Bras de fer

Le gouvernement impose son agenda. Il veut aller vite. Et même très vite pour transformer la SNCF. Face à cette réforme TGV, les syndicats (Sud Rail, CGT, Unsa, CFDT) ont décidé de répliquer à leur manière avec un conflit qui prend l’allure d’un tortillard. (...) Personne n’a intérêt à ce que le dialogue social échoue. Guillaume Pepy, le patron de la SNCF, en est le premier persuadé. L’enjeu va bien au-delà des salariés du rail. Car un échec pourrait aussi avoir des répercussions sur la scène politique. Nourrir les extrêmes et l’euroscepticisme pour une réforme votée par la France mais voulue par l’Europe, certains n’attendent que ça.

La bataille de l’opinion sera donc décisive. Les syndicats et l’opposition de gauche l’ont perdu à l’automne. Elle prendra toute sa dimension avec le vote des ordonnances, début avril à l’assemblée. Dans l’immédiat, il s’agit de faire pencher le rapport de forces d’un côté ou de l’autre. Les cheminots agitent l’épouvantail de la privatisation pour mobiliser les foules quand le gouvernement met en avant l’efficacité économique et le service à l’usager.

La réforme du statut des cheminots ne concernant que les futurs embauchés, pas sûr que les grévistes persistent très longtemps. Ajoutons que les jours de grève, à la différence de 95, ne seront pas payés.

L’opinion est favorable à la réforme de la SNCF. Mais il faut à tout prix éviter que la lassitude et d’autres revendications ne la fassent basculer. Car, pour Emmanuel Macron, la guerre du rail est la mère des batailles. Le défi est à la hauteur du danger. Un peu comme lorsque l’on fait tapis au poker… Avec les cheminots, il a face à lui un corps aussi déterminé que constitué. S’il remporte ce bras de fer, la voie sera alors libre partout ailleurs. Et le train de la réforme pourra plus que jamais poursuivre sa course aussi folle que raisonnable car bien d’autres batailles sont à venir si on en croit ce que le calendrier affiche.