Attentat de à Bruxelles : inculpation d’un complice d’Abdeslam Commerce : quelle attitude europénne face aux États-Unis ?
Le jihadiste tunisien Sofiane Ayari, complice de la cavale de Salah Abdeslam et déjà mis en cause pour les attentats de novembre à Paris, a été inculpé dans l’enquête sur les attaques du mars à Bruxelles, a annoncé hier le parquet fédéral. Ayari, arrêté le mars à Bruxelles en même temps qu’Abdeslam, a été inculpé jeudi pour « participation aux activités d’une organisation terroriste ». Les enquêteurs soupçonnent cet ancien combattant du groupe jihadiste État islamique (EI) d’avoir été mêlé à un projet d’attentat à l’aéroport d’Amsterdam-Schipol qu’envisageait la cellule à l’origine des attaques parisiennes du novembre ( morts).
Neuvième inculpé
Incarcéré en Belgique, il était le coprévenu de Salah Abdeslam dans le procès qui s’est tenu à Bruxelles en février pour la fusillade avec des policiers survenue le mars dans la capitale belge, trois jours avant leur arrestation. Comme Abdeslam, Ayari, ans, a été condamné le avril à vingt ans de prison pour « tentatives d’assassinat terroriste », condamnation devenue définitive fin mai, puisqu’aucun n’a fait appel. Quatre policiers avaient été blessés le mars dans cette fusillade consécutive à une perquisition dans une des nombreuses planques belges de la cellule jihadiste, dont d’autres membres allaient commettre peu après les attentats de Bruxelles ( morts le mars ). D’après la presse belge, l’inculpation d’Ayari ouvre la voie à celle de Salah Abdeslam dans le dossier du mars. Selon le parquet fédéral, Ayari est le neuvième inculpé dans ce dossier. Parmi ces neufs suspects, six sont en détention provisoire, dont Mohamed Abrini et Osama Krayem, arrêtés en avril à Bruxelles. Trois kamikazes s’étaient fait exploser le mars (deux à l’aéroport de Bruxelles-Zaventem et un troisième peu après dans une station de métro), faisant morts et des centaines de blessés. Comme celles de Paris, ces attaques avaient été revendiquées par l’EI. L’Union européenne n’est en guerre avec personne», a affirmé hier la cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini. Tout en ajoutant que l’Union a « clairement à défendre ses intérêts ». Se défendre sans déclencher une escalade potentiellement désastreuse pour l’économie mondiale, l’exercice s’annonce difficile face aux États-Unis, qui imposent depuis hier des taxes de 25 % sur leurs importations d’acier et de 10 % sur celles d’aluminium en provenance de l’Union européenne, ainsi que du Canada et du Mexique. Face à cette décision redoutée depuis deux mois, inédite dans l’histoire récente des relations entre les États-Unis et leurs proches alliés, les réactions du Canada et du Mexique ont été frontales. Ottawa a déjà annoncé des taxes sur 16,6 milliards de dollars canadiens (12,8 milliards de dollars américains) de produits américains. Et le Premier ministre canadien Justin Trudeau s’est emporté contre « un affront au partenariat de sécurité existant de longue date entre le Canada et les États-Unis ». Le Mexique a pour sa part promis des mesures équivalentes sur divers produits, dont certains aciers, des fruits et des fromages, qui « seront en vigueur tant que le gouvernement américain n’éliminera pas les taxes imposées ».
Une décision « illégale »
Côté européen, la riposte a été d’abord verbale. Cette décision américaine est « une erreur » et elle est « illégale », a signifié Emmanuel Macron à son homologue américain au cours d’un entretien téléphonique. La chancelière allemande Angela Merkel s’est pour sa part alarmée d’« une escalade qui nuira à tout le monde ». L’offensive américaine constitue un test pour le tandem franco-allemand. La France, au piètre bilan commercial international, a depuis le début adopté un ton plus dur que celui de Berlin, toujours attentif aux intérêts des nombreux champions exportateurs que compte l’Allemagne. « Les États-Unis ne nous laissent pas d’autre choix que de porter ce conflit devant l’OMC (Organisation mondiale du commerce) et d’imposer des droits de douane supplémentaires à des produits en provenance des ÉtatsUnis », avait dit jeudi le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. La Commission a déjà préparé, fin avril, une liste de produits emblématiques, dont le tabac, le bourbon, les jeans ou les motos, qu’elle pourrait lourdement taxer dès le 20 juin. Après toutefois un débat entre États membres, pour une dernière validation. Si l’impact économique des taxes américaines sur l’acier et l’aluminium devrait rester limité, le risque majeur est celui d’une escalade, avec ripostes et contre-ripostes, mettant à bas l’ordre commercial mondial. « Il est prématuré et exagéré de parler de guerre commerciale », selon Sébastien Jean, le directeur du CEPII, un centre d’expertise sur l’économie mondiale.
Craintes pour les voitures
« Gardons les proportions», vu le faible poids de ces deux métaux dans le commerce américano-européen, a estimé Pascal Lamy, ancien directeur général de l’Organisation mondiale du commerce. Mais il n’en a pas moins qualifié de « développement très inquiétant » la décision américaine, prise au nom de la « sécurité nationale », une justification selon lui « complètement grotesque ». L’institut de recherches Oxford Economics, rappelant que l’acier et l’aluminium ne représentent que 0,1 % des exportations européennes vers les ÉtatsUnis, estime que «le réel danger pour l’Union européenne vient de l’absence d’une réponse stratégique au programme L’Amérique d’abord de Donald Trump ». De l’avis de tous les experts, la guerre commerciale serait vraiment déclarée si les États-Unis mettaient à exécution leur menace de taxer les importations de voitures, touchant au « coeur du réacteur des échanges internationaux», estime Sébastien Jean. « Il faut craindre que ceci soit le début d’une évolution négative de mesures et contre-mesures, à la fin de laquelle il n’y a pas de gagnant », s’est inquiété le géant allemand Volkswagen dès hier. Reste à savoir également comment évolue l’autre grand front commercial ouvert par Donald Trump, avec la Chine. Le secrétaire américain au Commerce, Wilbur Ross, est attendu à Pékin aujourd’hui pour trois jours de discussions.