Le Journal de Quebec

Le soja et les végétaux pour adoucir la ménopause

-

Une étude clinique randomisée rapporte que les femmes qui adoptent une alimentati­on riche en végétaux et en soja sont beaucoup moins touchées par les bouffées de chaleur typiques de la ménopause.

Les bouffées de chaleur épisodique­s affectent plus de 75 % des femmes qui atteignent l’âge de la ménopause.

Ces sensations de chaleur intense sont fréquemmen­t ressenties au niveau de la poitrine, du cou et du visage, et s’accompagne­nt de sueurs et d’un inconfort généralisé qui affectent le sommeil, l’humeur et le bien-être général.

Les bouffées de chaleur peuvent débuter quelques années avant la ménopause comme telle (définie comme une période de 12 mois sans menstruati­on) et durent généraleme­nt un ou deux ans, mais peuvent parfois continuer à se manifester jusqu’à 30 ans après la ménopause.

D’un point de vue physiologi­que, ces bouffées de chaleur sont ce qu’on appelle des symptômes vasomoteur­s, c’est-à-dire qu’elles sont causées par une dilatation excessive des vaisseaux sanguins.

Les mécanismes exacts semblent impliquer la chute des taux d’estrogènes en circulatio­n qui entraîne un dérèglemen­t du système de contrôle de la températur­e corporelle. L’hypothalam­us du cerveau détecte (à tort) une hausse subite de la températur­e du corps et active les deux systèmes immédiatem­ent impliqués dans la dissipatio­n de cette chaleur, soit la vasodilata­tion des vaisseaux sanguins et la transpirat­ion.

ALIMENTATI­ON ET MÉNOPAUSE

Même si l’hormonothé­rapie demeure le moyen le plus fréquemmen­t utilisé pour traiter les symptômes liés à la ménopause, plusieurs observatio­ns suggèrent que d’autres facteurs, liés au mode de vie, pourraient également jouer un rôle.

Par exemple, une étude réalisée dans les années 1980 au Japon a montré que les Japonaises étaient moins touchées par ces épisodes de bouffées de chaleur que les femmes vivant dans les pays occidentau­x (1), un phénomène également observé dans d’autres pays asiatiques.

Un point commun à ces femmes est la consommati­on abondante d’aliments à base de soja (tofu, miso, tempeh), une légumineus­e contenant des quantités importante­s de phytoestro­gènes comme les isoflavone­s génistéine, daidzéine et la glycitéine.

Une de ces molécules, la daidzéine, est métabolisé­e par les bactéries intestinal­es en équol, un composé non stéroïdien qui se lie aux récepteurs des estrogènes, et il a été proposé que cette interactio­n pourrait aider à atténuer l’impact de la chute des estrogènes qui se produit au cours de la ménopause.

En ce sens, il est intéressan­t de noter que le régime alimentair­e japonais s’est considérab­lement occidental­isé au cours des dernières années (plus de viande, moins de soja) et que cette transition s’est accompagné­e d’une hausse de l’incidence des bouffées de chaleur (2).

RÉDUCTION DES SYMPTÔMES

Les résultats d’une étude clinique randomisée suggèrent que la nature du régime alimentair­e peut effectivem­ent fortement influencer la fréquence et la sévérité des symptômes de la ménopause (3).

Dans cette étude, les chercheurs ont recruté des femmes qui rapportaie­nt deux épisodes ou plus de bouffées de chaleur par jour et les ont séparées de façon aléatoire en deux groupes, soit un groupe contrôle sans modificati­ons à leurs habitudes alimentair­es et un groupe d’interventi­on, où les participan­tes étaient soumises à un régime exclusivem­ent végétal et comprenant ½ tasse de fèves de soja cuites par jour.

Pendant une période de douze semaines, les participan­tes ont recensé les épisodes de bouffées de chaleur à l’aide d’une applicatio­n mobile et l’impact de ces symptômes sur leur qualité de vie a été évalué à l’aide d’un questionna­ire standard ( Menopause Specific Quality of Life Questionna­ire).

Les résultats sont spectacula­ires : la somme des épisodes de bouffées de chaleur a diminué deux fois plus dans le groupe d’interventi­on comparativ­ement au contrôle (79 % vs 49 %), une diminution particuliè­rement marquée pour les épisodes plus sévères (84 % vs 42 %).

Plus intéressan­t encore, au terme de l’étude 59 % des participan­tes du groupe d’interventi­on n’avaient plus aucun épisode de chaleur modéré ou sévère, alors qu’aucun changement n’était observé chez le groupe contrôle.

Ces réductions de la fréquence et de la sévérité des symptômes sont beaucoup plus importante­s que celles observées antérieure­ment lors d’études sur le soja.

Selon les auteurs, il est probable que c’est la combinaiso­n d’un régime riche en végétaux avec le soja qui expliquera­it cette supériorit­é : une alimentati­on principale­ment basée sur la consommati­on de végétaux modifie le microbiome intestinal et favorisera­it l’implantati­on de bactéries spécialisé­es dans la conversion des isoflavone­s en équol, la molécule responsabl­e de leurs effets estrogéniq­ues.

Cette possibilit­é demeure à être établie, mais chose certaine, il s’agit d’une avenue qui mérite d’être explorée par les femmes qui sont aux prises avec des symptômes sévères de la ménopause et qui cherchent un moyen d’améliorer leur qualité de vie.

(1) Lock M. Menopause: lessons from anthropolo­gy. Psychosom Med. 1998 ; 60 : 410-419.

(2) Melby MK. Vasomotor symptom prevalence and language of menopause in Japan. Menopause 2005 ; 12:250-257.

(3) Barnard ND et coll. The Women’s Study for the Alleviatio­n of Vasomotor Symptoms (WAVS): a randomized, controlled trial of a plant-based diet and whole soybeans for postmenopa­usal women. Menopause, publié le 12 juillet 2021.

 ?? PHOTO ADOBE STOCK ??
PHOTO ADOBE STOCK

Newspapers in French

Newspapers from Canada