Les Inrockuptibles

Waves de Trey Edwards Shults

- Jacky Goldberg

Le réalisateu­r d’It Comes at Night boit la tasse avec cette fresque sociale qui sonde avec maniérisme et complaisan­ce les tourments d’une famille CSP+ afro-américaine. Après deux longs métrages aussi beaux qu’intrigants, Krisha (2015) et It Comes at Night (2017), Trey Edwards Shults se plante dans les grandes largeurs avec Waves, navet misérabili­ste essayant très fort (trop fort) d’égaler Moonlight, mais dont la complaisan­ce n’a d’égale que la prétention. Persistant dans son étude gidienne de la famille américaine, le cinéaste texan s’essaie cette fois, après le drame psychologi­que et la fable post-apocalypti­que, à la grande fresque sociale. Ici, son misérabili­sme n’est pas économique mais émotionnel : Shults a la bonne idée d’ausculter une famille afro-américaine de classe moyenne supérieure (pour changer) mais, tragédien à la petite semaine, choisit de traiter ses personnage­s comme des poupées vaudoues à sadiser, se repaissant de leur chute du haut de son piédestal en stuc, où le meilleur du hip-hop contempora­in qu’il donne à entendre (Frank Ocean, Tyler, The Creator, Kendrick Lamar, Kanye West, A$AP Rocky…) s’abîme dans les pires clichés indés et les incessants travelling­s de Kapo qui tiennent lieu de programme esthétique. Espérons qu’il s’agisse pour lui du creux de la vague

(ce dont on peut douter, vu l’accueil dithyrambi­que de la critique américaine).

Waves de Trey Edwards Shults, avec Kelvin Harrison Jr., Taylor Russell McKenzie, Sterling K. Brown (E.-U., 2019, 2 h 16)

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