Gueule de bois chez Mariani : « On est le er parti de France et on n’est jamais élu »
Il est 22h 15...Quatre minutes de discours. Et la fuite vers la cour du Florida Palace, le centre des congrès désuet situé dans un quartier excentré de Marseille, que le Rassemblement national avait choisi de transformer en QG, hier soir, pour sa soirée électorale.
Quatre minutes de discours, sans vibrato, sans emphase. Puis plus rien. Les grandes baies vitrées de l’établissement se sont refermées. Mur infranchissable entre la presse et le chef de file du RN, applaudi par une petite centaine de militants.
En 2015, Marion Maréchal-le Pen était apparue radieuse et combative, au soir du second tour, en dépit du verdict des urnes. Thierry Mariani, lui, traits tirés, ne fait pas semblant. Ne transforme pas la défaite en victoire. Mariani n’a plus envie de rien. Pour le moment.
« Seuls contre tous les autres »
Les militants avaient commencé à remplir le QG au compte-gouttes à partir de 19 h 30. 20 heures, quelques yeux tournés vers les écrans géants. Et le silence. Même pas un petit soupir de déception...
« Et bien, on s’est pris une petite claquasse. C’est normal, puisqu’on était seul contre tous. Comment faire face à ça ? », grommelle un membre du staff du candidat frontiste. Seul contre tous. C’est le leitmotiv de la soirée. « Je suis déçu. Mais est-ce que vous trouvez que c’est étonnant ? On s’est battus contre tous les autres. Tous. De l’extrême gauche à la droite », peste Chris, 23 ans. Qui s’interroge : « Comment vont-ils gouverner la Région ? Comment des gens que tout oppose vont pouvoir s’entendre ? »
La soirée se poursuit. Péniblement. Quelques militants de plus. À peine. Même les petits fours ne trouvent pas preneurs. Un peu de rosé, du rouge de table. Ça, ça passe mieux. « Les gens, ils ne comprennent rien ! C’est normal, il n’y a plus de Français, il n’y a plus que des étrangers. Moi, je te les foutrais tous dehors », crachote Robert, tenue indienne et verre à la main.
Il sera gentiment exfiltré par les gros bras de la sécurité.
Gilles Baldacchino, conseiller municipal RN à Six-fours, dans le Var, tente de reprendre la main : « La grande gagnante, c’est l’abstention. Pas Renaud Muselier. Il va falloir que l’on remobilise. Il faut faire en sorte que les Français renouent avec la politique. »
22 heures, toujours pas de Thierry Mariani à l’horizon. « Il arrive dans 5 minutes », jure son staff. « C’est mon champion. S’il a perdu, c’est parce que Muselier, il fait copain avec les macronistes. Muselier, c’est le toutou de Macron », lance Robert. Sa femme abonde : «Jevais déchirer ma carte d’électeur, on est le premier parti de France et on n’est jamais élu nulle part. »
« Une sécession démocratique »
Si Thierry Mariani a refusé de se frotter aux journalistes, pas Philippe Vardon. Le chef du RN pour le bassin niçois y croyait, «auvudes sondages un peu flatteurs ». Et puis, l’élu régional sortant a vite compris. « Dès midi, on a vu la participation et on s’est dit ça allait être compliqué. » L’opposant de Christian Estrosi au conseil municipal de Nice souffle : « Les électeurs avaient rêvé de changement. Je suis déçu aussi pour eux. Ils n’ont voté ni pour nous, ni pour les autres. Je pense que les électeurs ne sont plus dans une fracture démocratique mais dans une sécession démocratique. On le constate partout. Et objectivement, ça devrait inquiéter tout le monde. »