A pas de fourmi, la Terre perd ses insectes
Animaux La disparition brutale des espèces d’insectes aurait un effet «catastrophique» sur les milieux naturels, alerte une étude
«Les insectes ont longtemps été considérés comme adaptables, très résistants, capables de perdurer malgré l’activité de l’homme. Or, ils sont en train de s’éteindre », observe l’entomologiste Jean-François Silvain. Après la publication d’une étude sur la baisse des populations d’insectes, publiée dimanche dans la revue
Biological Conservation, le président de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) détaille les conséquences potentiellement catastrophiques de la disparition des insectes pour notre vie sur Terre. « Nous vivons dans un monde d’insectes : leur biomasse est bien plus importante que celle des hommes », souligne Jean-François Silvain. « A part la mer, les insectes ont colonisé tous les milieux terrestres, et la diversité de leur mode d’exploitation du milieu fait qu’ils ont des fonctions essentielles dans les écosystèmes. » Des insectes moins nombreux, ou des extinctions d’espèces, provoqueraient des bouleversements sur notre planète.
Les oiseaux en danger
Les insectes sont l’aliment de nombreuses autres espèces. Leur déclin aurait des répercussions sur de nombreux animaux. « Les oiseaux auraient des problèmes pour se nourrir, ainsi que les chauves-souris, les petits mammifères insectivores comme les musaraignes et les grenouilles. Ce déficit d’insectes explique, en partie, les chutes de population d’oiseaux déjà observées en France », précise JeanFrançois Silvain. L’autre rôle clé des insectes est la pollinisation, qui n’est pas l’apanage des abeilles seules. « De très nombreuses plantes sont pollinisées non pas par le vent, mais par des abeilles, des diptères (mouches, moustiques…), des hyménoptères (abeilles, guêpes, fourmis, frelons…), des lépidoptères (papillons) ou des coléoptères (scarabées, coccinelles, hannetons…) », détaille l’entomologiste. Moins d’insectes, cela signifierait que certains végétaux ne seraient plus assez pollinisés, ce qui pourrait priver la planète de fleurs et de fruits, et même de certains légumes. D’autres cultures pourraient être touchées car « les insectes sont des auxiliaires de l’agriculture ». Ils sont également indispensables pour faire disparaître tout un tas de détritus. « Ce sont des décomposeurs de déchets organiques, certains assurent une partie de la décomposition des feuilles mortes, d’autres s’attaquent aux cadavres. Il y a aussi les bousiers, parmi les coléoptères : sans eux, nos pairies ne seraient que des champs de crottes de vaches », prévient JeanFrançois Silvain, qui conclut : « Les insectes sont clés, même si on ne les voit pas. Si cette tendance de baisse se confirme, nous verrons apparaître des problèmes alimentaires et sanitaires majeurs. »