La lutte des familles pour rapatrier leurs proches de Syrie
Justice Les proches de djihadistes français déplorent le manque de considération des autorités à leur égard
«Les seules informations qu’on obtient, c’est en regardant BFMTV », soupire Samira*. Cette mère de famille installée dans le nord de la France n’a plus de nouvelles de son fils depuis décembre. Parti en 2016 avec sa compagne pour rejoindre les rangs de Daesh, il serait détenu par les forces kurdes en Syrie. Sa conjointe, qui a accouché depuis d’un petit garçon, est elle aussi retenue dans un camp dans le nord du pays. Alors que l’option d’un rapatriement de ces ressortissants français était exclue depuis des années, elle serait désormais sérieusement envisagée par le gouvernement français, poussé par l’annonce soudaine d’un retrait de l’armée américaine en zone irako-syrienne. Mais, face à ce changement de position, les familles de ces djihadistes français, qui s’estiment déjà mises de côté par les pouvoirs publics, oscillent entre espoir et inquiétude.
« Fins de non-recevoir »
«Nous n’arrêtons pas de prendre contact avec les autorités pour soulever la question du retour, en particulier celui des enfants toujours détenus en Syrie. Jusqu’à présent, nous n’avons obtenu que des fins de non-recevoir», déplore Thierry Roy. Père d’un garçon décédé après s’être engagé dans les rangs de Daesh, il est membre du collectif Familles unies, qui regroupe près de 70 familles françaises de proches ayant rejoint l’organisation djihadiste. Les quelques courriers renvoyés au collectif par les cabinets des différents ministères, et consultés par 20 Minutes, évoquent des «contraintes d’agenda» ou renvoient vers le tout récent secrétariat d’Etat chargé de la Protection de l’enfance.
L’hypothèse d’un rapatriement par l’intermédiaire des forces spéciales américaines d’«environ 150» Français détenus en Syrie a suscité chez Samira des sentiments mitigés : «J’ai d’abord été euphorique. Puis on a appris par la presse que l’option d’en transférer certains en Irak pour y être jugés était aussi examinée. Alors je reste sur mes gardes.» Depuis la capture de son fils, la quadragénaire déplore l’isolement dans lequel est plongée sa famille : «C’est le silence complet. On ne sait rien. Personne ne veut nous recevoir. On se pose évidemment plein de questions : est-ce qu’on sera averti en cas d’un rapatriement? Est-ce qu’on pourra voir notre petit-fils? »
Au flou logistique s’ajoute le sentiment d’un manque de considération : «On ne nous envisage pas comme des victimes collatérales. Pourtant, malgré les signalements de radicalisation par certains parents, les autorités les ont laissé partir. Mais on a besoin de comprendre!» insiste Samira. Une «nécessité», appuie Thierry Roy : «Nous aussi sommes en quête de vérité. Nous militons pour un rapatriement des enfants, mais ils doivent rentrer avec leurs parents. Lorsque la justice sera saisie, ils devront répondre de leurs actes devant les tribunaux.» Contactés, ni le secrétariat d’Etat chargé de la Protection de l’enfance ni le Quai d’Orsay n’ont répondu à nos sollicitations.