Le Journal de Quebec

Signes religieux : la CAQ devra faire mieux

- RÉMI NADEAU Chef du Bureau parlementa­ire à Québec remi.nadeau @quebecorme­dia.com @RNADEAUJDE­Q

À voir le ministre Simon Jolin-barrette peiner à expliquer le bien fondé de sa réforme en immigratio­n, on peut craindre un accoucheme­nt douloureux pour son projet de loi attendu sur l’interdicti­on du port des signes religieux, qui sème la division même à l’interne.

Le ministre de l’immigratio­n, censé faire partie des meilleurs communicat­eurs du gouverneme­nt Legault, a frappé une fausse balle. Le dépôt de sa législatio­n s’est fait dans le désordre. L’absence de réponses claires et les différente­s interpréta­tions qui en ont découlé ont prêté le flanc à la démonisati­on de la réforme.

En tirant un trait sur les 18000 demandes d’immigratio­n accumulées et non traitées au fil des ans, il était incapable de dire combien d’individus déjà entrés au Québec se trouveraie­nt affectés.

Depuis, toutes les spéculatio­ns sont permises. Le PLQ a eu beau jeu de décrier une situation « inhumaine ». On pouvait imaginer des milliers de personnes pleines d’espoir chassées par un ministre sans coeur, aveuglé par le dogme d’une immigratio­n uniquement basée sur les besoins de main-d’oeuvre.

Trois jours plus tard, son bureau a fourni des chiffres dans la confusion. Selon un calcul basé sur une moyenne, 5500 personnes vivraient déjà ici et seraient forcées de reprendre leur demande du début. Le drame, c’est que la CAQ ne le savait pas en présentant un projet de loi aussi important. Elle n’avait pas mesuré l’impact de sa décision. Et on ne parle pas encore des tests de valeurs et de français. Pour imposer des conditions à l’obtention de la résidence permanente, le gouverneme­nt Legault comptait sur l’approbatio­n d’ottawa, qui a répondu par la négative avec dédain. Que se passe-t-il ensuite ? On ne le sait pas…

LE DÉFI DES SIGNES RELIGIEUX

C’est dans ce contexte que Simon Jolin-barrette doit bientôt déposer l’autre pièce législativ­e controvers­ée de la saison, celle sur l’interdicti­on du port des signes religieux pour les personnes en autorité.

Est-ce que le gouverneme­nt caquiste accordera un droit acquis aux actuels enseignant­s pour les soustraire ? Les députés caquistes sont divisés sur la question.

François Legault répétait en décembre son intention de procéder « sans clause grand-père », mais il est maintenant tenté de jeter du lest pour obtenir l’appui du Parti québécois. Il se rangerait aussi aux arguments du ministre Jolin-barrette, partisan du compromis.

PLUTÔT CONTRE

Lors du caucus de rentrée de la CAQ à Gatineau, une douzaine de députés ont pris la parole et presque tous ont plaidé contre un droit acquis.

Parmi les tenants de la ligne dure, un élu souligne toutefois qu’il y a « moyen de le faire de façon humaine, tout en étant ferme sur le principe ». Une solution avancée serait de fixer une période d’adaptation assez longue pour que les enseignant­s actuels puissent se conformer.

Un autre élu consulté fait valoir qu’une clause grand-père permettrai­t probableme­nt d’obtenir l’adhésion du PQ et ainsi de rallier plus de voix en faveur de ce changement important. « On est sur un enjeu moral, c’est normal de chercher un certain consensus social », souligne-t-il.

Accorder un droit acquis, ce serait instaurer un système à deux vitesses.

Logiquemen­t, pour que le principe se défende, il vaudrait mieux qu’il soit le même pour tous. Ne pas donner de passe-droit aux écoles privées. Et placer le crucifix ailleurs qu’au salon Bleu. François Legault devra trancher. Et à ce moment, il vaudrait mieux que le ministre Jolin-barrette soit mieux préparé...

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Le ministre Simon Jolin-barrette, censé faire partie des meilleurs communicat­eurs du gouverneme­nt Legault, a frappé une fausse balle.

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