Legault accusé de favoriser les gros joueurs durant la crise
Des commerçants d’ici digèrent mal que les grandes bannières restent ouvertes
« EST-CE QUE J’ENGRAISSE ENCORE JEFF BEZOS ? IL Y A UN PROBLÈME D’ACHETER DE FAÇON SOUTENUE CHEZ AMAZON. »
– Frédéric Bourdon, propriétaire de Colobar Peinture & Décoration
Des détaillants d’ici accusent Québec de favoriser les grandes bannières américaines en leur permettant de rester ouvertes durant la crise, alors qu’ils doivent déjà se battre en ligne contre Walmart et Amazon.
« Est-ce que j’engraisse encore Jeff Bezos ? Il y a un problème d’acheter de façon soutenue chez Amazon. Je trouve ça triste pour nos détaillants québécois », déplore Frédéric Bourdon, propriétaire de Colobar Peinture & Décoration, à Laval, qui s’en tire bien grâce à son site web, mais qui craint de voir d’autres commerçants disparaître si les Québécois continuent à acheter sur Amazon.
Une semaine après avoir lancé Le Panier Bleu pour favoriser l’achat local, des détaillants d’ici ne comprennent toujours pas pourquoi Québec permet aux grandes surfaces de vendre des produits non essentiels, alors qu’on les force à rester fermés.
« C’est totalement injuste. On tombe à zéro. On est obligé de fermer nos commerces. On a 170 marchands, déplore Jacques Cloutier, directeur général de la bannière québécoise de couvre-plancher Déco Surfaces. Les consommateurs rentrent là [dans les grandes surfaces] et achètent d’autres produits, dont des couvre-planchers et de la peinture. »
RIEN NE BOUGE
Jeudi dernier, Le Journal a révélé que le Conseil québécois du commerce de détail (CQCD) souhaite fermer certaines sections de magasins à grande surface non essentielles pour aider les commerçants locaux, mais depuis, rien n’a bougé.
« Je viens de passer devant un RONA et un Home Depot, et leur stationnement est plein à craquer, alors que nous, on est obligés de rester fermés », soupire Philippe Chapdelaine, directeur général de Flordeco couvre-planchers et décoration.
Pour le directeur général de Détail Québec, Manuel Champagne, ça ne peut plus durer. « Plus de 90 % des entreprises ici emploient moins de 20 personnes, alors elles n’arrivent pas à faire concurrence aux géants qui offrent de tout. C’est inéquitable », affirme-t-il.
Pire encore, selon lui, non seulement ces grandes surfaces font le plein de clients, mais elles sont de plus en plus agressives avec leurs publicités web pour les attirer.
« Les petits n’ont pas les moyens d’avoir leur propre service de livraison comme Walmart et Amazon, y compris de faire de la publicité à la télévision », ajoute M. Champagne.
Du côté des centres commerciaux, la situation n’est guère mieux. Depuis leur fermeture le 22 mars dernier, plusieurs détaillants québécois peinent à sortir la tête hors de l’eau.
« Notre boutique en ligne ne compense pas pour nos 24 magasins fermés », résume la PDG de Chaussures Panda, Linda Goulet.