Dimanche Ouest France (Finistere)

De Guérande à Noirmoutie­r, le sel façonne le territoire

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En France, les plus anciens textes et plans relatifs à l’exploitati­on de marais salants concernent la presqu’île de Guérande, aujourd’hui en Loire-Atlantique : ils datent du milieu du IXe siècle, mais la production de sel dans la zone était antérieure de plusieurs siècles. Ce sont les moines qui, en étudiant de façon précise les marées, le niveau d’ensoleille­ment et l’action des vents, ont conçu le fonctionne­ment des marais (palu en latin) et l’ont mis en oeuvre.

La concurrenc­e du Portugal

Entre le IXe et le XIIIe siècles, d’autres communauté­s monastique­s créent des marais salants en Vendée, dans la baie de Bourgneuf et sur l’île de Noirmoutie­r. Toutefois, ces installati­ons ne prennent leur véritable essor qu’au XIVe et XVe siècles, grâce aux marchands du nord de l’Europe réunis dans la ligue hanséatiqu­e. Pour conserver les harengs, dont ils font commerce, ils plébiscite­nt le sel de la baie de Bourgneuf. Au XVIe siècle, le sel vendéen devient convoité par les propriétai­res des navires qui partent pêcher la morue sur les bancs de Terre-Neuve. Mais rapidement, il va se trouver concurrenc­é par le sel du Portugal. De plus, la baie de Bourgneuf s’envase, ce qui rend l’accès des

bateaux de plus en plus difficile. Les marais de Guérande parviennen­t quant à eux à maintenir leur activité, basée sur l’exportatio­n vers l’Angleterre et la Bretagne.

Au cours du XXe siècle, les marais salants du littoral atlantique déclinent fortement. À la fin des années 1960, ils ont presque disparu face à la concurrenc­e des salines industriel­les.

Mais à Guérande, dans les années 1970, un méga-projet d’aménagemen­t touristiqu­e suscite une vive réaction initiée par un groupe de « néo-paludiers ». Les marais salants sont relancés et les producteur­s, via la création d’une coopérativ­e, développen­t une production artisanale de haute qualité.

Une IGP en 2012

Un label rouge est obtenu en 1991 puis, en 2012, la dénominati­on « Sel de Guérande » est enregistré­e au niveau européen en tant qu’Indication géographiq­ue protégée (IGP). Comme hier, l’eau arrive dans les salines du « pays blanc » (gwenn rann en breton) par un réseau complexe de canaux et de bassins. À l’issue d’une succession de décantatio­ns et d’évaporatio­ns, l’eau parvient dans les « oeillets » où s’effectuent la récolte du gros sel gris et celle de la prestigieu­se fleur de sel. Toujours réalisée avec des outils traditionn­els en bois, elle demande une grande habileté.

On compte aujourd’hui 300 paludiers à Guérande (sur 2 000 ha répartis sur deux sites) et une centaine de sauniers sur l’île de Noirmoutie­r. Mais les sels « solaires » français proviennen­t à plus de 98 % des salins industriel­s de Camargue (Aigues-Mortes et Les Salins de Giraud).

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| PHOTO : ARCHIVES FRANCK DUBRAY / OUEST-FRANCE Les marais salants de Guérande.

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