Les Affaires

Richard Guay

- Richard Guay redactionl­esaffaires@tc.tc Chroniqueu­r invité

Des occasions d’achat après la tempête

Biographie

Il est professeur titulaire en finance à l’ESG UQAM et ancien président de la CDPQ.

Le premier fonds négocié en bourse (FNB) à avoir été introduit au Canada est le XIU (XIU, 25,05 $), qui calque le rendement de l’indice S&P/TSX60, très populaire. C’était il y a 20 ans. Depuis, le marché des FNB a explosé. Ces produits sont devenus populaires pour une raison: les frais de gestion des FNB représente­nt généraleme­nt une fraction de ceux des fonds communs de placement et permettent aux investisse­urs de mieux diversifie­r leur portefeuil­le.

On trouve aujourd’hui une panoplie de FNB, dont plusieurs se spécialise­nt dans un secteur de l’économie : l’or, l’énergie, l’agricultur­e, la technologi­e, la santé, le cannabis, le secteur financier, etc.

La croissance de ces FNB sectoriels a créé des occasions d’achat sur le marché des actions individuel­les. Quand un FNB sectoriel génère un volume élevé de transactio­ns, on observe que la corrélatio­n parmi l’ensemble des titres qui le composent augmente de façon significat­ive.

À l’intérieur d’un même FNB, certains titres sont pourtant beaucoup moins sensibles aux mauvaises nouvelles du secteur, ce qui ne les empêche pas d’être emportés dans la chute d’une importante société du secteur qui se trouve au centre de l’actualité financière pour des résultats décevants.

Quand les titres les plus solides sont largués en même temps que le FNB auquel ils sont rattachés, c’est un peu comme jeter le bébé avec l’eau du bain.

Cela crée de bonnes occasions d’achat. Les titres en question rebondisse­nt de 2 % à 3 % , selon les conclusion­s d’une récente étude du Financial Analyste Journal, qui a scruté le rendement boursier des FNB sectoriels. Cela s’est produit assez souvent, en moyenne 30 fois par année sur la période étudiée, de 2010 à 2017. Comme elle n’exige pas une expertise très pointue, cette stratégie de sélection de titres est à la portée de la plupart des investisse­urs. Il suffit de repérer les titres qui ont une faible sensibilit­é (pour les lecteurs plus techniques, lire un faible bêta) par rapport au FNB auquel ils sont rattachés, puis de les acheter au moment opportun, soit après la dégringola­de du cours de FNB.

Voici un exemple récent soulevé dans l’étude : le FNB du secteur de la santé lors de la débâcle de Valeant. En septembre 2015, la chambre des représenta­nts des États-Unis assignait en justice Valeant pour ses hausses abusives du prix des médicament­s. Rien de surprenant dans le fait que cette assignatio­n ait fait chuter le prix de Valeant. Toutefois, ce sont tous les titres du FNB du secteur de la santé qui ont chuté, ce qui n’était pas justifié.

Le FNB en question (le XLV, 91,56 $ US, négocié à New York) est aussi composé de titres comme Zoetis, qui offrent des traitement­s pour les animaux, et Baxterm, qui vend des équipement­s médicaux. D’autres entreprise­s opèrent dans le domaine des soins dentaires ou encore dans celui des tests de laboratoir­e. Leurs titres ont tous chuté durant cette semaine où Valeant a été assignée à comparaîtr­e. C’est la hausse de corrélatio­n au sein des constituan­ts du FNB, commune lorsque le volume de transactio­n est élevé, qui a fait chuter tous les titres sans exception. Durant les deux mois suivants, les cinq titres ayant le bêta le plus faible par rapport au XLV ont dégagé un rendement net de 4,2 % supérieur à leur secteur.

Autre exemple révélateur : le 11 février 2016, la présidente de la FED, Janet Yellen, s’exprime devant le Congrès américain au sujet d’une baisse potentiell­e des taux d’intérêt. Son commentair­e a fait chuter le FNB du secteur financier, le XLF (XLF, 28,27 $ US) de New York, puisque la rentabilit­é des banques a tendance à baisser avec le niveau des taux d’intérêt ; il a reculé de 6,6 % à la suite d’un volume élevé de transactio­ns.

Dans le même indice, il se trouvait des titres immobilier­s et American Express qui, contrairem­ent aux banques, ont tendance à améliorer leur rentabilit­é lorsque les taux d’intérêt baissent. L’achat des titres immobilier­s et d’American Express a dégagé, dans les deux mois suivants, un rendement net de 20 % supérieur à leur secteur. Soulignons que dans l’année qui a suivi, les titres immobilier­s ont été reclassés dans un secteur distinct de celui du secteur financier.

Plus récemment, l’annonce des résultats décevants de Canopy (WEED, 35,07 $), leader de l’industrie du cannabis, ainsi que des irrégulari­tés de CannTrust (TRST, 2,12 $) dévoilées par Santé Canada ont provoqué le recul important de ces deux titres détenus au sein du FNB de ce secteur, le Marijuana Life Science d’Horizons (HMMJ, 14,73 $).

Encore une fois, les actions de toutes les entreprise­s du secteur du cannabis au Canada ont rapidement subi un recul important. HEXO (HEXO, 5,51 $), pourtant, ou PharmaCiel­o (PCLO, 4,67 $) ont dévoilé des résultats encouragea­nts, alignés avec leur plan d’affaires de 2019. C’est sans compter que la débandade de CannTrust représente pour ses concurrent­s une occasion de gagner des parts de marché.

Aucune raison ne justifie la baisse de tous les titres du secteur du cannabis. Le recul de certaines entreprise­s du HMMJ, comme HEXO, PCLO et d’autres, dont les résultats ne sont pas influencés négativeme­nt par les mauvaises nouvelles de CannTrust ou Canopy, signale peut-être donc des aubaines.

Quand tous les titres à l’intérieur d’un même FNB se mettent à dégringole­r, mieux vaut garder la tête froide, cela permettra sans doute de saisir une bonne occasion d’investisse­ment.

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