La fin d’une longue guerre
Américains et talibans ont signé un accord qui ouvre la voie au retrait des troupes
AFP | Les États-Unis et les talibans ont signé un accord historique, hier, qui ouvre la voie à un retrait total des troupes américaines après un déploiement de près de 20 ans en Afghanistan.
L’entente doit mener, si les conditions sont respectées, à un retour aux ÉtatsUnis des quelque 13 000 soldats toujours postés en sol afghan et à des négociations de paix inédites entre les talibans et l’État afghan.
Les principaux négociateurs Zalmay Khalilzad, côté américain, et Abdul Ghani Baradar, chef politique des insurgés afghans, ont ratifié l’accord devant le secrétaire d’État Mike Pompeo. Les deux hommes se sont serré la main sous les applaudissements et les cris « Allah Akbar », à Doha, capitale du Qatar.
135 JOURS
Après 18 ans de guerre, le président américain Donald Trump a prévenu que « si les choses se passent mal, nous retournerons [sur les sols afghans] ».
Il rencontrera « bientôt » les dirigeants talibans, a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse à Washington. Puisque les autorités afghanes ont jusqu’ici été tenues à l’écart de ces pourparlers directs et sans précédent, ce texte n’est pas un accord de paix à proprement parler.
Les Américains s’engagent tout de même à entamer immédiatement le retrait graduel de leurs troupes, pour abaisser à 8600 d’ici 135 jours les 13 000 actuellement en place.
Un calendrier de principe prévoit le retrait total de toutes les forces étrangères d’Afghanistan au cours des 14 mois suivant la signature de l’accord.
FIN DU TERRORISME ?
En contrepartie de cette revendication-clé des talibans, ceux-ci s’engagent à bannir tout acte de terrorisme depuis les territoires qu’ils contrôlent.
Ils ont également promis d’entamer de véritables négociations avec le gouvernement de Kaboul avec lequel ils refusaient jusqu’ici de parler. Ces négociations doivent commencer d’ici le 10 mars, selon l’accord, probablement à Oslo, en Norvège.
Cette entente constitue un « coup majeur » en matière de politique étrangère américaine, souligne le politologue spécialiste du Moyen-Orient à l’Université de Sherbrooke, Sami Aoun, selon qui la partie est cependant loin d’être gagnée.
« Ce qui est sûr, c’est que les États-Unis ont envoyé un message fort comme quoi ils ne veulent pas s’engouffrer dans des conflits civils », estime le directeur de l’Observatoire sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, faisant aussi référence à l’expérience américaine en Irak et en Syrie.
La condition selon laquelle les talibans doivent négocier avec le gouvernement central constitue le point de bascule de l’accord, selon M. Amoun.
« Ce point est important et risqué. Estce que les talibans vont traiter avec la présidence d’Ashraf Ghani, qui est élu ? S’il y a bonne foi, il y a espoir de venir à une paix et une réconciliation nationale. Si par malheur les talibans vont bouffer l’État central ou le démanteler, les risques d’une guerre civile sont élevés », prévient-il.
PROMESSE TENUE
Donald Trump avait brusquement annulé la signature d’un accord similaire en septembre dernier après la mort d’un soldat américain dans un énième attentat à Kaboul.
Pour l’instant, le président américain se sert du pacte pour clamer, en campagne pour sa réélection dans huit mois, qu’il a tenu l’une de ses promesses phares : mettre fin à la plus longue guerre que son pays a connue.