« On l’empêche de reprendre ses droits »
Comment la nature reprend-elle ses droits ?
Elle les a repris le octobre [] ! On s’est aperçu que beaucoup de gens avaient intégré que c’était un phénomène naturel et que cela allait se reproduire. La tempête a impacté tout ce qui se trouvait sur le passage de l’eau, ou sur les terrains capables de canaliser. Des pans de montagne sont ainsi tombés, au point que des camions viennent récupérer les sédiments sur l’ancien golf de Vievola pour les travaux dans la vallée. La tempête a touché des endroits structurants : routes, sentiers, canyon. Forcément, ça choque. Mais si on regarde ailleurs, rien n’a changé. La faune et la flore sont toujours là, le cycle naturel continue. Les espaces naturels ne se sont pas transformés en dehors des cours d’eau. C’est aujourd’hui qu’on l’empêche de reprendre ses droits.
De quelle manière ?
Pour refaire la route entre Tende et Vievola, ils ont aplati le fond de la Roya. Ils estiment qu’ils ne peuvent pas amener une quantité suffisante de béton, alors ils juxtaposent sur un socle des grands panneaux en « L » préfabriqués. Pour ce faire, les camions se retrouvent dans le lit de la rivière. Résultat : la Roya n’est plus qu’un canal poussé en rive droite. Le problème, c’est que la préfecture bloque l’accès à tous les dossiers relatifs aux travaux dans le lit de la Roya. Grâce à France Nature Environnement Paca, nous avons été reçus – avec les associations de la Tinée et de la Vésubie – le juin. Ils nous ont dit, en substance, que les dossiers déposés par le Smiage n’étaient pas communicables. Ils s’abritent derrière l’urgence pour ne pas avoir à faire d’instruction.
Que faudrait-il faire ?
Les services de l’état se contredisent. Lors de la réunion, nous avons eu droit à un exposé où un membre de l’office national de la biodiversité nous a expliqué le phénomène, qu’il allait se reproduire… et qu’il ne fallait pas toucher au lit tel qu’il s’est formé. La directrice du service « restauration de terrains en montagne » nous a également dit que cela ne servait à rien de retirer les sédiments. Mais quand on a posé la question de pourquoi, alors, on avait creusé, canalisé, créé des talus, nous n’avons pas eu de réponse. Si ce n’est qu’il fallait protéger la population. Sauf que le coût financier, en termes de risques, et à l’égard de la biodiversité, n’est pas abordé. Quant à nous, nous sommes exclus de ces débats.
Quelles sont les conséquences ?
Il faudra des années pour que le lit soit de nouveau ouvert aux échanges. Ils l’ont stérilisé.
Comment faire autrement ?
On ne dit pas que la route n’est pas à reconstruire, pas même ailleurs
(cela voudrait dire détruire d’autres endroits) mais simplement de manière à ne pas abîmer le fond de la rivière. Le col de Tende ne sera pas rouvert avant - ans, alors pourquoi tant d’urgence ? Cela devrait nous laisser le temps de réfléchir à des moyens moins mécaniques. Beaucoup de gens sont par ailleurs favorables à une nouvelle piste de montagne pour Castérino, en continuant celle de Caramagne. C’est-à-dire dans un joyau de la biodiversité ! On fonctionne comme si la nature était une ressource dans laquelle on peut piocher sans cesse.
Vous êtes davantage favorables au train…
La route amène avec elle des nuisances. On ne pourra pas avoir du tourisme vert si véhicules essence ou diesel passent par la vallée. Si on avait pu mettre les millions d’euros consacrés à la route dans le rail, il aurait pu retrouver une vitesse normale, et, pourquoi pas une fréquence de trains par jour, comme avant…
Nous n’avons pas besoin d’autre chose.
Quid
La tempête en elle-même n’a pas amené de pollution. Mais elle a lessivé toutes les décharges. Tout se retrouve à Vintimille, y compris les résidus de l’ancien incinérateur de Tende, la décharge en dessous de Berghe que nous avions réussi à stopper, ou le dépôt d’huile de Piène Basse.
de la pollution ? Une note positive ?
La préfecture a mis en ligne des portés à connaissance, avec une délimitation du nouveau lit de la rivière, et une mention des zones inconstructibles. Cela servira de base pour les prochains Plans locaux d’urbanisme. Et on constate que c’est rouge là où il faut ; la zone couvre globalement l’ampleur de la crue.
Les travaux ont stérilisé le lit de la Roya”