Un éleveur breton mise tout sur le porc en circuit court
A l’occasion du Salon de l’agriculture, «20 Minutes» a rencontré des agriculteurs qui ont changé de modèle
Il ne s’était jamais imaginé paysan. Jamais. Pas même quand il était gamin et que ses parents exploitaient la ferme dans laquelle il a grandi à Retiers, au sud de Rennes. Mais, après avoir passé quinze ans en ville, Régis Després a succombé aux charmes de la campagne. Alors qu’il approchait de la quarantaine, l’ancien éducateur spécialisé a annoncé à ses parents qu’il souhaitait remettre la ferme familiale sur pied pour élever des cochons. « Mon père est tombé de l’armoire, raconte l’agriculteur, sourire en coin. Il ne s’imaginait pas que je puisse reprendre. »
Ballottés de crise en crise, ses parents avaient fini par abandonner l’exploitation. «Mon père s’occupait des champs le samedi, parce qu’il aimait ça et qu’il avait grandi dedans, raconte Régis Després. Mais la ferme allait mourir, il le savait. C’était douloureux pour lui, il avait fait toute sa vie ici. »
Lorsqu’il a décidé de reprendre l’exploitation, Régis Després n’a pas hésité et s’est tourné vers le circuit court. Depuis 2016, c’est lui qui cultive les céréales qui nourrissent ses cochons. C’est aussi lui qui a choisi l’abattoir, les bouchers et les ateliers de transformation. Et c’est surtout lui qui fixe son prix de vente auprès des professionnels qu’il livre. Quand il s’est lancé, l’agriculteur n’imaginait pas nouer un contrat avec la Cooperl, le mastodonte du porc établi en Bretagne avec qui ses parents ont traité pendant des années : « Je ne me voyais pas m’endetter pour tout mettre aux normes. Je ne pense pas que j’aurais été heureux. Mais je ne veux pas porter de jugement sur les autres modèles. Chacun fait son choix. Il n’y a pas qu’un modèle agricole.»
En plus d’élever des porcs sur paille, Régis Després accueille depuis quelques années des poulets qu’il élève en plein air, sur le même modèle que ses cochons. Une charge de travail en plus mais qui lui permet de passer l’hiver plus sereinement, quand sa viande porcine est moins demandée. Avec ses bêtes, l’éleveur parvient à se dégager «un petit salaire», mais doit encore compter sur sa mère, qui l’aide, et sur Lucie, sa jeune apprentie. S’il revendique une « agriculture raisonnée », le paysan breton espère un jour ne plus avoir à traiter ses céréales pour passer à un modèle biologique. « Mais du vrai, du local, pas du bio qui vient d’Espagne », relève-t-il. Il n’en est pas là pour l’heure : « Si je passe en bio, je perds la moitié de mes cultures. Il faudra que j’en achète. J’ai déjà demandé à mes restaurateurs s’ils me suivraient si j’étais 2 € plus cher au kilo, mais que je passais en bio.» Et la réponse était non. A Rennes, Camille Allain
« Si je passe en bio, je perds la moitié de mes cultures. » Régis Després,
agriculteur breton