« Nous sommes des gladiateurs »
Alexandre Tagliani a failli tout abandonner en 2001
BOWMANVILLE | L’accident terrifiant qui a failli coûter la vie à Robert Wickens, dimanche dernier à Pocono, a rappelé une nouvelle fois que le sport automobile est une discipline dangereuse malgré toutes les avancées réalisées récemment pour améliorer la sécurité.
Pendant deux heures, les pilotes de la Série Indycar ont patienté dans les puits de ravitaillement pour obtenir le feu vert avant de reprendre la compétition, le temps d’extirper avec le plus grand soin le pilote torontois de son bolide amoché et de réparer des sections de clôtures arrachées.
Quand les ouvriers ont terminé le travail de rapiéçage sur les lieux de l’embardée, plusieurs ont remis en question l’efficacité des nouvelles installations, en redoutant qu’un autre accident puisse avoir des conséquences pires s’il survenait au même endroit. En d’autres termes, ce furent des réparations de fortune.
L’INQUIÉTUDE DE BOURDAIS
Les pilotes ont toutefois accepté de reprendre les hostilités malgré la scène terrifiante dont ils ont été témoins un peu plus tôt. « Les images sont aussi affolantes une semaine plus tard, a avoué Alexandre Tagliani, en entrevue au Journal. On ne veut jamais voir ça. Mais, d’un autre côté, les pilotes n’avaient pas le choix de prendre place dans leur voiture et de continuer à courir.
Ils ont un contrat à respecter, de peur de perdre leur volant, a-t-il renchéri. Vous ne savez pas le nombre de pilotes prêts à prendre la relève. Ils sont nombreux… »
« En fait, il aurait fallu qu’ils fassent front commun pour exiger de meilleures conditions avant de retourner en piste, de prétendre Tagliani. À part Sébastien Bourdais, aucun d’entre eux n’a formulé de véritables préoccupations. »
Les pilotes sont conscients des dangers, et particulièrement en Indycar où, sur des tracés ultra rapides comme Pocono, les vitesses atteintes (plus de 340 km/h) sont ahurissantes. Toute erreur peut être fatale.
« Nous acceptons cette réalité, tout en prônant des mesures de sécurité optimales, affirme Tagliani. Mais on n’est jamais à l’abri de ce genre d’accidents.
On veut toujours rouler vite, poursuit-il. Nous sommes des gladiateurs. Ce goût du risque est en nous. Si un pilote pense seulement aux accidents, il est mieux de faire autre chose. »
LE TRISTE SOUVENIR
Tagliani parle en connaissance de cause, lui qui a été impliqué dans un accident épouvantable avec Alessandro Zanardi sur l’ovale de Lausitz, en Allemagne, le 15 septembre 2001.
L’impact, survenu à plus de 300 km/h, a été brutal. Il aura d’ailleurs coûté les deux jambes au pilote italien.
Tagliani s’en est tiré avec des contusions mineures et une légère commotion céré- brale. Pendant les jours qui ont suivi, il a remis sa carrière en question, et surtout sa participation à la course suivante, prévue dès le week-end suivant en Angleterre. Mais il s’y est présenté et a couru. « C’est grâce à Alessandro et à son épouse, qui tenaient à ce que j’y participe. Je leur dois beaucoup dans ma décision. »
WICKENS OPÉRÉ À PLUSIEURS REPRISES
L’écurie Schmidt Peterson a émis hier un nouveau bilan de santé de leur pilote accidenté.
On y apprend que Wickens a subi plusieurs interventions chirurgicales au cours des derniers jours pour soigner ses fractures aux deux chevilles et au bras droit.
Des examens n’ont révélé aucune autre blessure, voilà la bonne nouvelle. La mauvaise, c’est que la condition de sa colonne vertébrale représente toujours une source d’inquiétude.
Le communiqué se fait plutôt évasif à cet égard et ne donne pas d’informations concrètes sur sa condition.
« L’étendue des lésions à la moelle épinière reste inconnue », peut-on lire.
Certains médias ont rapporté que Wickens n’éprouvait pas de sensation dans l’une de ses jambes, information qui n’a pas été validée par les médecins qui le traitent à l’hôpital Lehigh Valley, en Pennsylvanie.
D’autres opérations correctives sont aussi prévues la semaine prochaine, apprend-on.