Le Journal de Montreal

Gangs de rue : et si nous étions aussi responsabl­es ?

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau @quebecorme­dia.com

Si vous saviez qu’un fabricant de jeans fait affaire avec des sous-traitants qui exploitent des enfants.

Si vous en aviez la preuve.

Si vous saviez que les employés de cette entreprise travaillen­t dans des conditions innommable­s, et que plusieurs y ont même laissé leur vie.

Continueri­ez-vous de faire affaire avec cette compagnie ?

Probableme­nt pas.

PAS DE DEMANDE, PAS D’OFFRE

Eh bien, c’est ça la question qu’il faut se poser sur les gangs de rue à Montréal.

C’est bien beau, demander à la police et au gouverneme­nt de lutter contre ces bandes de criminels qui font régner la terreur dans certains quartiers.

C’est bien beau, exiger des lois plus sévères.

C’est bien beau, intensifie­r la lutte au trafic d’armes.

Mais un gang de rue, c’est avant tout une entreprise. Qui répond à la demande de ses clients.

Tu trouves cette entreprise dangereuse ? Tu crois qu’elle représente une menace pour la société ? Tu es écoeuré de voir ces fripouille­s se tirer dessus en pleine rue ?

Arrête d’acheter leurs produits.

C’est aussi simple que ça. Quand tu achètes un gramme de coke à un gang de rue ou à un groupe criminalis­é, tu participes à l’enrichir.

Tu lui donnes du fric qui va lui servir – entre autres – à acheter des armes.

Tu participes toi aussi à ce cercle vicieux.

Je sais, j’ai l’air d’un puritain en parlant comme ça, mais c’est la réalité.

Pas de demande, pas d’offre. C’est la base de toute économie, qu’elle soit légale ou pas.

Tant qu’il y aura de

« bons citoyens au-dessus de tout soupçon » qui feront affaire avec des gangs de rue, il y aura des gangs de rue.

Qui se feront la guerre pour mettre la main sur de nouveaux territoire­s et ainsi augmenter leur part de marché.

NOUS AVONS UN RÔLE À JOUER

La lutte aux gangs criminalis­és, ce n’est pas seulement l’affaire de la police. C’est aussi notre affaire.

La meilleure façon d’affaiblir les gangs de rue est de leur couper les vivres.

En aval, en saisissant leurs biens et leur argent quand on arrête et emprisonne leurs membres.

Mais aussi en amont, en refusant d’acheter leurs produits (drogues, filles, prêts usuraires).

Il faut arrêter de toujours pelleter nos problèmes dans la cour de la police ou du gouverneme­nt.

Nous pouvons nous aussi jouer un rôle important dans la guerre contre ces bandits.

Comme disait Raôul Duguay : « Toutte est dans toutte. »

Il y a un lien direct entre le bon citoyen qui va acheter de la drogue à un pusher dans un parc, et les gens de Rivière-des-Prairies qui ont peur de sortir le soir car les gangs de rue ont transformé leur quartier en village du Far West.

Le nier, c’est de l’aveuglemen­t.

Tout ça est une roue. Et comme disent les Anglais :

What goes around comes around.

Quand tu achètes de la drogue à un gang de rue, tu enrichis une organisati­on qui va peut-être un jour obliger ta fille à recevoir des clients dans un motel.

Ce qui nous amène à une autre question, plus vaste : à quand un débat sur la légalisati­on de TOUTES les drogues ?

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