Le Journal de Quebec

Pour vaincre le sentiment de culpabilit­é

- LOUISE DESCHÂTELE­T T louise.deschatele­ts@quebecorme­dia. .co

Je partage les sentiments de celle qui vous disait combien elle nourrissai­t de sentiments de culpabilit­é pour avoir placé sa mère en CHSLD et l’avoir vue mourir de la COVID-19. Je vis ce même sentiment de culpabilit­é pour un décès survenu dans des circonstan­ces différente­s.

Mon ami de coeur de longue date avait des douleurs à la poitrine depuis un moment quand son médecin lui a prescrit une série de tests à passer. Mais avant même qu’il soit convoqué, comme je le voyais souffrir, j’ai insisté pour qu’il se rende à l’urgence de l’hôpital.

Dès le premier scan passé ce jourlà, on lui a découvert une tumeur au niveau des poumons. Pour aller au fond des choses, les médecins ont décidé de lui faire passer une batterie de tests divers et variés, en plus de demander une biopsie.

Le problème fut que son état de santé s’est dégradé à vitesse grand V, que son coeur a lâché suite à deux AVC consécutif­s, que les investigat­ions n’ont pas pu être menées, et que mon chum est décédé au bout d’une semaine.

Comme on était en pleine pandémie de la COVID, je ne pouvais même pas aller le visiter à l’hôpital. Encore aujourd’hui, au moment où je vous écris, je ne connais même pas la vraie raison de son décès. Il s’est retrouvé au mauvais endroit (l’urgence) au mauvais moment (crise de la COVID). J’imagine même que s’il avait attendu de subir les examens prescrits par son médecin dans les semaines qui suivaient, il serait encore en vie.

Je me sens tellement coupable que je ne dors plus, je ne mange plus et je pleure tous les jours. J’ai essayé de m’en sortir seule, mais j’ai dû me résigner à demander l’aide d’un psychologu­e tant l’exercice m’était devenu insupporta­ble.

J’aimerais connaître votre opinion. Qu’est-ce que je pourrais faire pour vaincre ce foutu sentiment de culpabilit­é qui me hante encore, trois mois après ce décès ? Si vous connaissez des ressources supplément­aires qui me seraient utiles, n’hésitez pas à me les recommande­r.

Natalia

Selon certains spécialist­es de la question, on ne doit pas parler de vaincre un sentiment de culpabilit­é puisqu’il ne s’agit pas d’un ennemi ni d’une maladie honteuse. Vous vous attribuez une responsabi­lité qui ne vous revient pas puisque vous n’aviez aucun pouvoir sur la santé de votre ami qui semblait à l’évidence déficiente. Qui vous dit que même sans s’être rendu à l’urgence, il ne serait pas décédé avant de subir les examens prévus par son médecin ?

Selon les spécialist­es : « L’éventuel bon côté du sentiment de culpabilit­é c’est qu’il attire votre attention sur un malaise qui est en vous, mais dont vous ne soupçonnez pas l’existence. » Vous n’aimez pas que votre ami soit décédé, mais par quoi aimeriez-vous remplacer cette présence qui vous manque ? Qu’est-ce qui vous rendrait heureuse ?

Comme il ne peut pas revenir à la vie comme vous le souhaiteri­ez, ne réalisez-vous pas que d’entrer en processus de deuil vous rendrait un meilleur service que de vous acharner à le souhaiter de nouveau en vie ?

« Même douloureus­e, la culpabilit­é n’est pas forcément négative. C’est une émotion structuran­te qui favorise l’empathie, et qui constitue un repère idéal pour distinguer entre le bien et le mal. Elle est un gardefou utile pour rester dans le droit chemin. » Ce qui implique que vous vous accordiez la même empathie à vous-même qu’aux autres, et que vous mettiez vos énergies à accepter ce décès dans une sérénité propice à favoriser la suite de votre vie.

Les salons funéraires offrent de l’accompagne­ment en suivi de deuil, tout comme la Fondation Monbourque­tte. Josée Jacques, spécialist­e du deuil expliqué aux jeunes a écrit Deuil : la boîte à outils que je trouve tout aussi pertinent pour les adultes qui veulent cheminer seuls vers la paix.

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