Référendum en Catalogne: climat explosif hier soir
Madrid a entrepris de faire fermer par la police les bureaux de vote prévus pour ce scrutin, qui doit avoir lieu aujourd’hui. Le président régional reste déterminé
Le gouvernement espagnol a affirmé hier avoir démantelé l’organisation du référendum d’autodétermination interdit en Catalogne, mais le président régional catalan Carles Puidgemont a assuré que ses sympathisants ne renonceraient « pas à leurs droits ». Les autorités catalanes restent en effet déterminées à organiser cette consultation aujourd’hui malgré son interdiction par la justice, donnant ainsi lieu à une des pires crises traversées par l’Espagne depuis le rétablissement de la démocratie après la mort du dictateur Francisco Franco en 1975. «Il est logique de penser qu’il se passera quelque chose [aujourdrhui], mais ce qui est sûr, c’est que ce ne sera pas un référendum », a assuré le préfet. Le gouvernement central a envoyé en renfort en Catalogne quelque 10000 policiers, qui ont néanmoins reçu l’ordre de ne pas recourir à la force.
Plus de bureaux occupés pacifiquement
L’exécutif régional avait annoncé vendredi que 2 315 bureaux de vote seraient ouverts pour les 5,3 millions d’électeurs de Catalogne. Mais le gouvernement conservateur espagnol de Mariano Rajoy, qui refuse de longue date de laisser cette riche région du nord-est de l’Espagne décider seule de son avenir, n’a pas hésité à recourir aux forces de
l’ordre pour empêcher la tenue du scrutin : « 1 300 bureaux de vote ont
déjà été mis sous scellés » par la police catalane, les Mossos d’Esquadra, a annoncé hier matin le représentant du gouvernement en Catalogne, Enric Millo. Il a par ailleurs précisé que 163 de ces bureaux étaient occupés pacifiquement par des militants qui pourront sortir, mais que personne ne pourra plus y entrer. Ces occupations, qui ont débuté vendredi soir, sont pour la plupart le fait de parents d’élèves qui ont investi avec
leurs enfants des écoles ou des centres culturels, en les justifiant par le «droit à organiser des activités»
extra-scolaires. Ils ont été avertis par la police qu’ils devraient en sortir avant 6 heures du matin aujourd’hui.
L’infrastructure technique mise hors service
Dans le même temps, la Garde civile est intervenue au centre de télécommunications du gouvernement régional, coupant les connexions avec les bureaux de vote, les systèmes informatiques de comptage des voix et un logiciel qui aurait permis « un vote en ligne sur une page web », a poursuivi M. Millo. Les forces de l’ordre ont déjà saisi des millions de bulletins de vote ces derniers jours. Le président d’une des organisations indépendantistes, l’Assemblée nationale catalane (ANC) Jordi Sanchez, a estimé dans un tweet qu’un million de votants ce « ne serait pas un échec» étant donné la « répression » de l’État. Mais de source gouvernementale catalane, on tablait samedi sur une forte participation, de plus de 55 %. La Catalogne comprend 7,5 millions de personnes, divisées à parts presque égales entre partisans et adversaires de l’indépendance. Plusieurs milliers de personnes ont d’ailleurs manifesté hier à Madrid et dans d’autres villes, notamment à Barcelone, en faveur de l’unité de l’Espagne. «Si l’Etat espagnol dit : “Mettonsnous d’accord sur un référendum”,
nous arrêtons ceci. C’est la voie (légale) que tous les Catalans souhaitent », a déclaré le président régional catalan Carles Puidgemont. « Je tente
de ne pas me laisser dominer par les émotions, même si nous en avons tous. Mais fondamentalement en ces moments, je sens que j’ai une grande responsabilité à assumer. C’est un moment grave. »