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Pénurie d’hygiéniste­s dentaires au Québec : des profession­nels à la recherche de solutions

- Rebecca Kwan

Une pénurie d’hygiéniste­s dentaires règne actuelle‐ ment au Québec. Selon l’Ordre des hygiéniste­s den‐ taires du Québec (OHDQ), le nombre de finissants en techniques d’hygiène den‐ taire en Outaouais est net‐ tement insuffisan­t pour ré‐ pondre à la demande.

Les gens appellent pour prendre un rendez-vous à leur clinique et on leur dit qu'il n'y a pas de place avant quatre mois, cinq mois, six mois, déplore le président de l’OHDQ, Jean-François Lortie.

Il y a même des endroits dans la province qui [...] n'ac‐ ceptent plus de nouveaux clients, donc pas de place avant un an.

L’offre ne répond plus à la demande, même si on a dé‐ passé le cap des 7000 hygié‐ nistes dentaires au Québec.

Jean-François Lortie, pré‐ sident de l’Ordre des hygié‐ nistes dentaires du Québec

Faute d’hygiéniste­s den‐ taires, certains dentistes sont parfois contraints de refuser des patients ou d'effectuer eux-mêmes des nettoyages.

La province de Québec est en déficit généralisé d'hygié‐ nistes dentaires, explique M. Lortie.

Depuis 2022, c'est l'en‐ semble des régions du Qué‐ bec qui sont touchées. On voyait déjà le phénomène commencer dès 2014-2015, dans les régions éloignées.

Alors que très peu de finis‐ sants en hygiène dentaire sortent du Cégep de l’Ou‐ taouais, d’autres régions du

Québec n’offrent tout simple‐ ment pas ce programme.

Deux rives

Par ailleurs, l’Outaouais est en compétitio­n directe avec l’Ontario, rappelle l'OHDQ, puisque les conditions de tra‐ vail sont bien souvent plus avantageus­es du côté onta‐ rien.

D’après l'OHDQ, il y a ac‐ tuellement 80,2 hygiéniste­s dentaires pour 100 000 habi‐ tants au Québec, comparati‐ vement à 95,8 hygiéniste­s dentaires pour 100 000 habi‐ tants en Ontario.

Si on se compare à l'Onta‐ rio, il manque une cinquan‐ taine d’hygiéniste­s dentaires aujourd’hui, calcule M. Lortie.

Il rappelle que la santé buccodenta­ire des Québécois est de plus en plus avancée, ce qui explique pourquoi la demande en soins préventifs est vraiment plus forte qu’elle l'était il y a 10 ans, il y a 15 ans ou il y a 20 ans.

La population au Québec est plus éduquée, fait plus at‐ tention à sa santé. La bouche en fait partie, donc tous les messages de prévention fonc‐ tionnent.

Jean-François Lortie, pré‐ sident de l’Ordre des hygié‐ nistes dentaires du Québec

Selon l’Associatio­n des chi‐ rurgiens dentistes du Québec, il manquerait de 800 à 900 hy‐ giénistes dentaires dans la province, d’après la moyenne canadienne. L’OHDQ délivre pour sa part de 200 à 300 per‐ mis par an.

Au total, 279 permis ont été délivrés entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023, selon l’OHDQ. L'Ordre des hygié‐ nistes dentaires de l'Ontario a pour sa part délivré 931 nou‐ veaux permis en 2022.

Solutions de rechange

Le président de l’Associa‐ tion des chirurgien­s dentistes du Québec, Carl Tremblay, ap‐ pelle le gouverneme­nt du Québec à ouvrir de nouveaux programmes en hygiène den‐ taire ou à recruter à l’étranger.

Certains dentistes vont prendre une partie de leur temps pour se concentrer sur l’hygiène des patients, ex‐ plique-t-il. Bien entendu, ça crée un goulot d’étrangle‐ ment, parce que pendant ce temps-là, le dentiste n'offre pas les soins curatifs qu'il est le seul à pouvoir faire.

La directrice générale de l’Associatio­n des dentistes propriétai­res du Québec, Ca‐ therine Lessard, abonde dans ce sens.

Selon elle, cette pénurie a inévitable­ment des répercus‐ sions sur le travail des den‐ tistes. Pas d’hygiéniste­s, pas de patients qui entrent dans la clinique, donc pas de pa‐ tients qui reviennent sur nos chaises de dentiste.

Ça a un grand impact sur la rentabilit­é et le fonctionne‐ ment de la clinique.

Catherine Lessard, direc‐ trice générale de l’Associatio­n des dentistes propriétai­res du Québec

Dans certains cas, les pa‐ tients se tournent vers des cli‐ niques en pratique indépen‐ dante, permises depuis 2020.

Des cliniques en pratique indépendan­te, ça a son im‐ portance, parce que ça donne une offre de service plus ac‐ cessible, fait valoir Isabelle Tremblay, une hygiéniste den‐ taire en pratique indépen‐ dante à Gatineau.

Mme Tremblay fait remar‐ quer qu’une personne qui a besoin d’être vue plus réguliè‐ rement peut facilement souf‐ frir du manque d’hygiéniste­s dentaires dans la région.

Beaucoup de gens [ap‐ pellent] ici pour prendre ren‐ dez-vous [et] me [disent] : "Mon dentiste n’est pas ca‐ pable de me voir, l'hygiéniste n'est pas là."

Avec les informatio­ns d’Anne-Charlotte Carignan

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