NI LA TÊTE, NI LES JAMBES
ÉTONNAMMENT EMPRUNTÉS PHYSIQUEMENT, LES BLEUS ONT ÉGALEMENT BIEN TROP MANQUÉ DE JUSTESSE TECHNIQUE POUR REMPORTER UN MATCH POURTANT DE FAIBLE NIVEAU. OU LORSQUE TOUT SEMBLE LIÉ…
C’est l’histoire d’un match dont l’appellation de « haut niveau » n’a finalement duré que trois minutes. Les trois premières, séquence énorme d’intensité, qui vit une fois de plus les Bleus perdre le ballon en position de marque, par l’intermédiaire de Yoann Huget. Pour le reste ? Ce fut essentiellement un festival d’imprécisions, maladresses et passes jetées à la figure lorsqu’elles ne l’étaient pas en touche, par ailleurs partagé par les deux camps. Les Springboks l’emportant au final grâce à un déchet moindre que celui de leurs adversaires, dont même la nature des essais laissèrent leurs supporters sur leur faim… On en veut pour preuve celui de Belleau, fruit d’une chandelle à plusieurs rebonds bottée par ce dernier faute d’idées, ou celui de Serin, accouché au forceps après plusieurs fautes de goût successives.
LA PRÉPARATION PHYSIQUE EN QUESTION
Mais pourquoi cette chienlit, bon sang ? La première et plus évidente cause relève, à nos yeux, de l’état physique des deux formations. D’un côté, parce que ce qui était valable pour les Bleus en juin l’est également pour les Springboks en novembre. Et de l’autre, parce qu’il faut bien s’interroger sur les réels effets de la préparation physique consentie par les Bleus cet été, dont une énorme partie a connu des problèmes physiques (Atonio, Ben Arous, Boughanmi, Camara, Chouly, Dulin, Fickou, Lamerat, Le Roux, Lopez, Vakatawa, entre autres…), et qui a vu certains autres se transformer en zombies, à l’image d’un Picamoles certes volontaire hier, mais à des années-lumière du joueur surpuissant qu’il était voilà peu encore… Anecdotique, vous dites, quant au niveau technique de la partie ? Certainement pas. Parce que le bon geste à haute intensité vient certes avec la répétition et la technique, mais aussi avec le relâchement et la fraîcheur… Et c’est là, justement, que le physique rejoint le mental. Parce que, privés de jambes, les Bleus ont aussi perdu leur tête. On veut parler, bien sûr, de ces erreurs stupides, comme le coup de pied direct en touche de Ducuing après un ballon rentré dans les 22 mètres par Huget, cette faute tellement évitable de Serin sur Marx (qui rappela en bien des endroits celle de Dulin sur Skosan au mois de juin) ou cette dernière possession bottée en touche (lire ci-contre). Mais surtout du manque de confiance patent de cette équipe, qui en présente tous les symptômes…
LA PEUR AU VENTRE
On n’explique pas autrement en effet que, d’une équipe somme toute correcte en « zone neutre » (entre les lignes des 22 mètres), les Bleus perdent leurs moyens dès lors qu’ils entrent en « zone critique », en attaque comme en défense. Ce qui se traduit, pêlemêle, par des gestes techniques manqués ou forcés, à l’image de cette chistera hasardeuse de Ducuing, de cette passe en touche d’Huget, de ces surnombres vendangés faute d’être joués simplement, cette touche relâchée sans opposition par Jedrasiak, ces montées défensives trop peu agressives pour défendre la ligne d’enbut déjà constatées face aux Blacks. Et on en passe… Tous les « mentalistes » vous le diront : ce n’est qu’à partir du moment où un joueur commence à craindre de commettre une erreur qu’il se place en situation d’échec. Or, cette équipe évolue la trouille au ventre, c’est évident. Le contraste est ainsi saisissant entre un XV de France incapable de tenir une séquence dynamique pendant plusieurs temps de jeu malgré un temps de préparation inédit, et des sélections de fortune comme les Baa-Baas ou la réserve de Lyon, capables d’enchaîner passes et temps de jeu malgré des semaines d’entraînement rocambolesque… Preuve que ce n’est pas la qualité des joueurs qui est en cause, mais plus sûrement le contexte dans lequel ils évoluent. Responsabilité du staff, diront ses opposants ? Celui-ci avait pourtant joué la carte de la confiance, en reconduisant son XV de départ malgré une prestation jugée indigne contre les All Blacks. Si bien qu’on ne sait plus vraiment, avouons-le, à quel saint se vouer avant ce test à haut risque contre les Japonais…