amusant et il y a beaucoup de profondeur, notamment dans la deuxième partie. La première est plus légère. Il y a un peu de tout.

M.S. : Ça dure 1h30 et c’est vraiment distrayant ! Dans la deuxième partie, comme le dit Emmanuelle, il y a un propos sur les femmes, les actrices, le fait de vieillir…

E.S. : Ce sont deux femmes qui ont une vision de la vie complèteme­nt différente. Une assume son âge, certes de manière mortifère, et une autre préfère s’en aller car elle ne veut pas qu’on la voie décrépir. M.S. : Elles ont ce point commun : elles se détruisaie­nt toutes les deux. Signoret était tombée dans l’alcool et Marilyn plus dans les médocs.

Qu’est-ce qui vous a fait accepter ce projet ?

M.S. : Ça fait quatre ans que Benjamin (Castaldi) me poursuit pour jouer sa grand-mère ! J’ai dit non à de multiples reprises. Il me manquait peut-être un peu de confiance pour jouer Signoret et puis, finalement, j’ai accepté. Je me suis dit pourquoi, après tout, je n’imposerai pas ma façon de jouer Simone Signoret. Puis on cherchait Marilyn…

E.S. : Et vous ne trouviez pas ! Ils étaient en carafe et c’est pour cela qu’ils ont pensé à moi (rires)

M.S. : J’avais déjà cette idée dans un coin de la tête. Un jour, c’est devenu une évidence.

E.S. : L’idée de jouer ce

Les deux soeurs sont réunies pour la première fois sur scène dans une pièce où elles campent Marilyn Monroe et Simone Signoret. Elles sont ce soir à Ramatuelle. Elles nous racontent cette aventure.

personnage m’a beaucoup plu et de partager la scène avec Mathilde… C’était une super occasion de jouer au théâtre en plus, ça avait un vrai sens car notre famille vient de là.

Incarner Marilyn, cela représente quoi pour vous ?

E. S. : Je me suis sentie protégée car c’est une Marilyn française finalement, elle n’existe pas vraiment. Cela permet de mettre une petite distance. On n’est pas dans une caricature, ce n’est pas un biopic. On est dans l’évocation, l’incarnatio­n.

Comment vous êtes-vous glissées dans ce rôle ?

E.S. : C’est un personnage qui m’a beaucoup hanté. Les photograph­es m’ont souvent mis dans des séries en Marilyn. C’est aussi quelqu’un que j’admire beaucoup, j’ai vu tous ses films. Finalement, il y avait quelque chose d’assez naturel à la retrouver. Après, c’est beaucoup de travail et de répétition qui ont permis de trouver nos personnage­s. Pour l’anecdote, j’avais joué dans un clip d’une jeune réalisatri­ce italienne. Elle m’avait fait en Monica Vitti, mais j’avais plus l’air de Marilyn.

M.S. : Oui, d’ailleurs quand elle m’a envoyé ce clip, j’ai transmis à

Benjamin Castaldi en lui disant ‘‘tu ne trouves pas que ça saute à la gueule ?” Et ça s’est fait comme ça !

Et pour vous, comment avez-vous appréhendé Simone Signoret ?

M.S. : Je n’ai rien préparé. Je me suis dit que je ne ferai ni Simone Signoret ni Mathilde Seigner mais Simone et Mathilde. Avec le risque qu’on y croit ou pas.

E.S. : Jérémie Lippmann (le metteur en scène) nous a vraiment dirigées dans l’optique de trouver en nous l’âme des personnage­s. On peut se permettre cela au théâtre car il y a une convention avec le public. Ce n’est pas réaliste, c’est une création qui donne une liberté énorme.

Vous êtes des habituées du cinéma, de la télévision… Que vous inspire le théâtre ?

M.S. : J’aime, mais pas longtemps ! Un mois par un mois ça irait, j’en ferais plus régulièrem­ent, mais des centaines de représenta­tions à la suite, c’est trop. Ça devient un rythme très bizarre, je n’aime pas le côté répétitif. Au bout d’un moment, cela devient trop une routine pour moi. Sur un tournage, aussi chiant qu’il soit, on tourne des scènes différente­s tous les jours, dans des lieux différents. Être chaque soir sur la même scène, avec les mêmes routines, c’est usant.

E.S. : Moi, ce qui me fatigue le plus, c’est de me faire des bouclettes (rires) ! Je n’en pouvais plus ! Dès que je vois un fer à friser je pars en courant ! Pour le coup, j’aime bien le côté rituel et troupe avec de super partenaire­s. Mais comme Mathilde, il faut que ce soit sur une courte période.

Vous jouez pour la première fois ensemble. Cela ne s’était jamais présenté ou alors était-ce une volonté ?

M.S : Cela ne s’était jamais présenté ! On se disait qu’on aimerait bien mais ce n’est jamais venu à nous.

E.S : On n’a pas les mêmes goûts, on est dans des univers très différents. Il fallait que ce soit deux beaux rôles et là, c’est une belle occasion. Et on a presque regretté de ne pas avoir plus de scènes ensemble. C’était un plus de jouer ensemble, cela ajoute une dimension émotionnel­le et artistique.

M.S. : Ce que je trouve très émouvant, c’est que nous sommes deux soeurs actrices et il n’y a pas du tout de concurrenc­e entre nous. On est tellement différente­s que c’est formidable d’y arriver. On se retrouve comme quand on a été enfants.

Cette expérience a-t-elle fait évoluer votre relation ?

M. S. : On s’est hyper bien entendu. Vraiment ! Il y a également un côté un peu surréalist­e, notamment sur la scène de fin où je me suis dit “je dis ça à ma soeur.”

E.S. : Ce qui est émouvant, c’est que l’on joue nos personnage­s et à des moments je me disais “mais c’est ma soeur !’’ Il y a cette dualité qui est super intéressan­te et parfois troublante.

« Nous sommes deux soeurs actrices, mais il n’y a pas du tout de concurrenc­e entre nous »

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(Photo Bestimage)

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