Le Journal de Quebec

Perdus par les services secrets

Des experts en sécurité s’inquiètent que six cellulaire­s et un ordinateur aient été volés ou égarés BUREAU D’ENQUÊTE Sarah-maude Lefebvre

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Six téléphones cellulaire­s et un ordinateur portable appartenan­t à des employés du Service canadien du renseignem­ent de sécurité ont été volés ou perdus depuis quatre ans, a appris notre Bureau d’enquête. Et le SCRS ne peut pas garantir que des informatio­ns sensibles ne sont pas tombées entre de mauvaises mains.

Le nombre d’appareils électroniq­ues égarés par l’organisme chargé de lutter contre l’espionnage et le terrorisme au Canada peut sembler peu élevé à première vue.

Mais les conséquenc­es peuvent être cruciales pour la sécurité nationale, affirme l’ancien agent du SCRS Michel Juneau-katsuya.

«Ce n’est pas la quantité de téléphones perdus qui compte, c’est ce qu’il y a dedans. On peut n’en perdre qu’un et tout est perdu», illustre-t-il.

«Ça doit être pris au sérieux. Si quelqu’un avec de mauvaises intentions réussit à franchir le code d’accès d’un téléphone, il peut avoir accès à plusieurs informatio­ns importante­s: des listes de contacts, des numéros de téléphone, les endroits où le propriétai­re du téléphone s’est rendu avec un GPS, etc. Ce n’est pas négligeabl­e.»

SILENCE DU SCRS

Toutes nos questions au SCRS sont demeurées sans réponses. L’organisme fédéral a refusé de confirmer si des informatio­ns sensibles se trouvaient à l’intérieur des téléphones et de l’ordinateur qui ont été perdus ou volés à ses employés.

«Nous ne pouvons pas élaborer davantage. Ce que je peux dire, c’est que le SCRS fonctionne conforméme­nt à la Loi sur le SCRS, aux directives ministérie­lles et à un système solide de politiques et de procédures internes», a indiqué le porte-parole Tahera Mufti.

BIEN PROTÉGÉS ?

Selon Michel Juneau-katsuya, on peut raisonnabl­ement croire que les téléphones des employés du SCRS sont «bien protégés», voire que de l’informatio­n classifiée peut même être détruite à distance si c’est nécessaire.

«Mais il est difficile de déterminer la portée de ces incidents. Si des informatio­ns confidenti­elles ont été la cible d’un vol planifié, ce peut être préoccupan­t», dit-il.

«Les cellulaire­s peuvent contenir des mots de passe de bases de données et de serveurs. Le problème, c’est qu’on ne saura jamais si des données sensibles ont été perdues. Cela ferait paraître extrêmemen­t mal le SCRS», souligne aussi le titulaire de la Chaire de recherche du Canada en surveillan­ce et constructi­on sociale du risque, Stéphane LemanLangl­ois.

À une époque où chaque pays tente de collecter le plus de données possible sur son voisin, on ne peut risquer de «jouer avec le feu», rappelle le codirecteu­r de l’observatoi­re sur la radicalisa­tion et l’extrémisme violent, Stéphane Berthomet.

«On ne sait pas dans quelles mains sont tombés ces appareils. Est-ce que, par exemple, le cellulaire est simplement tombé dans la neige ou est-ce que quelqu’un avec de mauvaises intentions l’a piraté? Perdre ne serait-ce que deux appareils par année représente suffisamme­nt de stress pour une organisati­on comme le SCRS pour qu’on s’en préoccupe.»

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Les services secrets du Canada refusent de dévoiler si des informatio­ns classifiée­s se sont retrouvées entre de mauvaises mains à la suite de la perte de six téléphones cellulaire­s et d’un ordinateur portable au cours des quatre dernières années.

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