Le Journal de Quebec - Weekend

SUR LES TRACES DE MAMAN

- CÉDRIC BÉLANGER Le Journal de Québec cedric.belanger @quebecorme­dia.com

Abandonné à la naissance, le cinéaste Claude Demers n’a retracé sa mère biologique qu’une fois adulte, après seize ans de recherches. Malgré ce rejet, il trace d’elle un portrait rempli d’amour et empreint de poésie dans le docu-fiction Une femme, ma mère.

« C’était important de ne pas trahir qui était cette femme, de ne pas en faire un monstre », confie M. Demers à qui on doit aussi les documentai­res Les dames

en bleu, à propos des admiratric­es de Michel Louvain, et D’où je viens, sur Verdun, le quartier de son enfance.

Il aurait pourtant eu toutes les raisons de lui en vouloir. Comme il le raconte dans son film, sa mère est tombée enceinte, contre son gré, à l’âge de 27 ans, dans les années 1960. Elle a néanmoins mené la grossesse à terme, puis donné le bébé en adoption en exprimant le souhait de ne plus en entendre parler.

Elle a même refusé, dans un premier temps, de rencontrer son fils quand celui-ci lui a envoyé une première lettre, après l’avoir retrouvée en 2002.

Or, Claude Demers a insisté, sa mère a finalement accepté de le rencontrer, et les deux ont même noué une relation, même si sa maman a toujours refusé de lever le voile sur plusieurs épisodes de son passé.

LE VRAI ET LA LIBERTÉ

C’est ce qui explique pourquoi le cinéaste, désireux de lui donner un passé, a opté pour un film narratif mêlant documentai­re et fiction, constitué d’images d’archives et de séquences où diverses femmes, non-comédienne­s, incarnent sans dire un mot sa mère à différente­s étapes de sa vie.

« Quelle est la part de fiction ? Disons que la colonne vertébrale du film est vraie. Pour des questions éthiques, je me devais de ne pas inventer des choses qui n’étaient pas vraies. Je ne pouvais en faire une tenancière de bordel ou une concertist­e de piano. Par contre, il y a des choses à propos desquelles j’avais des versions différente­s de sa part et des membres de sa famille. Comme créateur, parce que je fais du cinéma et que mon histoire doit être bonne, je me suis permis des libertés », dit Claude Demers.

DES JEUNES TOUCHÉS

Une femme, ma mère arrive en salles précédé par un prix remporté aux

Rencontres internatio­nales du documentai­re de Montréal, l’automne dernier. Il sera aussi projeté au Festival internatio­nal du film de Rotterdam, le 27 janvier, quatre jours avant d’être proposé au public québécois.

Déjà, Claude Demers affirme avoir senti que son film touchait une corde sensible chez les cinéphiles et pas seulement auprès des personnes adoptées ou ceux qui ont connu la Grande Noirceur.

« Ma mère est une femme qui a voulu mener sa vie comme elle l’entendait, assez libre et émancipée malgré tout. Je me suis dit que ça pouvait interpelle­r des jeunes femmes et, de fait, après la projection aux RIDM, des gens de 18-20 ans sont venus me voir pour me dire qu’ils avaient été touchés. » Une femme, ma mère prend l’affiche le 31 janvier.

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Le cinéaste Claude Demers
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