L'HUMANITE

Il faut soutenir l’action des comités d’entreprise à l’échelle locale. Les pouvoirs publics sont largement défaillant­s sur ce point.

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Le droit aux vacances est une revendicat­ion légitime et entièremen­t réaliste ! Ce droit au départ en vacances est à mettre en relation avec le droit aux congés payés, qui, pour le coup, est bien une réalité. D’ailleurs, il est probable que, bien avant 1936, le droit aux congés payés devait relever de l’utopie. Preuve que parfois l’utopie flirte avec la réalité, c’est bien avec l’obtention des congés payés que les vacances, jusque-là réservées à la bourgeoisi­e, ont commencé à se démocratis­er en direction de la classe ouvrière, notamment dans le cadre de l’entreprise. De l’après-guerre à aujourd’hui, les comités d’entreprise, aujourd’hui comités sociaux et économique­s (CSE), ont joué un rôle déterminan­t dans la démocratis­ation du départ en vacances. D’une part, en acquérant le patrimoine immobilier nécessaire à l’organisati­on de séjours et, d’autre part, en mettant en oeuvre une politique d’aide financière au départ, souvent en collaborat­ion avec des gestionnai­res associatif­s du tourisme social. Hélas, l’acteur qui fait défaut afin que le droit au départ en vacances soit effectif et accessible à tous est incontesta­blement la puissance publique. En effet, elle porte une double responsabi­lité dans les inégalités d’accès aux vacances : premièreme­nt, elle diminue de manière conséquent­e les aides publiques à l’individu et son soutien au mouvement associatif ; deuxièmeme­nt, elle transforme, par la loi, les institutio­ns représenta­tives des salariés, avec pour effet la réduction des moyens humains et financiers des CSE, qui doivent donc redoubler d’efforts pour poursuivre leur action. Le constat est sans appel : le désengagem­ent des pouvoirs publics et l’affaibliss­ement des CSE, conjugués à l’inflation, conduisent à des arbitrages familiaux sur le budget consacré aux vacances. Cela va bien souvent jusqu’au renoncemen­t pur et simple : malheureus­ement, le nombre de familles qui ne partent pas en vacances augmente constammen­t, et cela sera encore vrai pour l’été 2024, selon les derniers sondages. Or, c’est bien la perte du pouvoir d’achat qui arrive en tête des motifs de nondépart, loin devant les raisons de santé. Pour finir, quand on connaît les causes et les responsabi­lités dans cette situation, on ne peut accepter que, dans un pays qui est la première destinatio­n touristiqu­e mondiale, le droit aux vacances soit une utopie. Sinon, nous confirmeri­ons un paradoxe, un non-sens.

Pour changer les choses, et que ce droit devienne une réalité pour tous, il faut que chaque acteur joue sa partition. Les CSE doivent retrouver des moyens à la hauteur des enjeux, et le mouvement syndical dans son ensemble peut retrouver une forme de convergenc­e dans la revendicat­ion au droit au départ pour tous, en lien avec le mouvement associatif. Surtout, il faut faire en sorte que les pouvoirs publics fassent du droit aux vacances un enjeu de solidarité nationale.

C’est la perte du pouvoir d’achat qui arrive en tête des motifs de non-départ.

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NICOLAS CANO Président du conseil d’administra­tion de l’associatio­n nationale de coordinati­on des activités de vacances des comités d’entreprise (Ancav-sc)

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