NON / « L’EXCLURE AURAIT ÉTÉ INJUSTE ET CONTRE-PRODUCTIF »
Déplorer l’entrée de la Chine à l’OMC, c’est apporter une mauvaise réponse à une bonne question. Ses pratiques commerciales ont certes souvent posé problème, qu’il s’agisse d’applications opaques et discriminatoires des réglementations, de transferts forcés de technologies ou de subventions industrielles massives. Pour autant, est-ce que refuser à la Chine d’accéder à l’OMC était une solution ? Je ne vois pas en quoi cela l’aurait poussée à des pratiques plus équitables. Est-ce qu’il y aurait eu moins de dumping social et environnemental de sa part ? Rien n’est moins sûr. De plus, lui refuser l’accès aux marchés internationaux aurait été également difficile à justifier et à mettre en oeuvre, tout en exacerbant les tensions politiques. Vouloir s’isoler d’un partenaire commercial aussi important n’est pas une position tenable. D’autant plus que le géant asiatique n’a pas attendu son entrée à l’OMC pour afficher de belles performances : elles étaient déjà très bonnes dans les années 1990. Il est également faux de dire que nous n’avons pas été assez exigeants : les négociations ont été longues, dures, et la Chine a fait d’importantes concessions , avec des réformes internes sur les entreprises d’Etat ou le droit commercial, et une baisse des droits de douane sur les produits industriels qui la met très en dessous des autres émergents, comme le Brésil ou l’Inde.
Mais la négociation s’est fondée sur une hypothèse qui s’est révélée fausse : le pays s’engageait dans un processus qui rapprocherait son fonctionnement de celui des économies de marché. Il aurait fallu partir d’un constat différent – la Chine a choisi un autre modèle – et ensuite concevoir des mécanismes adaptés. Il ne s’agit pas de l’exclure du système commercial, ni de gêner son développement, ce qui serait illégitime, injuste et potentiellement contre-productif, mais de ne pas devenir la variable d’ajustement de ses politiques. ✸