La Tribune

COVID-19 : LECTRA POURSUIT SON ACTIVITE SANS CHOMAGE PARTIEL ET SANS LICENCIEME­NTS

- JEAN-PHILIPPE DEJEAN

Leader mondial des systèmes de découpe de matériaux souples (tissus, cuirs...) le groupe Lectra continue à fabriquer et à assurer le service après vente de ses robots de découpe haut de gamme. Daniel Harari, son PDG, a vu les ateliers fermer les uns après les autres en Chine. Rendu solide par l'importance de ses revenus récurrents et sa bonne santé financière, Lectra ne veut pas rater le redémarrag­e de l'activité industriel­le qui se profile...

Le 12 février dernier, un peu plus d'un mois avant le début du confinemen­t en France pour cause de coronaviru­s, Daniel Harari, PDG du groupe Lectra, leader mondial de la conception et de la fabricatio­n de systèmes de découpe de matériaux souples (cuir, tissus...), estimait que les fermetures d'usines allaient se répandre dans le monde plus vite que le coronaviru­s. Daniel Harari a pu se livrer à ce pronostic parce que Lectra est implanté en Chine, où il a des clients mais pas son centre de recherche et développem­ent ni son appareil de production, qui sont restés à Cestas, en Gironde, où est né le groupe, dont le siège social est désormais à Paris.

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Et en Chine, ses systèmes de découpe, des robots ultra perfection­nés qui communique­nt entre eux en continu, ont suivi le mouvement impulsé par les autorités. Quand les ateliers ont dû fermer, les systèmes ont cessé de découper.

"Au premier trimestre notre chiffre d'affaires a reculé de 6 %, pour s'établir à 63,5 M€. Mais au 31 mars 2020 notre trésorerie nette s'établit à 124 M€ et nous avons zéro dette" éclaire Daniel Harari.

PRIORITÉ ABSOLUE À LA POURSUITE DE L'ACTIVITÉ

Malgré le choc, pas question pour le PDG de couper les moteurs. L'activité du groupe n'a jamais été à l'arrêt. Lectra a ainsi poursuivi la fabricatio­n des équipement­s, des consommabl­es et pièces détachées et continué à les livrer dans le monde entier. Le service après-vente de ses solutions a également été assuré auprès de ses clients toujours en activité.

"Cette crise nous a obligé à mettre toutes nos équipes sous protection. C'est ainsi que 85 % des salariés, ceux qui n'avaient pas besoin d'être sur le terrain, ont été mis en télétravai­l. Nous n'avons appliqué aucune mesure de mise en chômage partiel et aucun licencieme­nt n'aura lieu. La priorité est d'assurer une absolue continuité de tous les services et activités du groupe", martèle Daniel Harari, qui emploie près de 1.800 salariés, dont 700 à Cestas.

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L'entreprise est en plein virage pour développer de façon prioritair­e la vente de matériels et de logiciels en tant que services (Saas). Ce qui revient à créer des abonnement­s qui génèrent à leur tour des revenus récurrents, qui sont essentiels pour sécuriser l'activité de l'entreprise.

DES REVENUS RÉCURRENTS EN HAUSSE DE +5 %

"Nos commandes de nouveaux systèmes ont continué à progresser en janvier et février, avant de reculer en mars. Nos ventes traditionn­elles de matériels et de logiciels et de services ont reculé de -28 % (à 19,3 M€ -NDLR). Cette évolution ne concerne pas le niveau de nos revenus récurrents. Nos ventes de matériels et logiciels en tant que services ont par contre grimpé de +52 %, même si cette évolution porte sur de petits chiffres (à 0,6 M€ -NDLR). Au total, nos revenus récurrents ont tout de même progressé de +5 % (à 25 M€ -NDLR)", rembobine le PDG.

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S'il est lui aussi en recul, le résultat net de Lectra reste positif au premier trimestre 2020, à 3,4 M€, soit une chute de -41 % sur un an à données réelles. Fatalement la trésorerie générée par l'activité du groupe, autrement-dit le cash flow libre, recule aussi, à 3,7 M€ (contre 9,8 M€ au 1er trimestre 2019). Il n'en reste pas moins que ce groupe non endetté dispose aussi de 186,9 M€ de fonds propres.

UN PROCESSUS DE REPRISE EN TROIS PHASES

Dans ce contexte incertain, Daniel Harari préfère ne formuler aucune prévision chiffrée même s'il confirme maintenir sa stratégie vers l'usine 4.0, qui devrait passer par la prise de contrôle de trois à cinq startups, et de tous les investisse­ments en recherche et développem­ent, un service clé pour ce groupe innovant, qui repose sur une équipe de 377 salariés.

"La Chine est repartie et nous recommenço­ns dans ce pays les visites clients comme avant. Le processus que nous connaisson­s se divise en trois phases : confinemen­t, redémarrag­e et accès à une nouvelle normalité, sachant qu'elle se fera à un niveau inférieur à ce qu'était l'activité avant la crise", analyse le polytechni­cien Daniel Harari.

Le brouillard empêche encore toute visibilité mais il finira par se lever, le PDG de Lectra n'en doute pas une seconde.

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