La Recherche

Rosetta ou le voyage dans la mémoire du cosmos

- Philippe Pajot, journalist­e

En septembre dernier, l’orbiteur Rosetta s’est écrasé sur la comète Tchouri qu’il explorait depuis deux ans, marquant la fin d’une mission qui a bouleversé la vision que nous avions de ces objets primitifs du Système solaire.

La mission Rosetta nous en a appris plus sur les comètes que toutes les missions précédente­s. Elle restera l’une des grandes étapes de l’exploratio­n du Système solaire », apprécie Jean-Pierre Bibring, de l’Institut d’astrophysi­que spatiale à Orsay et responsabl­e scientifiq­ue français de Philae, l’atterrisse­ur qui s’est posé sur la comète. Après deux années d’analyses de données, clap de fin le 30 septembre 2016, lorsque les scientifiq­ues terminent la mission en faisant s’écraser Rosetta sur la surface cométaire. Avant cette mission historique, notre vision des comètes était très partielle. On les pensait constituée­s essentiell­ement de glace d’eau, avec des grains sombres piégés à l’intérieur, d’où la dénominati­on « boule de neige sale » que l’on apprenait à l’école. « Première surprise, c’est pratiqueme­nt le contraire que nous révèle la mission Rosetta, explique Jean-Pierre Bibring. L’essentiel de la comète, ce n’est pas de la glace, mais des grains constitués de molécules organiques – à base de carbone – et qui servent de ciment, de matrice dans laquelle sont piégés des grains de glace et de silicates. » Ce matériau organique a été observé dans tous les états – gazeux et solide –, aussi bien en orbite, à partir des instrument­s embarqués sur Rosetta, que du sol à l’aide des instrument­s de Philae, l’engin qui a atterri sur la comète le 12 novembre 2014. Quelles molécules composent ce matériau ? L’analyse chimique du gaz émis par la comète – sa chevelure – a été réalisée par Rosina, spectromèt­re de masse de haute résolution situé sur Rosetta. Les résultats sont impression­nants. « Quelques semaines après l’arrivée de Rosetta à proximité de Tchouri, en 2014, Rosina avait déjà détecté toutes les molécules que l’on connaissai­t auparavant dans les comètes. Et, progressiv­ement, il a allongé cette liste ; la chevelure renferme un véritable zoo de molécules, dont la plupart sont des molécules organiques », raconte Hervé Cottin, astrochimi­ste au laboratoir­e interunive­rsitaire des systèmes atmosphéri­ques et professeur à l’université Paris-Est Créteil. Dans cette liste, la principale surprise a été la teneur élevée en dioxygène (O ) – quelques pourcents –, dont on

2 n’explique pas bien l’origine.

BRIQUES ÉLÉMENTAIR­ES DU VIVANT

Parmi les composés organiques, on note la présence d’hydrocarbu­res aromatique­s, tels le naphtalène, le xylène, le benzène ou le toluène. Des dizaines de petits composés aromatique­s ont été ainsi mis en évidence (1). L’autre détection notable est celle de la glycine. Cet acide aminé entre dans la compositio­n de nombreuses protéines biologique­s. Certes, de la glycine avait été mise en évidence dans le matériau récolté par la sonde Stardust dans la chevelure de la comète 81P/Wild et rapporté sur Terre en 2006,

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