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Les chansons préférées de Jean-Marc Vallée au Festival de Jazz de Montréal

- Élise Jetté

Comme un CD gravé à un ami cher, une liste de mu‐ sique où chaque pièce a été choisie avec soin… Le spec‐ tacle Mixtape : un hom‐

mage musical à Jean-Marc Vallée a ouvert avec puis‐

sance le Festival Interna‐ tional de Jazz de Montréal, jeudi.

Sous la direction artis‐ tique de Beyries et d’Alex, le fils de Jean-Marc Vallée, qui ont également prêté leur voix à l’hommage, Alexandra Stré‐ liski, Elisapie, Martha Wain‐ wright, Patrick Watson, Maxime Le Flaguais, Pilou et Pierre-Luc Brillant se sont re‐ layés sur la scène de la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts pour interpréte­r des morceaux marquants qui ont retenti jadis dans les oeuvres de Jean-Marc Vallée tout comme dans sa vie.

Les images clés des his‐ toires ficelées pour l’écran par le cinéaste décédé le 25 décembre 2021 ont défilé sur des écrans de toutes les tailles suspendus au-dessus de la scène, dans une mise en scène de Marc-André Grondin. Des photos de fa‐ mille ont également sur‐ plombé l'orchestre, tout comme une vidéo de JeanMarc Vallée berçant son nou‐ veau-né.

Des caméras, placées par‐ tout sur la scène ont diffusé régulièrem­ent les images des musiciens, dirigés par JeanPhi Goncalves, comme si nous avions accès à tous les plans de caméra d’un même film musical tourné sous nos yeux.

Je veux trop faire connaître la musique, a-t-on entendu Jean-Marc Vallée dé‐ clarer sur les notes instru‐ mentales de Cold Little Heart, la chanson qu’il avait sélectionn­ée pour le géné‐ rique de sa série Big Little Lies.

Puis Beyries a interprété Don’t d’Elvis Prestley. JeanMarc aurait été ravi. Je dirais même enchanté, de vous voir si nombreux ce soir. Faudrait qu’il vous entende, a dit la chanteuse en encouragea­nt la salle comble à applaudir davantage. S’il avait été une chanson, Jean-Marc Vallée aurait été le choeur dans Har‐ vest Moon, à 51 secondes, a déclaré Beyries avant de chanter le classique de Neil

Young.

La vie dans le cinéma et le cinéma dans la vie

Renversant par sa ma‐ nière de choisir la musique avec le coeur, Jean-Marc Val‐ lée n’a pas puisé sa passion dans une boîte de céréales. Ma mère a rencontré mon père dans un magasin de disques où il travaillai­t, a-t-on entendu, la voix hors champ du défunt cinéaste précisant que sa mère s’en allait alors acheter What a Difference a Day Make de Dinah Washing‐ ton. C’est Martha Wainwright qui a fait son entrée pour in‐ terpréter la chanson popula‐ risée en 1959.

Puis, elle a enchaîné avec une pièce phare de son propre répertoire, Bloody Mother Fucking Asshole, qu’on peut notamment en‐ tendre dans Big Little Lies.

Pour nous plonger habile‐ ment en 2005 dans le film C.R.A.Z.Y., Pierre-Luc Brillant a chanté Space Oddity de Da‐ vid Bowie, puis tous les liens pères-fils réels et fictifs se sont fondus les uns dans les autres alors que Maxime Le Flaguais, le fils de Michel Côté, est monté sur scène pour dire les paroles de Hier encore d’Aznavour, sans les chanter, un texte qui était si bien chanté par son propre père, décédé en mai 2023, dans le film C.R.A.Z.Y. Sur une ambiance sonore jazz feutrée d u groupe islandais Sigur Rós, il a dit et redit hier en‐ core, j’avais vingt ans, je ca‐ ressais le temps, devant des images du film.

Devant une vidéo de son père et lui, bébé, Alex Vallée a interprété I’m Losing You de John Lennon et Yoko Ono.

Entouré des choristes de l’orchestre, Pilou s'est élancé avec River de Leon Bridges. Puis c’est le chef de choeur Franck Julien qui a chanté Cold Little Heart après qu’on ait entendu la voix de JeanMarc Vallée, lançant maints éloges à la pièce musicale de Michael Kiwanuka.

Je pense que j’aime mieux la musique que le ci‐ néma

Alexandra Stréliski a ra‐ conté sa première rencontre avec le réalisateu­r : Il m’avait invitée chez lui et il avait commandé des salades fat‐ touches , a-t-elle raconté, amusée. Comme les salades étaient très bonnes, la pia‐ niste lui a dit : Je pense que j’aime mieux la bouffe que la musique. Il a répondu : Je pense que j’aime mieux la musique que le cinéma.

Après deux de ses propres pièces, Alexandra Stréliski a accompagné Les Petits Chanteurs du MontRoyal qui ont entonné Creep de Radiohead. Il y avait quelque chose de grandiose à entendre une quinzaine de jeunes garçons soufflant avec des voix d’anges what the hell am i doing here?

Patrick Watson a fait son entrée pour offrir au public The Great Escape, son succès de 2006, toujours en compa‐ gnie des enfants, cette fois attroupés autour du piano. L’auteur-compositeu­r-inter‐ prète s’est rappelé Jean-Marc Vallée qui comme lui, parlait beaucoup, un peu comme un fou. La dernière fois qu’on s’est parlé, on voulait écrire une comédie musicale en‐ semble, a-t-il soufflé, attristé de ne pouvoir accomplir ce rêve.

Elisapie a offert Crazy de Patsy Cline et une chanson d’amour qui fait fondre la neige, Navvaatara, que JeanMarc Vallée avait incluses dans son film Café de Flore, en 2011.

Beyries est revenu pour une chanson écrite avec Maxime Le Flaguais, Vallées, qui se trouve sur son album Du feu dans les lilas. Pilou a rappliqué pour Tout écartillé de Robert Charlebois et Elisa‐ pie a commandé sans un mot un silence parfait en chantant Qaisimalau­rittuq, sa version en inuktitut de Wish You Were Here.

Celle-ci a été conclue en anglais avec quelques autres artistes de l’hommage, reve‐ nus sur scène. Elisapie a en‐ couragé le public à joindre sa voix au spectacle pour un dernier choeur qui terminait le succès de Pink Floyd. Les convives ont chanté douce‐ ment comme si elles réci‐ taient une prière d’aucune re‐ ligion, sinon peut-être celle de la musique.

Pour célébrer Jean-Marc Vallée et son amour de la fête une dernière fois, la foule a quitté les lieux sur Sympathy for the Devil des Rolling Stones, interprété­e par l’ensemble de la troupe.

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