Qui fait le tour du monde
LA FRANCE AUSSI EST DANS LE COUP... QUI GAGNERA ?
L'expansion rapide de l'industrie minière en République démocratique du Congo, qui devrait encore s'accélérer avec le développement des énergies renouvelables, implique des entreprises de diverses nationalités. Cependant, notre recherche ne révèle pas de différences significatives dans les pratiques de ces entreprises en fonction de leur pays d'origine. Le problème des expulsions forcées est plus général et intrinsèquement lié à la perception de l'industrie minière comme un moteur de l'économie nationale. Souvent, les communautés locales sont traitées de manière dédaigneuse, aussi bien par l'État que par les industriels. Les autorités concèdent les droits miniers sans une planification adéquate, négligeant de fournir une compensation appropriée aux habitants affectés. Lorsque ces derniers expriment leur mécontentement, ils sont parfois accusés de vouloir tirer profit de la situation pour améliorer leur niveau de vie, alors qu'ils sont en réalité les victimes de ces projets industriels majeurs. Leur attachement à leurs terres, souvent ancestrales, est complètement ignoré.
Certaines de ces entreprises, de leur côté, se limitent à reloger les personnes dans des conditions équivalentes, sans toujours leur fournir des besoins de base tels que l'accès à l'eau potable, en dépit des exigences du droit congolais qui prescrit des logements décents pour ces personnes. Face à cette situation alarmante et croissante, nous demandons au gouvernement congolais d'imposer un moratoire immédiat sur les expulsions et de former une commission d'enquête pour examiner ces dysfonctionnements récurrents. Notre objectif n'est pas de créer de nouvelles normes, mais plutôt de déterminer les failles dans l'application de la législation existante. Les populations locales doivent être en mesure de défendre leurs droits. Il est inacceptable de continuer à les considérer comme des obstacles au progrès économique. L'État et les entreprises doivent revoir leur approche et agir en conséquence.
Batteries électriques : qui remportera la bataille ?
La dynamique du marché des véhicules électriques, incluant voitures, vélos, scooters et trottinettes, connaît actuellement une croissance exponentielle, comme l'illustre l'infographie en bas de page. Cette expansion n'est pas le fruit du hasard, mais le résultat d'innovations majeures dans le domaine des batteries, qui ont radicalement changé la donne par rapport aux batteries traditionnelles au plomb et à l'acide sulfurique, toxiques et non recyclables, utilisées dans les voitures classiques. À l'heure actuelle, les voitures électriques sont équipées de batteries au lithium, similaires à celles des téléphones portables, offrant une plus grande puissance, une autonomie accrue et un poids réduit.
Le marché des batteries pour véhicules électriques représente un secteur économique colossal, estimé à des centaines de milliards d'euros, avec des prévisions de croissance impressionnantes. Alors que deux millions de batteries ont été vendues en 2016, les experts anticipent une vente de six millions d'unités dans les trois prochaines années.
Ce marché est le théâtre d'une intense guerre économique. La France, malheureusement, semble avoir perdu sa part dans cette bataille, ayant manqué de foi dans son potentiel. Ironiquement, c'est un Français, Michel Armand, qui a conçu en 1980 la batterie au lithium désormais omniprésente dans la plupart des voitures électriques.
Au début des années 2000, l'industrie automobile était sceptique quant à l'avenir des véhicules électriques, comme le souligne Michel Armand : “Les fabricants prédisaient que les moteurs à essence domineraient toujours en 2050. Faute d'un projet industriel solide et à grande échelle autour de la batterie électrique, la France a cédé son brevet à d'autres pays, qui ont su capitaliser sur cette technologie”.
Actuellement, le marché se divise en trois grands segments !
La Chine a pris une longueur d'avance dans le domaine des batteries électriques, s'appuyant sur son expertise déjà établie dans les panneaux solaires et le développement de vastes installations de production. Rajesh Varma, conseiller en investissements, offre un aperçu de cette domination :
D'ici 2020, la Chine contrôlera 90% de la production mondiale de batteries. Cette position dominante confère à la Chine une influence considérable sur les constructeurs automobiles, qui sont contraints de s'approvisionner auprès d'elle et de se conformer à ses conditions. Cette situation a poussé des entreprises comme le constructeur français Renault à former des alliances commerciales, notamment en s'associant avec le géant chinois Dongfeng durant l'été 2017.
TESLA toujours là !
Dans le secteur des véhicules électriques, un autre acteur majeur est l'entreprise américaine TESLA, dirigée par Elon Musk, souvent comparé au "Steve Jobs de la voiture électrique". TESLA a lancé trois modèles de voitures équipés de batteries au lithium et au cobalt, ce qui lui a permis de s'établir progressivement comme un acteur clé sur le marché mondial, bien que sa capacité de production reste relativement limitée.
L’entreprise fait face à des délais de production allongés, avec des livraisons qui peuvent s'étendre jusqu'à 18 mois, principalement parce que TESLA ne dispose que d'une seule usine de fabrication. Comme le souligne Rajesh Varma, la fabrication de véhicules nécessite des usines d'assemblage et de production de batteries dans le monde entier, et pas seulement aux États- Unis. Cela s'explique en partie par les risques liés au transport des batteries au lithium, qui sont trop dangereuses pour être acheminées par avion et dont le transport par bateau est extrêmement long.
Malgré une perte d'un milliard de dollars annoncée cette année, les investisseurs restent optimistes quant à l'avenir de TESLA. "Dans deux à trois ans, Tesla devrait réaliser une marge de 7%, grâce à l'automatisation de l'assemblage des voitures", explique Olivier Ken, analyste chez Ecofi.
Dans l'univers concurrentiel des batteries électriques, un Français, Vincent Bolloré, a également pris part à la course. Fondateur du réseau d’auto-partage Autolib, il possède une usine de batteries à Quimper, en Bretagne. Cependant, Bolloré doit se procurer du lithium, nécessaire à la fabrication de ses batteries, auprès de fournisseurs en Amérique du Sud et en Chine, car il ne dispose pas de ses propres sources d'approvisionnement.
En comparaison avec les géants chinois et Tesla, le groupe Bolloré demeure un acteur modeste sur la scène mondiale. Sa capacité de production de batteries est limitée à 1 gigawatt-heure (GWh), alors que la Chine produit 100 GWh et Tesla 35 GWh. Ainsi, Bolloré représente un petit joueur dans ce domaine.
De plus, le modèle économique d'Autolib s'avère non rentable, avec des pertes estimées à 100 millions d'euros en 2017, soulevant des interrogations sur la viabilité à long terme de ce système.
Chez Bolloré, cependant, on reste optimiste quant à l'avenir et à l'expansion mondiale du groupe. Didier Marginedes, directeur de Blue Solution chez Bolloré, exprime cette confiance : “Nous ne nous interdisons pas, à l'avenir, de posséder des usines plus importantes. Il convient de noter qu'aucun projet de construction d'usine en Chine n'est actuellement envisagé”.
Pour renforcer sa crédibilité, Bolloré envisage également de commercialiser une partie de ses batteries en Afrique, où il bénéficie d'une forte présence et d'un réseau solide.
La concurrence acharnée dans ce secteur entraîne également des problèmes de compatibilité entre les différents systèmes. Cordon, tension électrique, type de prise, courant continu ou alternatif : chaque constructeur propose sa propre solution. Malgré les efforts de l’AFNor (Association Française de normalisation) pour harmoniser ces aspects, il n’existe toujours pas de standard universel.
La France souffre également d'un déficit de bornes de recharge. Alors que Ségolène Royal ambitionnait un million de bornes d'ici 2020, on en dénombre seulement 6 000 en 2017, pour 33 000 voitures électriques en circulation. Même si certaines bornes du réseau Autolib sont accessibles moyennant un coût, trouver un point de recharge reste un défi, surtout lorsque la recharge à domicile prend environ 8 heures. Par ailleurs, l'empreinte écologique des voitures électriques fait débat. La production d'une batterie nécessite l'utilisation de matériaux dont le processus ( plasturgie, extraction de lithium…) émet du CO2. Michel Armand souligne : “Une voiture électrique au cobalt doit parcourir au moins 40 000 km pour compenser le CO2 émis lors de sa production”.
Pour atténuer ce problème, un système de recyclage des composants est en cours de développement. Philippe Dupuy, de l’AFNor, nous informe : “Cette filière de recyclage permet de récupérer jusqu'à 99% de la matière. On peut envisager l'utilisation de lithium recyclé pour la fabrication de nouvelles batteries. Ce recyclage est d'autant plus crucial que le lithium est une ressource rare”.
L'innovation dans le domaine des batteries électriques ne s'arrête pas à leur utilisation dans les véhicules. Au bout de 3 à 4 ans, une batterie de voiture perd environ 30% de sa capacité, mais elle peut encore être utile. Tesla, par exemple, propose de les réutiliser pour stocker l'énergie solaire, permettant ainsi aux habitations de gagner en autonomie électrique. Parallèlement, d'autres technologies émergent pour réduire la pollution, comme le moteur à hydrogène. Ce système génère de l'électricité et de l'eau à partir de la réaction entre l’oxygène et l’hydrogène. L’hydrogène, plus facile à transporter, pourrait permettre de stocker et de distribuer de l'électricité à l'échelle mondiale. Pascal Mauberger, PDG de McPhy, explique :
“Notre objectif est d'exploiter cette source d'énergie abondante et économique au plus près des consommateurs”.
Cependant, ce domaine est encore en développement. Durant l'été, Nicolas Hulot a rencontré les acteurs français de l'hydrogène, dont Pascal Mauberger, président de l'AFHYPAC, pour discuter d'un plan de soutien en vue de créer une filière française, avec l'ambition de produire 800 000 voitures à hydrogène d'ici 2030.