Un vaste territoire aux enjeux multiples
Le Québec se distingue par l’ampleur et la variété impressionnante des écosystèmes qui couvrent son territoire. Due à un fort gradient climatique et géographique, la végétation varie énormément, passant d’érablières riches plus au sud, aux vastes forêts boréales. Chaque type de forêt présente des défis d’aménagement distincts.
Le Québec se démarque également d’autres pays par le fait que plus de 92% de ses forêts sont de tenure publique. Les Québécois sont ainsi collectivement propriétaires de vastes territoires forestiers gérés par le gouvernement. D’ailleurs, ces territoires offrent une accessibilité à tous ceux qui souhaitent les fréquenter ou en faire usage.
Pour encadrer l’utilisation de certains de ces territoires publics, le gouvernement a mis en place des réserves fauniques, des zones d’exploitation contrôlée (ZEC) et des pourvoiries. En plus de permettre la récolte de bois, ces territoires visent à concilier la protection de la faune et l’accès aux activités récréatives. Aménager la forêt sur ces territoires nécessite une étroite collaboration entre les gestionnaires fauniques et les forestiers dans le but de respecter leurs mandats uniques de conservation et de mise en valeur de la faune.
De multiples utilisateurs
Au fil du temps, les Québécois ont développé un fort attachement à l’égard de la forêt publique, la fréquentant quotidiennement pour le travail ou l’utilisant pour une multitude d’activités telles que la chasse, la pêche, le trappage, la villégiature et les activités de plein air. À titre d’exemple, selon les données récentes, on compterait en 2024, 294 000 chasseurs, 695 000 pêcheurs et 6 600 trappeurs.
Les forêts québécoises comptent également plus de 35 000 baux de villégiature. Il s’agit pour la plupart de chalets construits à proximité d’une étendue d’eau où les propriétaires vont passer leurs fins de semaine et leurs vacances pour profiter de la nature et pratiquer des activités à caractère faunique. Nous trouvons donc au Québec une grande communauté de passionnés, profondément investis dans la protection des habitats fauniques et le maintien d’un environnement propice à l’exercice de leurs activités préférées. Quant aux forestiers, bien qu’ils soient cités en dernier, ils sont généralement dans les premiers à marcher dans la forêt, à l’inventorier et à ouvrir la voie en construisant les chemins qui seront finalement utilisés par l’ensemble des usagers.
L’ensemble de gens qui fréquentent ces territoires pour la pratique de leurs activités et ceux qui en vivent sont des témoins et des acteurs privilégiés de l’aménagement de ces forêts. Leur collaboration représente de belles occasions d’échanger de l’information et des connaissances au bénéfice d’un meilleur aménagement.
L’aménagement des forêts publiques, un travail délicat
Récolter du bois peut sembler simple en apparence, mais cela nécessite une prise en compte minutieuse de nombreux paramètres afin de préserver la santé des écosystèmes et de garantir une acceptabilité sociale optimale lors de leurs
travaux en forêt. Dans ce contexte complexe où beaucoup d’usages se superposent sur un même territoire et où les attentes économiques, environnementales et sociales sont élevées, la planification des travaux forestiers représente un défi majeur. L’aménagiste forestier se présente alors comme un « maestro de la forêt », jonglant avec les besoins de chacun des groupes d’usagers, tout en prenant en compte une multitude d’enjeux environnementaux, dont celui des changements climatiques, pour finalement livrer du bois de qualité dans les cours d’usines. Il est important de souligner le travail souvent méconnu de ces technologues et des ingénieurs forestiers impliqués dans ce processus.
Comment faciliter l’harmonisation en forêt?
Pour aider les responsables de la planification forestière à comprendre les différents enjeux et intégrer les besoins d’un maximum d’usagers de la forêt, divers processus ont été mis en place. En premier lieu, on trouve les Tables de gestion intégrée des ressources et du territoire (TGIRT). Celles-ci réunissent, pour chaque territoire, les représentants des différents groupes d’utilisateurs. Les discussions lors de ces rencontres permettent entre autres de bonifier les propositions d’aménagement à la lumière des informations recueillies. En plus de ces comités, les aménagistes de la forêt organisent des consultations publiques dans chaque région lors desquelles ils présentent les travaux forestiers prévus. Les citoyens et utilisateurs intéressés par ces territoires peuvent alors en prendre connaissance et émettre des commentaires de manière à informer les forestiers de leurs préoccupations. Finalement, il existe un processus de consultation spécifiquement dédié aux communautés autochtones qui utilisent activement les forêts pour la pratique de leurs activités traditionnelles ou autres.
Malgré tous ces beaux mécanismes présentés, l’élément clé de la réalisation d’un aménagement forestier respectueux réside dans la participation active de tous les usagers. C’est simple, l’information qui n’est pas partagée ne peut être intégrée!
Pour terminer, il est crucial de prendre conscience de cette chance unique que nous avons au Québec, de pouvoir profiter de cette vaste forêt publique. Pour faire honneur à cette richesse collective et protéger ce privilège, continuons à l’utiliser et à la mettre en valeur dans le respect de l’ensemble de ses utilisateurs.