Fillon, misanthrope et sybarite
Tout, du moins beaucoup, serait donc affaire de psychologie. On ne peut comprendre le naufrage de François Fillon, en , sans sonder ses ressorts intérieurs. C’est la thèse défendue par Véronique Jacquier, journaliste politique à Sud
Radio (et qui a débuté comme stagiaire à notre agence de Saint-Raphaël). L’auteure avoue sans ambages avoir « été filloniste »… Utile précision, tant l’intéressé en prend pour son grade sous sa plume !
Elle lui concède certes « de la densité, de la profondeur, de l’humour, une distance saine pour juger d’une situation, des convictions et un programme qui se voulait courageux ».
Cela posé, en guise d’adoucissant dans les ultimes pages, le livre tient du lessivage. Véronique Jacquier habille François Fillon en misanthrope sybarite et velléitaire. Un homme engoncé dans ses petits plaisirs, peu porté vers les autres, âpre au gain jusqu’à la radinerie pour assumer son statut jaloux de gentilhomme sarthois. Un homme tombé dans la politique un peu par hasard, qui a tracé son chemin dans la facilité, mais s’est révélé incapable de fédérer au moment où le Graal lui tendait les bras, prisonnier de ses enfermements. Un dilettante, en somme, « dont le lien avec la politique n’est pas ombilical », raffolant non du pouvoir mais de ses à-côtés, amateur de bonnes et belles choses, peu enclin quant à lui à la rigueur qu’il professait, aux « trop belles mains » pour les salir dans le cambouis politique.
Défilent l’enfant du collège jésuite du Mans « qui a vécu comme une humiliation d’avoir moins d’argent de poche que la plupart de ses camarades», le vainqueur de la primaire parti skier à Vald’Isère au lieu de peaufiner son projet présidentiel… Quelqu’un « qui n’est jamais aussi bien qu’avec lui-même », selon son ami Jean de Boishue. Véronique Jacquier en nourrit sa conclusion : « Tant d’imprudences, c’est incompréhensible, sauf si le candidat voulait entrer à l’Elysée mais sans renoncer à rien et surtout pas à sa légèreté… Il n’a pas eu les réflexes d’une bête politique. » L’Artilleur, 252 pages, 16 euros.