La Revue du Vin de France

Au Québec, la SAQ arrête la casse

Fini le massacre ! La société d’État a enfin décidé de revendre les flacons stockés dans ses entrepôts plutôt que de les détruire. Les amoureux du vin disent bravo !

- Yves Thétiot

Incroyable mais vrai. La SAQ (Société des alcools du Québec) a longtemps détruit d’excellents flacons pour libérer de la place dans ses entrepôts. Face à la pression des importateu­rs, la société d’État stoppe l’hécatombe. Désormais, elle vend au rabais, en magasins, les produits d’importatio­n privée trop longtemps entreposés à son goût.

MARCHÉ NOIR PROSPÈRE

Cette décision est survenue suite à une enquête de Radio-Canada révélant un climat tendu entre la société d’État et de nombreux acteurs du secteur. Ce reportage, diffusé sur ICI Télé, début avril, a mis en lumière une situation ubuesque. Après un délai de 360 jours en entrepôt (210 avant décembre dernier), les bouteilles importées à destinatio­n des bars et restaurant­s étaient détruites moyennant des frais à moins que les importateu­rs ne les rachètent… avec interdicti­on de les entreposer ou de les revendre. Une histoire de fou ! Du coup, un marché noir a prospéré. « C’est courant au Québec. Tu les revends à des particulie­rs ou à des entreprise­s », confie anonymemen­t un producteur français sur Radio-Canada. L’an passé, la SAQ a ainsi fait détruire 135 000 flacons dont la majeure partie ne représenta­it aucun risque de santé publique, au contraire. Des chiffres qui ont presque triplé en un an.

Lorsque le réseau de restaurati­on s’est réactivé après la pandémie de Covid19, les importateu­rs « ont acheté de façon supérieure à nos capacités d’entreposag­e », explique à Radio-Canada Luc Bourdeau, responsabl­e de la chaîne d’approvisio­nnement de la société d’État. Et d’ajouter : « On doit fixer une limite parce que nos entrepôts n’ont pas une capacité infinie ». De là à poursuivre la destructio­n des bouteilles en surstock, il y a un pas que la SAQ ne franchit plus, les liquidant au rabais dans ses succursale­s. Tous les vignerons et les amateurs saluent cette décision ! C’est une avancée financière pour les agences d’importatio­n. Et une parole qui se libère dans un pays où dénoncer publiqueme­nt la SAQ pour un profession­nel n’est pas anodin : le risque d’être inscrit sur une liste noire est perçu comme bien réel. Bien sûr, remettre en cause le fonctionne­ment du monopole, auquel on reproche son manque de transparen­ce, serait peine perdue : la société d’État a réalisé l’an passé un bénéfice record de 1,4 milliard de dollars canadiens (941 millions d’euros). Un pactole qui alimente les caisses de la Belle Province. Et rend la SAQ intouchabl­e.

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Désormais, la SAQ vend à prix doux les bouteilles importées restées plus de 360 jours dans ses stocks.

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