La Tribune de Lyon

Discrimina­tion éditoriale positive

- FRANÇOIS SAPY, DIRECTEUR DE LA RÉDACTION

Je suis toujours sceptique face aux articles consacrés aux femmes. Encore davantage à ceux consacrés aux femmes entreprene­ures. Comme le souligne notre journalist­e David Gossart, c’est en quelque sorte faire l’aveu d’un échec de consacrer un dossier spécifi que à des femmes de talents. Et pourquoi pas un dossier consacré aux mâles qui font bouger les lignes, alors ?

Mais en fait, à lire l’histoire de chacune de ces dix femmes,

on se dit que ce type de dossier reste d’une criante nécessité. Quasiment toutes évoquent – parfois en creux – ce plafond de verre quasiment invisible, indéfi nissable, polymorphe mais tellement présent dans le quotidien. C’est parfois un petit rien. Mais un petit rien qui peut tout changer. À l’image de la patronne de Thimonnier, Sylvie Guinard : bien qu’ingénieur d’aff aires, son grand- père, fondateur de l’entreprise, n’avait même pas pensé à elle pour diriger la PME familiale. Elle a dû s’imposer et le choix s’est révélé payant, puisque l’entreprise se développe aujourd’hui tous azimuts.

Alors c’est vrai que cette « discrimina­tion éditoriale positive » peut choquer, y compris des femmes.

Mais, en attendant qu’il existe une stricte égalité entreprene­uriale, ce type de dossier restera nécessaire. Ne serait- ce que pour faire comprendre aux grands- pères que leurs petites- fi lles aussi peuvent avoir du talent et reprendre la boîte familiale. Il y a du chemin à faire puisque, selon l’Insee, moins de trois créateurs d’entreprise sur dix sont des créatrices en France.

Cela est d’autant plus nécessaire que parfois, un tout petit rien peut faire de grandes choses.

Je me souviens au début des années 2000, en pleine explosion de la bulle Internet, d’une petite entreprise lyonnaise qui n’était pas en grande forme. Elle s’appelait LDLC. com et, comme beaucoup d’autres, elle subissait la tourmente des marchés. Il s’en est fallu de peu, comme beaucoup d’autres. À coups d’audace et d’innovation, LDLC a tenu le coup. Elle vient aujourd’hui d’emménager dans son siège fl ambant neuf de Limonest. La société emploie près de 500 personnes et est un des leaders français du e- commerce.

Il faut garder en tête la Théorie du papillon : un battement d’ailes ici peut provoquer un cataclysme ou un grand bonheur.

C’est peutêtre une toute petite décision, un événement insignifi ant qui fait que LDLC en est arrivé là aujourd’hui. Un battement d’ailes de papillon. Ce dossier sur les femmes est notre battement d’ailes à nous. S’il peut donner envie et montrer qu’entreprend­re, c’est possible, même quand on est une femme, on aura fait le job.

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