Spécial auto En route vers le futur
La berline Diesel qui constituait le gros de la flotte a vécu. Les véhicules professionnels de demain s’annoncent partagés, hybrides et autonomes. Zoom sur une petite révolution automobile et sur les modèles phare
D epuis la fin des années 1970, il se vend peu ou prou chaque année 2 millions de voitures neuves en France, avec des hauts (2,2 millions en 1988 et en 1990) et des bas (1,7 million en 1984 ou en 1997). Mais si cette moyenne (1,9 million) ne varie guère, la typologie du marché a, elle, profondément changé. Les ventes aux entreprises ont en effet dépassé pour la première fois celles des particuliers au premier trimestre 2016, alors que, en 1988, elles ne représentaient que 15% du total ! Le marché des flottes automobiles est donc devenu stratégique et dicte désormais en grande partie le choix des constructeurs en matière de design, de motorisation et d’équipement. Aujourd’hui, tous les constructeurs ont une offre dédiée aux flottes.
La voiture de société type, actuellement, est une berline avec hayon et équipée d’un moteur Diesel. Mais ces canons classiques sont en train de voler en éclats. Sur les énergies, tout d’abord. L’affaire Volkswagen, l’an dernier, a fini de jeter l’opprobre sur une motorisation de plus en plus décriée, alors que celleci représente actuellement plus de 87% du parc total des flottes automobiles. Et le désamour croissant des Français visàvis du diesel (sans compter une législation de plus en plus restrictive) n’est pas sans conséquences sur les flottes, puisque ces dernières alimentent massivement le marché de l’occasion, via la location longue durée.
Mais ce sont surtout les usages qui évoluent : utilisation de la voiture de fonction pour les weekends en famille, autopartage, optimisation du temps en milieu urbain… L’homme au volant de ce bel avantage en nature n’est plus forcément un commercial solitaire roulant plus de 30 000 kilomètres par an.
Dès lors, à quoi ressemblera la voiture de fonction du futur ? Seratelle plus propre ? Plus autonome ? Si l’on en croit le dernier baromètre de l’Observatoire du Véhicule d’Entreprise (OVE), dans les cinq ans à venir, les flottes seront plus vertes, avec près de 60% des gestionnaires qui prévoient de recourir aux motorisations alternatives. Il faudra aussi apprendre à partager son jouet : 43% des interviewés pensent que l’autopartage va se développer. Enfin, les voitures seront plus autonomes, si la technologie et la réglementation le permettent, puisqu’une majorité des employés (57%) est d’ores et déjà d’accord pour se laisser conduire par une voiture sans chauffeur.
Pour Maxime Sartorius, le PDG de Direct Fleet, la vraie révolution réside dans la voiture connectée, qui va rapidement se généraliser avec l’« ecall », un système d’appel d’urgence, obligatoire dès 2018 sur toutes les voitures neuves. « Tout le monde l’oublie, mais tous les dispositifs d’aide à la conduite, qui permettent au véhicule de se situer par rapport à son environnement et par rapport aux autres véhicules, auront une conséquence immédiate : une baisse drastique des accidents de la route. » Un point crucial alors que la ministre du Travail, Myriam El Khomri, rappelait la semaine dernière que les accidents de la route représentaient la première cause de mortalité parmi les accidents du travail, avec 483 décès en 2015. Bernard Fourniou, président de l’OVE, pense quant à lui que la vraie révolution, qui implique un changement des mentalités, est à chercher dans l’autopartage. « On observe qu’il y a une différence profonde entre les jeunes générations qui arrivent sur le marché du travail et les autres. Pour les plus jeunes, posséder une voiture est synonyme de plus de contraintes, et ils demandent d’autres approches et d’autres solutions en matière de mobilité » : autopartage, interdiction des voitures à l’intérieur des centresvilles, fluidification du trafic grâce aux voitures communicantes puis autonomes…
L’optimisation des moyens de déplacement réduiratelle, in fine, la taille moyenne des flottes ? « Il y aura de plus en plus de besoins en ce qui concerne la mobilité, répond Bernard Fourniou. Si on prend l’exemple de l’autopartage, ce n’est pas parce que vous mettez en place un pool de voitures partagées que vous allez réduire la taille de votre flotte. Ceux qui ont besoin d’un véhicule de fonction personnel, comme les commerciaux, en auront toujours besoin. En revanche, vous allez offrir un service supplémentaire à des collaborateurs qui n’y avaient pas forcément accès. »
Dernière marche de la démocratisation de la voiture de fonction : de moins en moins statutaire, de plus en plus utilisée. « L’optimisation des pools de véhicules fera qu’ils seront remplacés plus souvent, ce qui influencera de toute façon positivement le marché », poursuit Bernard Fourniou. Et qu’importe si les usages et les mentalités changent : le monde de l’automobile sait s’adapter. Renault et Peugeot viennent ainsi de lancer leurs solutions de mobilité,
Renault Mobility et Free 2 Move. Hugues de Laage, responsable Peugeot Professionnel, rappelle que la dernière mouture du 3008 « propose, en option, une trottinette à assistance électrique e-Kick, qui permet de rallier l’hypercentre si la réglementation interdit de le faire avec son véhicule ». En matière d’innovation, les entreprises ne sont pas en reste. La SNCF, en partenariat avec Oui Car, optimise depuis quelques mois l’utilisation de certains de ses véhicules de fonction en proposant aux particuliers de les louer quand ils ne sont pas utilisés, grâce à une clé numérique sur son smartphone. Vous avez dit partage ?