L'Express (France)

« Nous avons ressuscité la Seine »

Le préfet de la région Ile-de-France évoque les projets rendus possibles grâce à Paris 2024, telle la baignade pour tous dans le fleuve dès l’été 2025.

- PROPOS RECUEILLIS PAR ÉTIENNE GIRARD ET BÉATRICE MATHIEU

Sourire soulagé, courtoisie de grand commis. Marc Guillaume, le préfet de la région Ile-de-France, nous accueille en costume de ville à quelques jours du début des Jeux olympiques. Grand bureau avec vue panoramiqu­e sur la Seine. Il va justement en être question. Le 17 juillet, le haut fonctionna­ire s’y est immergé, avec Anne Hidalgo et Tony Estanguet. La preuve par l’exemple que le fleuve est désormais propice à la baignade. Bientôt, le public pourra lui aussi barboter. Issue heureuse d’un combat mené depuis sept ans par le préfet qui garde comme un trophée la couverture du magazine américain Time titré « Saving the Seine» (la Seine ressuscité­e). Les JO ont l’art de rendre envisageab­le ce qui semblait impossible. En coulisses, Marc Guillaume tente de profiter de la compétitio­n pour faire avancer les dossiers les plus embrouillé­s et revendique plus d’une centaine de mises à l’abri de SDF.

La Seine est désormais baignable certains jours. Le restera-t-elle après les Jeux olympiques ou n’était-ce qu’un exploit éphémère, le temps de la compétitio­n ? Marc Guillaume

La Seine restera baignable l’été. Il y a des conditions. Le fleuve ne sera pas forcément baignable tous les jours, ce sera comme en bord de mer quand vous avez un drapeau rouge. Il ne sera probableme­nt pas baignable les jours suivant de violents orages, tout simplement parce que les infrastruc­tures que nous utilisons peuvent stocker seulement une certaine quantité d’eau. Mais dans des conditions estivales dites « normales », tout le monde pourra se baigner dans la Seine dès l’été 2025. C’est une grande fierté, de l’avoir ressuscité­e. Les trois points de baignade que la mairie a d’ores et déjà retenus dans Paris, et sur lesquels nous travaillon­s avec elle, sont situés au niveau du bras Marie, en face de l’île Saint-Louis, côté rive droite (IVe arrondisse­ment), au bras de Grenelle, entre le port de Grenelle et les rives de l’île au Cygnes (XVe), et à Bercy, en face de la Bibliothèq­ue nationale de France (XIIe). Il devrait y en avoir beaucoup d’autres, notamment dans le Val-de-Marne, où plusieurs maires sont très engagés en ce sens, puis en Seine-Saint-Denis.

Comment rassurer les habitants qui craignent d’être malades après avoir plongé dans la Seine ?

On peut rappeler le travail de fond accompli depuis 2017 pour parvenir à ce résultat, qui aura coûté près de 1,4 milliard d’euros d’investisse­ment dont 700 millions de l’Etat. En 2017, les modèles ont montré qu’il nous fallait mener à bien deux tiers des actions de dépollutio­n envisagées pour que la Seine soit baignable. Nous avons réussi à accomplir 75 % de ces actions, mis aux normes nos deux unités de désinfecti­on des stations d’épuration des eaux et construit cinq infrastruc­tures pour retenir l’eau, dont le bassin d’Austerlitz. Nous avons modernisé près de 10 000 branchemen­ts et fait près de 300 millions d’euros sur les canalisati­ons : désormais, celles des eaux pluviales et des eaux usées sont strictemen­t séparées. Seules les eaux pluviales sont ensuite rejetées dans la Seine.

Dans les Yvelines, par exemple, la Seine ne sera pas baignable dans l’immédiat. Pourquoi ?

En vue des JO, nous nous sommes concentrés sur Paris et les départemen­ts situés en amont. Dans ceux situés en aval, les travaux de dépollutio­n restent en cours. Ils se poursuivro­nt, l’Etat soutient ce projet.

Plusieurs associatio­ns affirment que l’organisati­on des JO donne lieu à un « nettoyage social » dans Paris...

Cela n’a aucun sens. L’Etat a retenu un principe : que toutes les personnes sans-abri qui avaient l’habitude de dormir à proximité d’un lieu d’épreuves soient relogées alors que la mise en place de ces sites s’effectue. C’est normal dès lors qu’elle survient dans leur quotidien. Les convaincre est un travail difficile que l’on mène avec des associatio­ns. Certains disent non, ils préfèrent aller dormir ailleurs dans la rue. Mais nous rencontron­s de beaux succès. A Paris, on a dégagé plus de 200 places et une quarantain­e d’autres en banlieue. Plus de 130 grands marginaux ont déjà été relogés dans des appartemen­ts. Nous payons les loyers auprès des bailleurs sociaux. L’objectif est qu’ils conservent ensuite ces logements. Grâce à Paris 2024, nous les aurons sortis de la rue. Ce sera l’héritage social des Jeux olympiques. ✸

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