Dimanche Ouest France (Finistere)
Des framboises et myrtilles léonardes sur les étals
Encore une innovation. La marque de producteurs Prince de Bretagne proposera ces fruits cet été. La station de recherche de Saint-Pol-de-Léon a trouvé comment maîtriser leur fragile production.
Elles sont les stars de l’été, mais rarement d’origine française : 86 % des framboises et 83 % des myrtilles que nous consommons sont importées ! Ces petits fruits rouges venus de l’étranger répondent à une demande croissante : les volumes de framboises consommées en France ont bondi de 10 %, de 2016 à 2022. Ceux de la myrtille ont été multipliés par six entre 2015 et 2021 (1).
La production locale décolle, elle, tout doucement. Pour suivre cette tendance et élargir sa gamme, la marque de producteurs bretons Prince de Bretagne (2) souhaite créer sa propre filière.
Prince de Bretagne achetait déjà des myrtilles et framboises françaises mais a souhaité un « sourcing breton », indique Patrick Guivarc’h, responsable de la diversification à la Sica de Saint-Pol-de-Léon, dans un communiqué.
Pour cela, la structure collabore depuis 2020 avec la station expérimentale du Caté (Comité d’action technique et économique), à SaintPol-de-Léon. Les producteurs se sont lancés un an plus tard.
4 tonnes de framboises, 20 de myrtilles
Deux d’entre eux cultivent 1 500 m² de framboises, en pot et sous abri. Ils vont pouvoir récolter quatre tonnes en 2024. Le fruit sera sur les étals de mi-mai à mi-septembre.
Pour la myrtille, six producteurs se sont lancés en plein champ et en pot. Vingt à vingt-deux tonnes sont prévues, à écouler pendant le mois d’août 2024, contre six tonnes en
2023. Chaque hectare de culture peut accueillir 4 000 pieds.
« La myrtille nécessite plus d’investissements de départ que la framboise, qui est produite par les maraîchers déjà dotés de tunnels et de gouttes à gouttes pour d’autres cultures, comme la fraise. Mais sa culture de plein champ permet de se diversifier », précise Myriam Abgrall, chargée des essais au Caté.
Les recherches continuent à la station expérimentale. Derrière des voilages, toute une parcelle d’arbustes, qui peuvent atteindre les 2 m de haut, donnera des myrtilles d’ici le mois d’août. « C’est la troisième vraie récolte et on atteindra le rendement maximum l’an prochain », explique l’ingénieure.
Cette culture très fragile nécessite « un sol très acide et drainant », présent dans les monts d’Arrée, mais qui n’existe pas dans la zone légumière léonarde. « La culture en pot est très innovante, elle est peu faite en France et à l’international », précise-t-elle.
Un paillage en écorce de chêne a résolu la contrainte du désherbage manuel. Au-dessus, les voilages protègent de la grêle et filtrent les rayons du soleil, la myrtille étant une culture « de semi-ombrage ». Sur les côtés, ils protègent du vent et évitent les chutes de fruit. Ces protections tiennent aussi les oiseaux à bonne distance.
Myriam Abgrall expérimente actuellement trois tailles différentes : « Une très faible avec forte charge, une modérée et une sévère pour diminuer le nombre de fleurs sur le plant. Grâce à la bibliographie, on sait que plus il y a des charges, plus les fruits sont petits et il peut y avoir des problèmes, développe-t-elle. Ce n’est pas parce qu’on a plus de fruits, qu’on a plus de kilos et de rendement. »
L’irrigation est aussi en cours de perfectionnement grâce à des tensiomètres et des sondes capacitives. « La myrtille ne supporte pas d’avoir ni trop ni pas assez d’eau. L’objectif est de savoir quand déclencher l’arrosage en fonction des valeurs du tensiomètre et des moments de la journée », complète Myriam Abgrall. La saisonnalité de la myrtille s’étend normalement de la fin mai jusqu’au début du mois de septembre. Le Caté a misé sur deux variétés tardives : août et début septembre. «Ona fait ce choix car on travaille avec des producteurs de choux, qui plantent en juillet. Il y avait un créneau à exploiter en août. » Trois nouvelles variétés, moins tardives, vont être testées. (1) Données du Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CITLF).
(2) Prince de Bretagne est la marque de l’association Cerafel, qui regroupe les coopératives Sica de Saint-Polde-Léon, Les Maraîchers d’Armor à Paimpol (Côtes-d’Armor) et Terres de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine).