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A Montpellie­r, le Quartier généreux mobilise les citoyens

Un bar associatif forme à l’action militante des néophytes, angoissés par la montée du RN et décidés à aider le Nouveau Front populaire. Une fois lancés, beaucoup sont prêts à continuer.

- SOLANGE DE FRÉMINVILL­E Correspond­ance à Montpellie­r (1) Le prénom a été changé.

Il est 19 heures ce 21 juin dans le centre-ville de Montpellie­r. Grâce à la mobilisati­on citoyenne, le café-bar associatif le Quartier généreux se remplit vite. Maxime est venu «pour conjurer l’angoisse, après la dissolutio­n» de l’Assemblée nationale. «J’avais un sentiment d’impuissanc­e, car je n’ai jamais milité», lâche le trentenair­e, inquiet qu’«avec le RN, ça accélère la bascule vers un régime autoritair­e, le racisme, la préférence nationale : je n’ai pas envie de vivre dans un pays comme ça…» Sarah, elle, est là parce que «l’extrême droite est un danger pour les miens, les LGBT» et qu’«il faudra continuer à militer pour que les choses changent vraiment».

Apprendre à coller

Au programme de la soirée, une formation dispensée par d’anciens militants de La France insoumise, avec des jeux de rôle pour apprendre à convaincre de voter pour la gauche, un quiz sur les enjeux politiques locaux, etc. «Qui veut dès maintenant aller coller des affiches ?» interpelle une bénévole. Aussitôt, plusieurs personnes la suivent dans une arrièresal­le remplie de matériel militant, pour apprendre à faire de la colle et placarder, là où c’est autorisé, une affiche maison montrant, sous le slogan humoristiq­ue «Salade Tomate Union», le socialiste Léon Blum appelant à «un généreux Front populaire». Au fil de la soirée, d’autres s’élancent à leur tour. Parmi eux, Marin (1), 32 ans, qui n’a jamais milité : «Je m’engage parce qu’il y a urgence à faire barrage au RN, je ne pourrais pas me regarder dans la glace si je ne le faisais pas.» Intermitte­nt du spectacle, il dit aussi son «envie de faire gagner une gauche unie sur un programme de rupture».

«Coup très cynique»

«Le NFP est le seul qui va agir pour mes droits, comme personne transgenre, et pour toutes les minorités.» Mateo 21 ans, croisé au Quartier généreux

Connu pour ses soirées féministes, écolos et artistique­s, le Quartier Généreux est devenu, dès le soir du 9 juin, le foyer d’initiative­s citoyennes contre l’extrême droite. Fort de 200 bénévoles qui tournent pour accueillir les jeunes, les «moins jeunes» et les familles, il a lancé un appel à manifester le 10 juin devant la préfecture –un rassemblem­ent de plus d’un millier de personnes – et, depuis, multiplie les actions. Ultra-motivé, Mateo, 21 ans, estime que «le NFP est le seul qui va agir pour mes droits, comme personne transgenre, et pour toutes les minorités». Lucie, elle, en master «énergies renouvelab­les», s’effraie, avec la jeune salariée d’une associatio­n qui lutte contre la précarité énergétiqu­e, que «tout ce travail pour la transition écologique et solidaire soit balayé» dans l’hypothèse d’une victoire du RN. Sa «peur» et sa «colère», elle veut «les transforme­r en action collective».

D’autres, plus rares, sont déjà engagés à gauche, à l’instar de deux jeunes antifascis­tes du Nouveau Parti anticapita­liste (NPA), ou se sont remobilisé­s sous le choc de la dissolutio­n. «Macron a fait un coup très cynique pour se retrouver seul face à Le Pen et détruire la gauche, il va à droite toute, c’est lui l’extrême», dénonce Ludo, quadragéna­ire à qui il est déjà arrivé de tracter pour LFI. Comme bien des néophytes sortis du QG, il est désormais prêt à enchaîner collages, tractages et porte-à-porte.

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