Mettre en place un syndic bénévole
VOTRE PETITE COPROPRIÉTÉ VOUDRAIT SE PASSER DES SERVICES DU SYNDIC PROFESSIONNEL, TROP CHER OU INCOMPÉTENT. NOS CONSEILS POUR PASSER À L’ACTION.
S’ASSURER DU SOUTIEN DES COPROPRIÉTAIRES
« Plus ils seront nombreux à être convaincus de l’intérêt de cette solution, plus le travail au quotidien sera facilité. Car le plus épuisant, à la longue, c’est de gérer les conflits humains dans l’immeuble. Trop de récalcitrants au départ compliqueraient les choses », précise Virginie Guihard, responsable du pôle syndics bénévoles de l’association des responsables de copropriétés (Arc). Assurez-vous d’abord que le conseil syndical est prêt à vous épauler. Organisez une réunion, sans le syndic, avec le plus grand nombre possible de copropriétaires. « Faites-le un ou deux mois avant la fin de l’exercice comptable, car le syndic, s’il se sent menacé, risque de convoquer très vite l’assemblée générale une fois l’exercice clos, pour ne pas vous laisser le temps de vous organiser », conseille Isabelle Feldman, responsable du service Copropriété de l’union nationale des propriétaires immobiliers des Bouches-du-rhône (Unpi 13). Pour rassurer les inquiets, présentez la façon dont vous envisagez de travailler – avec quel type de logiciel comptable, avec le soutien technique d’une association – et communiquez sur l’assurance pour votre responsabilité civile qui peut être engagée même si vous êtes bénévole, sur les frais à prévoir… Rassemblez les numéros de téléphone et les adresses électroniques des copropriétaires. Enfin, testez la majorité dont vous disposez avant l’assemblée générale (AG) : le jour de L’AG, votre projet devra réunir la majorité absolue de tous les copropriétaires (soit 501 millièmes). Si elle n’est pas atteinte, mais que la proposition recueille au moins un tiers des tantièmes (334 millièmes), il sera possible de voter à nouveau à la majorité simple*, lors de la même assemblée, soit à la majorité des présents et représentés.
PRÉPARER L’ÉLECTION À L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
Par lettre recommandée avec AR (elle doit arriver 21 jours au minimum avant L’AG),
demandez au syndic de mettre à l’ordre du jour de la prochaine AG la résolution que vous aurez pris soin de rédiger. « Elle donne le choix entre la réélection de l’ancien syndic ou la désignation d’un syndic bénévole, accompagnée d’une autorisation de l’assemblée à souscrire une assurance pour couvrir sa responsabilité
civile », détaille Isabelle Feldman. Le contrat type prévu par la loi doit être joint, comme pour un syndic professionnel.
Attention, lorsqu’il est évincé à l’occasion du vote, l’ancien syndic quitte en général aussitôt l’assemblée sans terminer la réunion ou, si celle-ci se tient dans ses locaux, exige le départ des copropriétaires, qui devront donc la continuer ailleurs. Étudiez comment la poursuivre en respectant le formalisme de rigueur pour qu’elle soit inattaquable. « Par exemple, préparez une feuille de présence, avec les noms des copropriétaires, leurs millièmes, etc., ce qui vous aidera à rédiger le procès-verbal correctement », indique la spécialiste de l’unpi. N’oubliez pas que si vous
Virginie GUIHARD Responsable du pôle syndics bénévoles de l’association des responsables de copropriété (Arc) Isabelle FELDMAN Responsable du service copropriété de l’union nationale des propriétaires immobiliers des Bouchesdu-rhône (Unpi 13)
êtes le nouveau syndic, vous ne devez surtout pas présider l’assemblée, ni recevoir le pouvoir d’un copropriétaire absent. L’idéal est que vous soyez désigné secrétaire de séance dès le début de la réunion. Anticipez les problèmes que vous risquez de rencontrer et prévoyez les ripostes. Certains syndics, par exemple, ne mettent pas la résolution demandée à l’ordre du jour, même si la loi les y oblige. « Mais le bénévole peut quand même postuler lors de L’AG. Le seul risque sera de voir son élection contestée devant le tribunal par un copropriétaire absent non représenté ou opposant. D’où l’importance d’une cohésion sur le choix de la gestion bénévole », indique Virginie Guihard. D’autres professionnels expliquent lors de L’AG qu’ils mettront la copropriété sous administration judiciaire si leur mandat n’est pas renouvelé : cette mesure est illégale dès lors qu’un syndic bénévole a bien été désigné.
ANTICIPER LA PASSATION DE POUVOIR AVEC L’ANCIEN SYNDIC
« Dès votre nomination, ouvrez un compte séparé au nom du syndicat des copropriétaires. S’il y en avait déjà un, informez la banque du changement de syndic ou clôturez ce compte », conseille Virginie Guihard. Vous pouvez également mettre en concurrence les banques avant L’AG pour avoir le temps de comparer leurs tarifs. « En votre qualité de syndic, le syndicat des copropriétaires (dont vous êtes le mandataire) sera domicilié chez vous », précise la spécialiste de l’arc.
En principe, le précédent syndic dispose d’un mois pour mettre à votre disposition les archives (l’ensemble des documents),
L’outil Arc Copro-net m’aide pour la gestion et la comptabilité Eddine BROCARD-SAÏDI Retraité et syndic bénévole à Paris
les fonds immédiatement disponibles de la copropriété et présenter une première évaluation de sa situation financière ; et de deux mois supplémentaires pour transmettre le versement du solde des fonds après apurement des comptes de chaque propriétaire, ainsi que l’état des comptes définitif du syndicat. Mais, en pratique, les bénévoles doivent souvent batailler pour récupérer les fonds et les archives… D’où l’intérêt d’avoir réuni le maximum d’informations avant L’AG : adresses des fournisseurs (pour leur réclamer l’envoi des factures au nouveau syndic), des copropriétaires (pour expédier les appels de charges…). Si l’ancien syndic tarde trop à communiquer les archives, vous devrez l’assigner en référé auprès du tribunal de grande instance.
TROUVER DE L’AIDE POUR ÊTRE ACCOMPAGNÉ
Préparer et convoquer les AG, tenir la comptabilité de la copropriété, remettre en concurrence les contrats, relancer les impayés éventuels et exiger leur paiement au tribunal, régler les fournisseurs… Seul, la tâche est ardue, au moins au début. Il est donc utile de s’appuyer sur une association ou une entreprise capable de vous aider sur les plans juridique et pratique, de vous offrir les services d’un avocat spécialisé en cas de difficulté, de résoudre un problème comptable… Le coût est souvent modique, par exemple 160 euros par an, plus 4 euros par lot, à l’unpi 13, ou
139 euros par an pour une copropriété de moins de 10 lots à l’arc (assurance responsabilité civile du syndic incluse). Pour quelques centaines d’euros, des formations sont parfois proposées pour faciliter la mise en route.
Vous devrez aussi trouver le bon outil pour tenir la comptabilité et fournir les annexes comptables requises, notamment la situation de trésorerie. Dans les très petites copropriétés, certains se servent d’un outil tel Excel. Il existe aussi des logiciels plus spécialisés, comme Coprolib (abonnement de 180 € à 990 € par an selon le nombre de lots dans la copropriété). *Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, article 24. Nous n’avons pas été satisfaits des divers syndics de notre petite copropriété (16 lots). Nous avions l’impression d’être volés. L’idée a donc germé d’opter pour un syndic bénévole. Mais tout est allé très vite, car le syndic professionnel nous a envoyé son nouveau contrat trois semaines seulement avant l’assemblée générale (AG), en même temps que la convocation. Il augmentait fortement ses tarifs. Nous avons cherché à discuter mais il nous a opposé une fin de nonrecevoir. La veille de L’AG, nous avons donc contacté l’arc. Nous avions rendez-vous avec une spécialiste à 11 heures, et à 14 heures, nous avons démarré L’AG. Le syndic a tenté de nous menacer, nous risquions de nous retrouver sous administration judiciaire, disait-il. Mais l’arc nous avait bien préparés. Nous avons voté la résolution. Tous les copropriétaires présents avaient le même avis sur le syndic, et à l’unanimité des présents, j’ai été élu syndic bénévole. Nous avons nommé le conseil syndical en poursuivant l’assemblée au café d’à côté. Nous n’avons pas encore récupéré toutes les archives, mais nous nous en passons, car il y a de la bonne volonté entre les copropriétaires, à l’exception des mauvais payeurs. Je travaille main dans la main avec le conseil syndical, et l’outil Arc Copro-net m’aide pour la gestion et la comptabilité. Cette année, je vais devoir éditer le grand livre des comptes, pour qu’ils soient vérifiés. Je ne sais pas encore le faire. Mais j’apprends.