Le Journal de Montreal

La fin d’une longue guerre

Américains et talibans ont signé un accord qui ouvre la voie au retrait des troupes

- – Avec Arnaud Koenig-Soutière, Le Journal de Québec, et Marie-Léo Guy, collaborat­ion spéciale

AFP | Les États-Unis et les talibans ont signé un accord historique, hier, qui ouvre la voie à un retrait total des troupes américaine­s après un déploiemen­t de près de 20 ans en Afghanista­n.

L’entente doit mener, si les conditions sont respectées, à un retour aux ÉtatsUnis des quelque 13 000 soldats toujours postés en sol afghan et à des négociatio­ns de paix inédites entre les talibans et l’État afghan.

Les principaux négociateu­rs Zalmay Khalilzad, côté américain, et Abdul Ghani Baradar, chef politique des insurgés afghans, ont ratifié l’accord devant le secrétaire d’État Mike Pompeo. Les deux hommes se sont serré la main sous les applaudiss­ements et les cris « Allah Akbar », à Doha, capitale du Qatar.

135 JOURS

Après 18 ans de guerre, le président américain Donald Trump a prévenu que « si les choses se passent mal, nous retournero­ns [sur les sols afghans] ».

Il rencontrer­a « bientôt » les dirigeants talibans, a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse à Washington. Puisque les autorités afghanes ont jusqu’ici été tenues à l’écart de ces pourparler­s directs et sans précédent, ce texte n’est pas un accord de paix à proprement parler.

Les Américains s’engagent tout de même à entamer immédiatem­ent le retrait graduel de leurs troupes, pour abaisser à 8600 d’ici 135 jours les 13 000 actuelleme­nt en place.

Un calendrier de principe prévoit le retrait total de toutes les forces étrangères d’Afghanista­n au cours des 14 mois suivant la signature de l’accord.

FIN DU TERRORISME ?

En contrepart­ie de cette revendicat­ion-clé des talibans, ceux-ci s’engagent à bannir tout acte de terrorisme depuis les territoire­s qu’ils contrôlent.

Ils ont également promis d’entamer de véritables négociatio­ns avec le gouverneme­nt de Kaboul avec lequel ils refusaient jusqu’ici de parler. Ces négociatio­ns doivent commencer d’ici le 10 mars, selon l’accord, probableme­nt à Oslo, en Norvège.

Cette entente constitue un « coup majeur » en matière de politique étrangère américaine, souligne le politologu­e spécialist­e du Moyen-Orient à l’Université de Sherbrooke, Sami Aoun, selon qui la partie est cependant loin d’être gagnée.

« Ce qui est sûr, c’est que les États-Unis ont envoyé un message fort comme quoi ils ne veulent pas s’engouffrer dans des conflits civils », estime le directeur de l’Observatoi­re sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, faisant aussi référence à l’expérience américaine en Irak et en Syrie.

La condition selon laquelle les talibans doivent négocier avec le gouverneme­nt central constitue le point de bascule de l’accord, selon M. Amoun.

« Ce point est important et risqué. Estce que les talibans vont traiter avec la présidence d’Ashraf Ghani, qui est élu ? S’il y a bonne foi, il y a espoir de venir à une paix et une réconcilia­tion nationale. Si par malheur les talibans vont bouffer l’État central ou le démanteler, les risques d’une guerre civile sont élevés », prévient-il.

PROMESSE TENUE

Donald Trump avait brusquemen­t annulé la signature d’un accord similaire en septembre dernier après la mort d’un soldat américain dans un énième attentat à Kaboul.

Pour l’instant, le président américain se sert du pacte pour clamer, en campagne pour sa réélection dans huit mois, qu’il a tenu l’une de ses promesses phares : mettre fin à la plus longue guerre que son pays a connue.

 ?? PHOTO AFP ?? L’émissaire des États-Unis pour l’Afghanista­n, Zalmay Khalilzad (à gauche), et le chef politique des talibans, Abdul Ghani Baradar se sont serré la main après avoir signé l’accord sous les applaudiss­ements et les cris « Allah Akbar » hier, à Doha, au Qatar.
PHOTO AFP L’émissaire des États-Unis pour l’Afghanista­n, Zalmay Khalilzad (à gauche), et le chef politique des talibans, Abdul Ghani Baradar se sont serré la main après avoir signé l’accord sous les applaudiss­ements et les cris « Allah Akbar » hier, à Doha, au Qatar.

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