LES TRIBUNAUX MONTENT LE TON FACE AUX HARCELEURS
Des peines sévères dans deux causes
Les tribunaux serrent maintenant la vis aux harceleurs en ligne, dont le nombre « a pris de l’ampleur depuis quelques années », a prévenu un juge qui en a condamné deux à plus de 13 mois de prison.
« Les tribunaux doivent exprimer dans des termes les plus clairs que ce type d’intimidation ne sera jamais toléré, prévient le juge Dennis Galiatsatos, dans une récente décision. Il est souvent trop facile de se défouler à l’ordinateur en envoyant des messages brutalement blessants et menaçants. »
Le magistrat a prononcé des peines assez sévères de 13 et 14 mois d’emprisonnement à deux harceleurs en ligne, Alex Létourneau et David Vinet, qui avaient envoyé de nombreux messages violents à leurs victimes.
« L’internet, les courriels et les réseaux sociaux ne confèrent aucune immunité aux délinquants », insiste le juge.
3000 À 6000 COURRIELS
En colère contre une clinique médicale de Montréal, Létourneau, 30 ans, a envoyé de 3000 à 6000 courriels à des employés pendant plusieurs mois.
« On remarque très rapidement que les courriels (dont des centaines sont envoyés par jour… parfois à quelques secondes d’intervalle) sont truffés de menaces très explicites. Les propos sont à caractère extrêmement violent. Leur persistance et leur répétition ne font qu’amplifier leur effet terrorisant », explique le juge Galiatsatos.
Même s’il a plaidé coupable, Alex Létourneau n’a jamais éprouvé de remords, blâmant plutôt ses victimes qui avaient cessé de lui répondre, après lui avoir demandé de cesser son manège.
Il a aussi tenté de minimiser l’affaire, prétendant qu’il s’agissait « seulement de propos et non pas de gestes ».
En plus de sa peine d’emprisonnement, une interdiction de contacter ses victimes et d’accéder à leurs profils sur les réseaux sociaux pour trois ans lui a été imposée.
IL MENACE SON AVOCAT
Insatisfait du travail accompli par son avocat dans d’autres dossiers où il a été reconnu coupable, David Vinet, 41 ans, l’a « bombardé » de messages vocaux et par texte durant une soirée en février 2019.
« Les messages sont empreints de paroles agressives et insultantes. L’accusé suggère à la victime d’appeler la police, il menace de le “casser” ou de le “briser comme jamais personne l’a fait” », relate le juge.
Pour se justifier, Vinet a dit vouloir « forcer [son avocat] à communiquer avec lui ». « La méthode douce n’ayant pas fonctionné, j’ai dû utiliser une méthode un peu plus crunchy », a-t-il ajouté au tribunal.
Vinet, qui a déjà voulu payer quelqu’un afin de faire défigurer son ex avec de l’acide, était déjà derrière les barreaux pour trois ans depuis juillet 2020, mais 14 mois vont s’ajouter à cette peine.
L’experte en médias sociaux Michelle Blanc estime que « c’est une excellente chose que la justice dénonce le harcèlement en ligne fermement ».
« Il demeure encore trop difficile de pouvoir porter plainte et d’être pris au sérieux, comme c’est un crime qui ne fait pas qu’on saigne et qui ne laisse pas de marques. Ça prend de meilleures formations », ajoute-t-elle.
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