Dorénavant, ça se presse moins
Covid-19 L’épidémie a redessiné la couverture médiatique des événements et a restreint les accès aux sportifs depuis la reprise des compétitions
Depuis la rentrée internationale de septembre, les médias n’ont plus le droit de venir à Clairefontaine pour y voir les Bleus, en raison du contexte sanitaire. Certes, le sélectionneur, Didier Deschamps, donne de sa personne en venant taper la causette par écrans interposés presque tous les jours, mais les soirs de match, c’est léger. De manière générale, ceux qui jouaient le jeu (et c’était plutôt le cas des Bleus) sont désormais plus difficiles à attraper. Samedi, à Toulouse, malgré les demandes des quelques journalistes présents, Valenciennes n’a pas envoyé son capitaine Joffrey Cuffaut, qui venait pourtant de marquer quatre buts dans un match ahurissant (4-5). Une conversation qui, on ose l’avancer, aurait intéressé les supporteurs de VA, au moins. Plus globalement, la disparition des zones mixtes, où la presse rencontre les sportifs, marque la fin des petites confidences en off recueillies en catimini. « Les athlètes peuvent désormais s’adresser à leurs fans directement sur les réseaux sociaux, et les clubs peuvent vendre des interviews exclusives via leurs propres canaux de diffusion, mais c’est bien l’analyse journalistique qui ajoute de la profondeur à la couverture et à la narration de l’actualité sportive, expliquait le journaliste Shinsuke Kobayashi, en juillet, à l’Association internationale de la presse sportive. Ce sont les journalistes qui peuvent raconter ce qui se déroule en coulisses. Ne laissons pas les clubs et les institutions nous mettre de côté dans le monde postCovid.»
«J’ai envie d’être avec vous»
Davantage encore que le tarissement des moments d’échanges en direct, c’est bien l’avènement des visioconférences qui a tout changé. A Roland-Garros, un des rares événements sportifs où l’exercice médiatique veut encore dire quelque chose, une conf de presse avec Nadal ou Djokovic peut durer une bonne demi-heure, et l’intimité professionnelle de ces grands champions avec certains suiveurs offre souvent de jolies pépites. Mais dans une salle vide et froide comme un bloc opératoire, les athlètes, obligés de regarder un écran de télévision devant eux, ont beaucoup plus de mal à se livrer. Pour Pauline Parmentier, qui disputait son dernier tournoi, c’était un crève-coeur de ne pas pouvoir partager sa dernière apparition médiatique, tard le soir : «Pourquoi vous n’êtes pas là? J’ai envie d’être avec vous.» Heureusement, l’expertise journalistique est encore recherchée par nombre de lecteurs, auditeurs et spectateurs. Certains sportifs en ont conscience, à l’image du coureur Guillaume Martin, qui nous invitait, pendant le Tour de France, à garder notre vigilance : «Je n’ai pas envie que le cyclisme devienne la F1 ou le football, qu’on soit amenés à tenir tout le temps des propos aseptisés dont coureurs et journalistes s’accommodent. J’ai peur que certaines équipes profitent de la situation pour prolonger les règles mises en place à cause du Covid. »