Le coronavirus en grand vainqueur
Alors que le scrutin a été marqué par une abstention record, le second tour est en suspens
Il est « important de voter dans ces moments-là». Emmanuel Macron a bien tenté d’inciter les Français à se rendre aux urnes dimanche depuis Le Touquet (Pas-de-Calais), où le chef de l’Etat est inscrit sur les listes. Mais le contexte de pandémie de coronavirus semble l’avoir emporté sur le rendez-vous démocratique. Avec une abstention record pour le premier tour des municipales dimanche, entre 53,5 % et 56 %, son appel n’a pas été entendu par les électeurs. L’exécutif se retrouve sous pression après avoir choisi de maintenir ce premier tour malgré le contexte sanitaire. Sur les plateaux, les responsables politiques préféraient s’exprimer sur l’urgence de la crise sanitaire plutôt que de commenter les résultats de leurs formations politiques.
Demandes de report
« Un jour, le bilan devra être tiré des décisions prises par le président, et de celles qui n’ont pas été prises », a prévenu Marine Le Pen. Evoquant « une guerre sanitaire », la présidente du Rassemblement national a appelé au report du second tour, prévu dimanche prochain. Une demande également faite par de nombreux membres de l’opposition, du chef des députés LR,
Damien Abad, à l’eurodéputé EELV Yannick Jadot. «Si le gouvernement décide le confinement et le report du second tour, il doit le faire le plus vite possible », a également lancé le patron des insoumis, Jean-Luc Mélenchon, rejoint sur ce point par le premier secrétaire du PS, Olivier Faure. La majorité a une nouvelle fois justifié le maintien du premier tour en disant s’être référé à l’avis de responsables de santé. Olivier Véran, le ministre de la Santé, doit tenir une conférence de presse ce lundi avec certains membres du conseil scientifique pour expliquer cette décision.
Mais, avec l’accélération de la diffusion du virus (lire ci-contre) et l’hypothèse d’un prochain confinement du pays, une forte interrogation pèse sur la possibilité de conclure le scrutin dimanche prochain. « Le taux d’abstention élevé que nous enregistrons témoigne de l’inquiétude grandissante de nos concitoyens face à l’épidémie qui nous frappe», a convenu Edouard Philippe depuis Le Havre (Seine-Maritime). «C’est en prenant en compte l’avis des autorités sanitaires que nous nous organiserons pour le second tour», a ajouté le Premier ministre, indiquant vouloir consulter comité scientifique et forces politiques en «toute transparence ». La décision de maintenir ou non le scrutin devrait être prise mardi par l’exécutif.
Le bilan s’alourdit. L’épidémie de coronavirus a fait 127 morts en France, soit 36 de plus que samedi, et 5 423 cas de contamination ont été confirmés, soit plus de 900 cas supplémentaires en un jour, selon le comptage de Santé publique France. Cette hausse est la plus importante enregistrée en un jour dans l’Hexagone depuis l’apparition du virus sur le territoire. Après les déclarations samedi d’Edouard Philippe, qui a annoncé la fermeture jusqu’à nouvel ordre des lieux recevant du public non indispensables à la vie du pays, les ministres ont décidé du report des examens nationaux et des concours pour ces trois prochaines semaines. De son côté, la Sécurité routière a annoncé le report des examens de permis de conduire à compter de ce lundi, pour une durée indéterminée.
En Europe, la barre des 2000 décès a été franchie. L’Espagne, deuxième pays européen le plus touché après l’Italie, a décidé une quarantaine quasi totale et décrété l’état d’alerte pour quinze jours. De nombreux pays cherchent à se protéger en s’isolant, jusqu’à l’intérieur de l’Union européenne, ce qui met à mal le principe de libre circulation. L’Allemagne et la France vont ainsi fermer partiellement leur frontière commune en n’autorisant le passage qu’aux travailleurs transfrontaliers et aux transports de marchandises.