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Hausse record des ventes d’armes en Europe

- Ximena Sampson

La guerre en Ukraine a des répercussi­ons importante­s sur les transferts d’armes internatio­naux. Les pays européens ont presque doublé leurs importatio­ns au cours des dernières an‐ nées, selon les données de l’Institut internatio­nal de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI) publiées lundi.

Selon ce rapport, les États-Unis demeurent le prin‐ cipal exportateu­r mondial d’armes, alors que la Russie voit sa part des ventes mon‐ diales baisser au profit de la France, notamment.

Le volume mondial des transferts internatio­naux a diminué de 3,3 % entre 20142018 et 2019-2023, mais cette tendance globale cache des différence­s importante­s entre les régions. De plus, malgré cette réduction, les exportatio­ns d’armes ma‐ jeures (avions, navires, sousmarins, missiles, etc.) sont quand même supérieure­s à celles de la période 20092013.

On a atteint une sorte de plateau, mais rien ne dit que cela n’augmentera pas à l’avenir, souligne George Ma‐ thew, directeur du pro‐ gramme de transferts d'armes du SIPRI.

Domination américaine

Les États-Unis consoliden­t leur position de premier ex‐ portateur mondial avec 42 % du volume total de ventes d’armes. Ils en ont vendu à 107 pays en 2019-2023, ce qui est plus que la somme des deux plus grands expor‐ tateurs suivants combinés.

Les exportatio­ns améri‐ caines ont augmenté de 17 % au cours de la période. Les principaux acheteurs se trou‐ vaient au Moyen-Orient (38 %), en Asie et Océanie (31 %) et en Europe (28 %). Les avions de combat, surtout les F-35, ont représenté une part substantie­lle des exporta‐ tions américaine­s.

La France a dépassé la Russie, devenant ainsi le deuxième plus grand expor‐ tateur d’armes au monde, quoique loin derrière les États-Unis. Paris a exporté vers 64 États en 2019-2023, surtout en Asie et Océanie et au Moyen-Orient. La France a surtout vendu des avions de combat Rafale et des navires militaires.

À l’inverse, les exporta‐ tions de la Russie ont baissé de 53 % durant cette période. Alors qu’elle exportait vers 31 États en 2019, il n’y avait plus que 12 importateu­rs d’armes russes en 2023. Les princi‐ paux importateu­rs d’armes russes étaient l’Inde (34 %), la Chine (21 %) et l’Égypte (7,5 %).

Est-ce l’effet des sanctions occidental­es? Pas seulement, estime George Mathew. La pression exercée par les

États-Unis sur ses alliés pour qu’ils n'achètent pas d’armes russes a pu jouer un rôle, ajoutée au fait que la Russie se concentre sur son propre approvisio­nnement, dans le contexte de la guerre qu’elle mène en Ukraine.

Importatio­ns péennes toujours hausse euro‐ en

L’Ukraine qui, justement, a entraîné vers le haut le vo‐ lume des importatio­ns euro‐ péennes, en hausse de 94 % en 2019-2023 par rapport à 2014-2018. Le pays repré‐ sente maintenant à lui seul près de 5 % des importatio­ns mondiales d’armes, contre 0,1 % dans la période anté‐ rieure à l’invasion russe. Il est devenu le plus grand impor‐ tateur d’armes du continent européen (avec 23 % du to‐ tal) et le 4e au monde pen‐ dant la période 2019-2023.

D’autres pays européens, comme les Pays-Bas, la Po‐ logne, la Roumanie, la Nor‐ vège et l’Allemagne, ont éga‐ lement connu des hausses si‐ gnificativ­es de leurs importa‐ tions d’armes. Dans tous ces cas, les États-Unis sont le principal fournisseu­r.

Même avant l’invasion de février 2022, les quantités d’armes entrant en Europe étaient assez élevées, sou‐ ligne M. Mathew. Les impor‐ tations massives auxquelles nous assistons aujourd’hui sont davantage une réaction à l’invasion de la Crimée [en 2014].

Une situation qui pourrait changer plus tôt que tard si les souhaits de la Commis‐ sion européenne se réalisent. Celle-ci vient en effet de pro‐ poser une nouvelle stratégie industriel­le de défense afin d’encourager les États membres à commander la moitié de leurs équipement­s militaires auprès de l’indus‐ trie européenne d’ici 2030.

L’objectif est d’être prêts face à la menace russe tout en réduisant la dépendance vis-à-vis des États-Unis.

En 2019-2023, les ÉtatsUnis ont fourni 55 % des im‐ portations d’armes euro‐ péennes, l’Allemagne arrivant loin derrière avec 6,4 % et la France 4,6 %.

Autres tendances tables no‐

Trois pays du MoyenOrien­t se sont classés parmi les 10 premiers importateu­rs en 2019-2023 : l’Arabie saou‐ dite, le Qatar et l’Égypte. L’Arabie saoudite a connu une baisse importante (-28 %), mais elle vient après une hausse record en 2014-2018. Le royaume demeure le deuxième importateu­r au ni‐ veau mondial.

La tendance des voisins de la Chine à s’armer se poursuit. Le Japon (155 %) et les Philippine­s (105 %) ont fortement augmenté leurs importatio­ns pendant la pé‐ riode.

Depuis plus d’une décen‐ nie, il y a une méfiance crois‐ sante à l’égard de la Chine et de ses capacités militaires, qui s’ajoutent à ses revendi‐ cations territoria­les, ses am‐ bitions et son comporteme­nt de grande puissance, note M. Mathew.

La Chine, pour sa part, a fortement diminué ses im‐ portations (-44 %). Elle ne re‐ présente plus que 2,9 % du total mondial.

Cela s’explique par sa vo‐ lonté de devenir moins dé‐ pendante. L'autosuffis­ance est un objectif que de nom‐ breux pays tentent d'at‐ teindre, mais la Chine a fait de grands progrès en ce sens, notamment en déve‐ loppant sa propre technolo‐ gie, souligne l'expert.

En Afrique, les importa‐ tions ont fortement diminué, menées par les baisses de deux États d’Afrique du Nord : l’Algérie et le Maroc.

Les Amériques ont égale‐ ment réduit leurs achats d’armes. Les États-Unis, le Brésil et le Canada de‐ meurent les principaux ache‐ teurs.

Le Canada a diminué de 44 % ses achats pendant la période 2019-2023. La ten‐ dance devrait toutefois re‐ partir à la hausse, estime l'ex‐ pert du SIPRI, avec les com‐ mandes passées par Ottawa pour des avions de combat F35 et des avions de patrouille maritime P-8A Poseidon.

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