Le monde syndical est dérouté par le gouvernement
Les signaux contradictoires du gouvernement sur le sujet inquiètent les syndicats
Entre les manifestations des « gilets jaunes » et les conclusions attendues du grand débat national, les syndicats veulent se faire entendre. Ce mardi, FO et la CGT seront dans la rue en compagnie de Solidaires, de la FSU, de l’Unef et de l’UNL pour une journée de grève interprofessionnelle. Le mot d’ordre, «amplifier le mouvement social», est large, et les revendications sont nombreuses : augmentation du Smic, égalité des salaires entre les femmes et les hommes, mais aussi défense des retraites. Sur ce dernier point, les dernières sorties gouvernementales ont un peu dérouté le monde syndical. Dimanche, par exemple, Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, a expliqué que, à «titre personnel», elle estimait «qu’un jour, nous serons obligés de travailler plus longtemps, sinon notre système de retraite ne pourra pas tenir». «Les masquent tombent», a twitté Yves Veyrier, numéro 1 de FO. Il faut dire que, jusqu’à présent, l’exécutif avançait prudemment sur le dossier. Jean-Paul Delevoye, le haut-commissaire en charge de la question, a souvent répété qu’il n’était pas question de toucher à l’âge légal de départ à la retraite (62 ans pour l’instant). Lundi, il s’est même dit « très surpris » des propos de la ministre. Pour autant, cela ne veut pas dire que le gouvernement ne réfléchit pas à un aménagement du système actuel.
Fin 2018, Les Echos affirmaient que l’idée d’un «âge pivot» était étudiée. Cela consiste à fixer un âge de départ en dessous duquel le futur retraité subit une décote de sa pension. Par exemple, dans le cas où l’âge pivot serait fixé à 63 ans, les personnes faisant valoir leur droit à la retraite à 62 ans n’auraient droit qu’à 90 % de leur pension. Un système subtil, qui permet de ne pas toucher à l’âge officiel de départ… tout en créant une incitation financière pour décaler sa retraite.
Les syndicats ont aussi été estomaqués par la proposition d’Edouard Philippe, la semaine dernière. Le Premier ministre s’est montré ouvert à l’idée d’indexer les petites pensions de retraite sur l’inflation. Une position à l’opposé de celle qu’il défendait il y a quelques mois, lorsque le gouvernement avait décidé de revaloriser les pensions de seulement 0,3 % en 2019, alors que l’inflation était largement supérieure. Les syndicats de retraités sont préoccupés par les possibles conséquences d’une telle décision. Pour Pascal Santoni, de l’UCR-CGT, une réindexation différenciée entre les « petites » retraites et les autres serait « largement insuffisante ». Elle serait aussi «incohérente et assez dangereuse», car « elle tendrait à diviser une fois de plus les retraités », après la baisse du taux de CSG concédée en fin d’année. Pour connaître les orientations définitives du gouvernement sur la réforme des retraites, il faudra attendre la présentation du texte en Conseil des ministres, fin 2019. Les syndicats prévoient d’ores et déjà une mobilisation spécifique des retraités pour le 11 avril.
Nicolas Raffin
Une réindexation différenciée entre les « petites retraites » et les autres serait « insuffisante », voire « dangereuse ».
Pascal Santoni, UCR-CGT