« Nice, ça me manque »
Alassane Plea retrouve la compétition, samedi, avec le Borussia M’Gladbach face à Francfort. L’ancien attaquant du Gym (2014-2018) s’est longuement confié à Nice-Matin
Sur son profil WhatsApp, il a gardé une photo de profil, avec le maillot niçois sur le dos. Une image de célébration de but, les bras décollés du corps, un soir de derby victorieux contre l’AS Monaco. A ans, Alassane Plea a quitté la Côte d’Azur pour le Borussia M’Gladbach à l’été . Pour autant, il n’a pas coupé le cordon avec son ancien club, celui qui l’a révélé au plus haut niveau. Devenu international depuis son passage en Bundesliga, Plea a accepté de raconter ces dernières semaines dans la tourmente et la reprise prochaine du football. Car, si la France a dit stop, l’Allemagne, elle, a offert le droit à ses footballeurs de reprendre du service.
A quelques jours de la reprise de la Bundesliga, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
C’est un peu étrange. On est au vert depuis le début de semaine dans un hôtel juste à côté du Borussia Park. Ce sont les préconisations de la Ligue, avant les matchs, pour éviter tout risque de contagion du virus.
En Allemagne, le confinement a été moins strict qu’en France…
En fait, on ne peut pas vraiment dire qu’on a été confinés. On pouvait se balader dans un parc, aller faire ses courses normalement. Concernant le foot, on n’a arrêté qu’une semaine. Il y a d’abord eu des reprises individuelles. Depuis plus d’une semaine, on s’entraîne de nouveau normalement, avec des contacts, des tirages de maillots, etc. C’est du foot comme avant (sourires)
Êtes-vous inquiet ?
Au début, on avait quelques craintes. Mais le club a mis en place un tas de mesures préventives. On n’est plus dans le même vestiaire, il y a du gel partout. On est également testés tous les trois jours. Honnêtement, on se sent en sécurité. Ici, en Allemagne, tout le monde est très respectueux des consignes. C’est carré.
Au sein du vestiaire, vous parlez ballon ou Covid- ?
Au début, on ne parlait pratiquement que du virus. Mais la Bundesliga reprend ce week-end, on est obligé de basculer en mode compétition. On est focus sur cette fin de saison. Il reste neuf journées. Notre objectif est clair : se qualifier pour la Ligue des champions (Gladbach est e). On l’a ratée de très peu la saison dernière. Ce sera difficile car on est à la lutte avec Dortmund, Leipzig et Leverkusen, du très lourd.
Physiquement, comment vous sentez-vous ?
C’est une situation étrange. De plus, on va jouer tous les trois jours pendant deux semaines. Je me suis fait une petite élongation. Ça va mieux. Les corps ne sont pas habitués à s’arrêter de manière aussi brusque. Il va falloir retrouver le rythme de la compétition.
Cela vous semble logique de rejouer au football à tout prix ?
Je fais confiance aux instances. Si le gouvernement allemand valide, on doit y aller. Le club a très bien expliqué la situation, notamment sur le plan économique. Les droits TV seront versés si le championnat va à son terme. Nous, joueurs, on pense aussi aux employés du club, dont certains pourraient être menacés de licenciement. Des clubs peuvent rapidement se retrouver dans la galère. C’est une forme de solidarité de reprendre. Les supporters vont également être heureux de nous revoir, même si ce n’est qu’à la télévision.
Le huis clos, un autre monde ?
C’est clair. Passer de spectateurs à zéro, ça va faire bizarre. Le club a prévu de mettre des pancartes avec la tête des supporters sur chaque siège. C’est une bonne idée.
Votre famille ne pourra pas être à vos côtés, comme c’est le cas lors de chaque match à domicile…
Oui, Lille (dont il est originaire, ndlr) n’est qu’à trois heures de route. Je n’ai plus vu mes proches depuis plus de deux mois. C’est ce qui me manque le plus, avec les amis. Tout s’est arrêté du jour au lendemain, c’est bizarre quand même. Heureusement, j’étais avec ma compagne. Seul, dans ces moments, il y a moyen de faire une dépression.
Parlons football… La Bundesliga, c’est total régal ?
Le top, un football total. Ça attaque dans tous les sens, ça va d’un but à l’autre. Tu joues chaque week-end devant spectateurs. Ça change de la France (sourires). Je n’ai jamais regretté ce choix. Depuis mon départ de Nice, j’ai encore progressé. Je joue, je marque, je fais marquer ( buts et passes décisives). A gauche, ou dans l’axe, peu m’importe. Les fans m’apprécient. Toutes ces raisons m’ont convaincu de repousser des avances d’un club chinois (en janvier ). Quand tu vois les chiffres, les salaires, ça peut faire vaciller, mais ce n’était pas le moment de quitter l’Europe. L’argent n’a jamais été mon moteur. De plus, on a un super groupe de potes à Gladbach, qui me fait penser à mes années niçoises.
C’est comment la vie dans la Ruhr ?
Plus triste que sur la Côte, c’est certain. En même temps, il n’y a pas meilleur endroit que Nice pour vivre. Le soleil, le ciel bleu, la mer, c’est un cadre de vie exceptionnel. J’ai gardé ma maison, beaucoup d’attaches. Mon grand frère habite à Nice, il est tombé amoureux du coin. Dès que je peux, je reviens.
Nice vous manque, donc…
Oui, ça me manque. C’est un club qui a compté. J’y ai passé quatre années merveilleuses. Nice fait partie de ma vie. C’est mon deuxième chez moi après Lille. Je suis supporter du club. Le samedi, après mon match, je regarde le Gym.
Il ne reste que le bon ?
Oui, je ne garde que ça. La première saison avait été compliquée avec les supporters mais bénéfique pour ma carrière. J’étais sifflé parfois, mais je me suis toujours relevé et j’ai avancé.
Quel est votre plus beau souvenir en rouge et noir ?
C’est délicat d’en ressortir un seul. La quatrième place acquise en , c’était très fort. Avec Valère (Germain) et Hatem (Ben Arfa) ,on formait un sacré trio. L’année d’après, on finit troisième. Un moment exceptionnel. On avait un groupe de fous, des joueurs de dingue. On passait notre temps à se marrer.
Et il y avait Mario Balotelli…
Il m’a énormément fait progresser. On avait envie de se mettre à son niveau, lui montrer qu’on était de bons joueurs. Lui avait déjà fait des très grands clubs. On voulait le faire briller. Il a mis la lumière sur Nice. Il était exigeant. Je ne me suis jamais embrouillé avec lui, même si parfois il marchait. Je connaissais son jeu, je m’adaptais. Et puis, à plusieurs reprises, il nous a sauvés.
Vous avez eu la chance de côtoyer deux grands entraîneurs (Claude Puel et Lucien Favre)…
Puel, c’est lui qui m’a lancé en L, et m’a replacé dans l’axe. Il m’a appris le poste de neuf. Un super coach. Lucien Favre, tactiquement, c’était la grande classe. Quand on se croise en Allemagne, on discute un moment à chaque fois. Il nous faisait souvent rire. Je sais qu’il appelle encore certains joueurs qu’il a eus à Nice. Il est comme ça Lucien.
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Avec un peu plus de soutien sur les côtés, Dolberg peut tranquillement mettre buts”
Si vous deviez sortir trois coéquipiers croisés à Nice, ce serait qui ?
(Direct) Dante. La grande classe. Un Monsieur. Le patron. Quand tu vois un gars de son âge s’entraîner avec autant de sérieux, tu ne peux que t’inspirer de lui. Ensuite, c’est délicat de n’en citer que deux autres. Valère (Germain), Hatem (Ben Arfa), Mario (Balotelli), Mika (Seri)… Lui, il me régalait de passes décisives. Il y a eu Dalbert, Ricardo, Neal (Maupay), Wyl (Cyprien) ,Bod (Bodmer) ,Jo (Amavi), Digard, Malang (Sarr) .Je suis en contact avec Alexy (Bosetti) toujours.
Vous avez participé à un concours lancé par l’OGC Nice (il devait élire le membre le plus tchnique du Mèfi Club). Le lien est solide entre vous…
Le club prend régulièrement de mes nouvelles. Quand il me sollicite, je suis toujours là. Et puis qui sait si un jour je ne rejouerai pas pour ce club ? Les dirigeants sont en train de construire quelque chose de très attractif. Il va y avoir de grosses équipes à Nice dans les années à venir. Il y a un joueur que j’adore en ce moment, c’est Kasper Dolberg. Lui, il est très très fort.
Ce serait pas mal un duo Plea-Dolberg non ?
C’est vrai (sourires). En plus, je suis sûr qu’avec un peu plus de soutien sur les côtés, il peut tranquillement mettre buts. Je ne le connaissais pas bien mais, franchement, c’est la grande classe dans les appels de balle, notamment au premier poteau. Il n’y a pas beaucoup d’attaquants de ce calibre en Europe.
L’Euro est-il dans un coin de votre tête ?
La concurrence est féroce en sélection. Mais le sélectionneur me connaît, il suit mes performances. J’ai goûté à l’équipe de France. J’ai forcément envie d’y revenir. C’est un rêve de gosse qui s’est réalisé.