Défense : le dernier tango entre Paris et Berlin
Le nouveau traité franco-allemand, signé le 22 janvier, renforce la coopération dans le domaine de la défense et de la sécurité. L'admission de l'Allemagne en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies est une priorité de la diplom
Le 22 janvier, le président français, Emmanuel Macron, et la chancelière allemande, Angela Merkel, ont signé à Aix-la-Chapelle un nouveau traité de coopération et d’intégration francoallemand. Le traité s’appuiera logiquement sur le socle fondateur qu’est le Traité de l’Élysée de 1963, qui a contribué à la réconciliation historique entre la France et l’Allemagne, « pour viser un nouvel objectif de convergence accrue entre la France et l’Allemagne et préparer les deux pays aux défis auxquels ils sont confrontés au xxie siècle » , explique l’Elysée sur son site. Ce traité vise à renforcer les liens entre l’Allemagne et la France, notamment dans les domaines de la politique économique, de la politique étrangère et de sécurité, de l’éducation et de la culture, de la recherche et de la technologie, du climat et de l’environnement.
POUR L’ALLEMAGNE, L’OTAN RESTE LE PILIER
En matière de politique étrangère et de défense, les deux États souhaitent aller un cran plus loin dans leur coopération: « Les deux États approfondissent leur coopération en matière de politique étrangère, de défense, de sécurité extérieure et intérieure et de développement tout en s’efforçant de renforcer la capacité d’action autonome de l’Europe » (article 3 du nouveau traité). Dans ce cadre, la France et l’Allemagne vont se consulter afin de définir des positions communes sur toute décision importante touchant leurs intérêts communs et d’agir conjointement dans tous les cas où ce sera possible. Dans le domaine de la défense et de la sécurité, les deux États veulent faire « converger de plus en plus leurs objectifs et politiques de sécurité et de défense » . Dans ce contexte, « ils se prêtent aide et assistance par tous les moyens dont ils disposent, y compris la force armée, en cas d’agression armée contre leurs territoires » . Les deux États s’engagent également à renforcer encore la coopération entre leurs forces armées, en vue d’instaurer une culture commune et d’opérer des déploiements conjoints. Ce qui ne sera pas simple, puisque le parlement allemand est souverain en la matière. Dans le domaine de la sécurité intérieure, les gouvernements des deux États renforcent encore leur coopération bilatérale en matière de lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée, ainsi que leur coopération dans le domaine judiciaire et en matière de renseignement et de police. Berlin et Paris continuent de développer « l’efficacité, la cohérence et la crédibilité de l’Europe dans le domaine militaire ». Les deux pays s’engagent notamment à renforcer la capacité d’action de l’Europe et à investir conjointement pour combler ses lacunes capacitaires, renforçant ainsi l’Union européenne et l’alliance nord atlantique. Pour l’Allemagne, l’Otan reste le pilier de la défense européenne. La ministre de la Défense allemande, Ursula von der Leyen, avait rappelé en septembre à Paris qu’une « analyse objective de la situation stratégique conduit également à la conclusion que l’Otan reste indispensable pour la défense collective et la sécurité de l’Europe ». Pour remédier aux lacunes capacitaires, l’Allemagne et la France vont intensifier les programmes de défense en commun et leur élargissement à des partenaires. Les deux États préconisent une « coopération la plus étroite possible entre leurs industries de défense, sur la base de leur confiance mutuelle ». En outre, ils vont élaborer une approche commune en matière d’exportation d’armements pour les programmes ayant des matériels franco-allemands. Ce qui reste très flou encore. L’Allemagne n’a semble-t-il pour l’instant rien cédé à la France sur ce point très épineux. Enfin, Berlin et Paris vont créer le Conseil francoallemand de défense et de sécurité, comme organe politique de pilotage de ces engagements réciproques. Il se réunira au plus haut niveau à intervalles réguliers. Les deux États souhaitent étendre la coopération entre leurs ministères des affaires étrangères, y compris leurs missions diplomatiques et consulaires. Ils procéderont à des échanges de personnels de haut rang. Ils établiront également des échanges au sein de leurs représentations permanentes auprès des Nations unies à New York, en particulier entre leurs équipes du Conseil de sécurité, leurs représentations permanentes auprès de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord et leurs représentations permanentes auprès de l’Union européenne, ainsi qu’entre les organismes des deux États chargés de coordonner l’action européenne. Surtout, les deux États s’engagent à poursuivre leurs efforts pour mener à terme des négociations intergouvernementales concernant la réforme du Conseil de sécurité des Nations unies. Avec à la clé l’admission de l’Allemagne en tant que membre permanent du Conseil de sécurité. Cet objectif est une priorité de la diplomatie franco-allemande. La France fait un geste très fort pour l’Allemagne. Mais que fait Berlin pour Paris?