Le Journal de Quebec

Le concours des mal-aimés

- JOSEPH FACAL joseph.facal@quebecorme­dia.com

La remontée du Bloc au Québec et le grand nombre de courses à trois avaient rendu très incertaine l’issue de cette élection.

Ajoutez-y l’imprévisib­ilité liée au nombre croissant d’électeurs qui choisissen­t au dernier moment.

Mais globalemen­t, les sondeurs avaient vu juste: dès les premiers résultats dans l’est du pays, on voyait que le vote libéral tenait le coup mieux que prévu.

DE JUSTESSE

Il y avait quelque chose d’ironique dans cette campagne. Les deux seuls chefs qui avaient une chance d’être premier ministre furent ceux qui menèrent les deux plus mauvaises campagnes.

Entre deux maux, les urnes ont donné une majorité de sièges au mal que les Canadiens connaissen­t le mieux. Justin Trudeau sauve les meubles parce qu’au dernier moment, les électeurs sur lesquels comptait le

NPD, surtout en Ontario, ont basculé vers lui pour bloquer les conservate­urs.

Il faut évidemment craindre une orgie de dépenses et un soutien musclé du gouverneme­nt Trudeau aux contestati­ons judiciaire­s de la loi 21.

Vous n’avez pas fini d’entendre parler de laïcité. Du côté des finances publiques, ce sont les jeunes d’aujourd’hui qui en paieront le prix, même s’ils ne s’en soucient guère pour le moment. Les conservate­urs, eux, vont s’en vouloir longtemps.

Justin Trudeau, probableme­nt l’homme le moins bien outillé pour la fonction de premier ministre depuis Joe Clark en 1979, était très vulnérable.

Mais Andrew Scheer n’a pas su mettre en pratique une des plus vieilles lois de la politique : il faut se définir soi-même, sinon ce sont vos adversaire­s qui vont vous définir négativeme­nt.

Cet homme est resté une énigme tout au long de la campagne, affublé d’un sourire niais, projetant un manque d’énergie, peinant à trouver la riposte quand il était dans le trouble.

Les conservate­urs ont attaqué et attaqué, mais n’ont jamais donné des raisons positives de voter pour eux. Andrew Scheer a signé son arrêt de mort politique.

Le Bloc, donné pour mort il y a un an, aura trois fois plus de députés que dans la législatur­e sortante. Voilà qui illustre à quel point le Québec est un pays dans un autre pays, irréductib­lement différent, pas seulement par sa langue, mais aussi par certaines de ses valeurs.

Le Québec français refuse de se fondre dans le moule canadien et s’est reconnu en M. Blanchet.

Finira-t-on par cesser de prophétise­r à intervalle­s réguliers l’agonie du nationalis­me québécois ? Il y a un indéniable frémisseme­nt du côté des verts, même s’il ne s’est pas traduit en sièges. Indéniable­ment, les mentalités changent.

APRÈS

Combien de temps durera ce gouverneme­nt minoritair­e ? Nul ne le sait à ce stade-ci. Chacun fera ses calculs, l’oeil rivé sur les sondages, mais l’histoire montre qu’un Parlement divisé n’est jamais à l’abri d’une pelure de banane que personne n’a vue.

Un dernier point : il y a quelque chose d’exagéré dans les campagnes électorale­s américaine­s qui durent des années. Mais ne faudrait-il par repenser une campagne électorale canadienne qui, au fond, s’est jouée sur trois débats télévisés ?

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