Dimanche Ouest France (Vendee)

« L’alcool, ça a commencé avec les copains… »

Patrice Prouteau a été dépendant à l’alcool pendant des années. Abstinent depuis quatorze ans, cet habitant de Saint- Julien- des- Landes raconte cette période difficile. Un témoignage fort.

- Entretien L’entretien dans son intégralit­é sur : www.ouest-france.fr/ loire/vendee/

Patrice Prouteau, a 56 ans. Marié, père de deux enfants de 28 et 31 ans, il raconte à Ouest- France son parcours contre la dépendance alcoolique. Il est le président de l’associatio­n Franchir le pas à Saint- Julien- desLandes.

Comment est survenue dépendance à l’alcool ?

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J’ai passé un mois en cure à Luçon en juin 2009 et c’est encore une question à laquelle ils essayent de trouver la réponse. Moi, je n’ai jamais trouvé. Ça ne vient pas de mon père, je n’ai jamais eu vraiment de gros coups pour pouvoir expliquer ça.

Au début, ça a commencé avec les copains, en buvant comme ça le week- end. Au boulot, j’étais avec un ancien qui avait tout le temps à boire, on buvait toujours un peu. C’est une habitude quotidienn­e qui s’est installée, ça a été crescendo.

Le soir, quand on sortait, je me demandais si quelqu’un allait nous payer un coup, donc je buvais avant de partir, au cas où. Comme ça, j’étais sûr d’avoir ma dose.

Quand j’y repense, c’est incroyable ce qu’on peut être imaginatif pour trouver de l’alcool. Pour la cacher, ce n’était pas trop un souci, j’en avais un peu partout, entre autres dans mon garage. Le matin, je me disais que je n’allais pas en avoir assez pour la journée donc je m’arrêtais à Lidl et puis hop, j’achetais des petits barricous et avec un entonnoir, j’en mettais dans mes bouteilles. J’étais rendu à un point vraiment… À la fin, j’étais à cinq litres de vin par jour.

Quel était votre comporteme­nt

lors des périodes d’ivresse ?

Je ne me sentais jamais saoul mais les gens n’étaient pas dupes, ça se voyait. Il ne fallait rien me dire, dès qu’on me disait quelque chose, je retournais au garage et puis je buvais un verre.

J’aurais peut- être été agressif mais verbalemen­t, pas physiqueme­nt, je n’ai jamais levé lamain ni surma femme ni sur mes enfants. Oh non, non non ! Je n’avais pas l’alcool méchant.

Qu’est- ce que l’alcool vous apportait ?

Quand on boit comme ça, on est le roi du monde. J’aurai pu monter sur un fil en hauteur, je n’aurais pas eu peur alors que cela aurait été hyper dangereux. On a une confiance à toutes épreuves.

On croit que grâce à l’alcool, tout va bien mais en fin de compte, l’alcool sert à oublier tous les problèmes. Mais les problèmes sont toujours là et ils reviennent après.

Quel est le déclencheu­r de ce sevrage définitif ?

Un jour, je suis tombé sur une demande de logement de ma femme. Le coup de pied au cul, il vient de là. Soit je faisais quelque chose, soit elle partait. J’ai été obligé d’en prendre conscience. Ça ne lui suffisait pas que j’aille aux réunions et que ça aille mieux un petit moment seulement.

Avez-vous ressenti une différence sur votre vie sociale ?

On perd des amis quand ils savent qu’il n’y a plus d’alcool chez vous… Mais on n’appelle pas ça des amis.

Samedi soir, on était en fête et, maintenant, je ne supporte plus ceux qui sont chiants parce qu’ils boivent. Ma femme me dit que j’étais aussi comme ça des fois… Pareil quand ce sont des apéros à rallonge, ça m’énerve quand ça s’éternise, je dis allez on mange.

Où en êtes-vous aujourd’hui, après

quatorze d’abstinence ?

Aujourd’hui, je n’ai plus d’envies, plus du tout. Ce week- end pour le Téléthon, je peux servir au bar, ça ne me gêne pas du tout. Le seul truc qui me dérange encore un petit peu, ce sont les plats en sauce avec de l’alcool comme le gibier à la sauce au vin… Ce n’est pas le goût, c’est l’odeur.

Au début, ma femme devait avoir des craintes mais là, je suis sûr qu’elle ne s’inquiète plus.

Par contre, s’il devait y avoir un coup dur familial, je ne sais pas comment on pourrait réagir.

Comme je dis aux réunions, il faut faire une différence entre un accident et une rechute quand même. Je pense qu’un accident peut arriver, on prend un verre et on se dit ça ne me fait rien et on en reprend un deuxième… Mais c’est là qu’il faut réagir, stop ! Jeme suis toujours dit que si un jour je rebuvais même un verre, le soir je le dirai à ma femme… Ça me fait une protection pour moi en plus. Alors que la rechute va durer plus de deux jours et plus ça va aller, plus on va retomber dedans.

Je suis aussi dépendant à la cigarette et je trouve que c’est plus dur d’arrêter de fumer.

L’Associatio­n Franchir le pas,

accueille les personnes atteintes d’alcoolisme, les abstinents sur le chemin de la guérison ou l’entourage qui a besoin d’être écouté et compris. Contact au 06 29 55 79 24 ou le dernier vendredi de chaque mois à 20 h à l’Atelier des arts, rue des Artisans, à Saint- Julien- des- Landes.

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| PHOTO : OUEST-FRANCE Patrice Prouteau, abstinent depuis 14 ans et président de l’associatio­n Franchir le pas à Saint-Julien-des-Landes.

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