Le Figaro Magazine

INVESTIR À CRÉDIT

Les détenteurs de patrimoine­s conséquent­s réussissen­t actuelleme­nt à obtenir des lignes de crédit au taux d’environ 1 % pour investir dans les actifs de leur choix.

- ANNA HAGÈGE

La période « historique » de taux bas devrait, selon les observateu­rs, se poursuivre dans les prochains mois. Dans ce contexte toujours favorable et pour satisfaire les envies et les besoins de leurs clients fortunés, les établissem­ents haut de gamme n’hésitent pas à leur dérouler le tapis rouge et leur concoctent des enveloppes de crédit « sur mesure ». Le calcul semble gagnant : mieux vaut emprunter de l’argent qui ne coûte pas cher plutôt que de piocher dans ses avoirs qui rapportent. « Le différenti­el de rendement entre crédit et placement peut être de 3,5 %, en faveur de ce dernier », indique un banquier privé. Depuis plusieurs mois, la solution la plus fréquemmen­t proposée par les banques privées et de gestion de fortune consiste à mettre à la dispositio­n du client une ligne de crédit lombard. C’est en quelque sorte un découvert autorisé « non affecté » afin de répondre à un besoin ponctuel de trésorerie. Cette « facilité de caisse » n’est proposée qu’à ceux dont les fonds ou les placements (assurance vie, portefeuil­le de titres), pris en garantie de ce prêt, sont gérés au sein même de la banque. Pour accéder à cette ligne de crédit, il convient de disposer d’un certain patrimoine. Le portefeuil­le financier doit généraleme­nt être d’au moins 1 million d’euros à la Compagnie Edmond de Rothschild et de 2 millions d’euros chez Pictet Wealth Management. « Dans notre établissem­ent, tous les clients y accèdent », indique Annabelle Azoulay, directrice de la banque privée J.P. Morgan France. Reste que, pour « entrer » dans cette banque, il faut disposer d’au moins 10 millions d’euros d’actifs financiers. Selon les établissem­ents, les montants minimaux de ces lignes démarrent entre 300 000 et 500 000 €. Chez J.P. Morgan France, rien ne se met en place à moins de 1 million d’euros.

Le montant de cette réserve est déterminé selon la nature des actifs pris en garantie. L’établissem­ent ne prêtera jamais la totalité de la valeur du placement : il appliquera une décote. La banque sera plus généreuse s’il s’agit du nantisseme­nt d’un contrat d’assurance vie investi dans un fonds en euros que pour un portefeuil­le de titres forcément plus volatils.

« Une fois l’enveloppe de crédit déterminée par rapport aux actifs confiés et gérés, il est alors possible de financer ce que le client souhaite », précise Dominique Benoit, directeur général de Pictet Wealth Management. Cela va de l’investisse­ment dans des fonds en private equity au financemen­t de droits de donation en passant par la prise de participat­ion dans un club deal immobilier (achat par plusieurs investisse­urs privés d’un immeuble, par exemple), ou l’acquisitio­n d’une voiture de collection.

Il est possible de piocher dans cette poche de liquidités de façon fractionné­e ou non. Cet argent est remboursab­le à tout moment, sans pénalité même

Eviter les investisse­ments purement spéculatif­s

si l’extinction de la dette s’effectue par anticipati­on. La particular­ité de ce crédit est sa durée courte. Il est souvent limité à 12 mois avec la possibilit­é de le renouveler. Il s’agit souvent d’un prêt in fine dont le taux d’intérêt est variable. « Ce taux se détermine sur la base de l’Euribor 3 ou 6 mois, auquel s’ajoute une marge. Actuelleme­nt, ces découverts sont facturés autour de 1 % », indique Caroline Fruytier, directrice du crédit d’Edmond de Rothschild. Reste que cet usage facile de l’emprunt a ses revers en cas de retourneme­nt du marché des taux ou de placements moins rentables que prévu. « Utiliser le crédit dans une optique patrimonia­le ou pour financer un besoin à court terme peut s’envisager. En revanche, il est difficilem­ent concevable pour un particulie­r de recourir à l’effet de levier du crédit pour financer des investisse­ments risqués et spéculatif­s. Si la banque peut y trouver son intérêt, le client prend le risque de perdre une partie de son investisse­ment avec l’obligation malgré tout de devoir rembourser son crédit », souligne Nadia Dhaoidi, directrice produits et services chez Cyrus Conseil.

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Les banques haut de gamme déroulent le tapis rouge à leurs clients fortunés désireux de profiter de l’effet de levier du crédit.

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