Ils envahissent le Département
Lundi, les opposants à la fermeture des collèges Pablo-Neruda à Évreux, Pierre-Mendes-France à Val-de-Reuil et Jacques-Daviel à La Barre-en-Ouche se sont invités à la séance plénière du Conseil départemental.
« Lecornu, t’es foutu, les collèges sont dans la rue ». Ou plus exactement, les collèges sont dans l’hémicycle du Conseil départemental. Lundi matin, la séance avait à peine commencé que des centaines de manifestants faisaient irruption à l’Hôtel du département.
Sébastien Lecornu hué
Au son des sifflets et d’une Marseillaise réinterprétée « Aux armes collégiens », ils ont rapidement - et bruyamment - investi les lieux. À l’ordre du jour de l’assemblée, le vote du plan d’investissement pluriannuel des collèges et la fermeture de trois établissements dans l’Eure, dont Pablo Neruda à Évreux. « Une tragédie pour les élèves et le quartier de la Madeleine » glisse une enseignante avant de suivre dans la salle le groupe formé par ses collègues mais aussi des parents d’élèves ou de simples voisins.
« Comment osez-vous sourire ? ! »
Imperturbable, Sébastien Lecornu tente de faire bonne figure sous les huées. « Comment faites-vous pour sourire alors que nous on pleure ? !» l’interpelle une femme dans la foule. Après une tentative de prise de parole, le temps de dénoncer « une intrusion inacceptable dans ce lieu de la démocratie participative », il quitte finalement la salle.
Une attitude qui confirme le manque de dialogue évoqué par beaucoup d’enseignants. « Nous avons l’impression que tout est déjà décidé. Monsieur Lecornu ne veut même pas entendre nos arguments, il ne veut pas comprendre les difficultés de nos élèves, avance Karima Issad, professeur de lettres à Pablo-Neruda. Dispatcher les jeunes dans d’autres collèges, ce n’est pas faire de la mixité sociale mais rajouter de la difficulté à un travail pédagogique déjà dur ».
« Un lieu de cohésion dans le quartier »
Une version alternative de la séance commence ensuite. Les manifestants s’installent dans les sièges désertés par les élus et un jeune homme brandissant une affiche « Non à la fermeture de Mendes-France » (à Val-de-Reuil) a pris la place du président. Les représentants de chacun des trois établissements menacés montent à la tribune à tour de rôle. « Monsieur Lecornu est venu cette année dire devant les caméras que Pablo-Neruda était la vitrine de l’enseignement prioritaire ! » rappelle au micro Karima.
Dans la foule, Geneviève Magnan, dont les quatre enfants sont passés par le collège, déplore qu’on « supprime un lieu de cohésion dans le quartier, ça me fait mal aux tripes ! On parle de baisse d’effectifs mais c’est justement l’idéal pour ces jeunes qui sont fragiles et ont besoin que les adultes les aident à grandir ».
Derrière les banderoles de Pablo-Neruda, Volkan, élève de 6e, est venu avec sa mère. « Ils n’ont pas pensé aux conséquences pour les parents qui devront s’organiser autrement et notamment payer en plus pour que leurs enfants mangent à la cantine et prennent le bus pour aller en cours » s’inquiète-t-elle.
Intervention des forces de l’ordre
La conclusion des débats ne sera pas donnée par les élus, retranchés dans une salle attenante, mais par les policiers. Appelées à la rescousse, les forces de l’ordre procèdent calmement à l’évacuation des lieux.
« La preuve que Sébastien Lecornu refuse tout dialogue » avance Emeric Jeanne, professeur à Pablo-Neruda et représentant de l’UNSA. La seule rencontre avec l’équipe enseignante a eu lieu le 6 juin, après que le projet de fermeture ait été présenté à la presse. « Cette manifestation traduit notre incompréhension face à cette décision, mais aussi la colère, la peur pour l’avenir de nos élèves et surtout l’impression de mépris » conclut l’enseignant.